Grand Paris: Un accord "historique"
Le gouvernement et la région ont enfin trouvé un terrain d’entente sur les transports en Ile-de-France. Le "Grand Paris Express", futur métro automatique en rocade, et la modernisation des réseaux existants mobiliseront d’ici 2025 la bagatelle de 32,4 milliards d’euros. Deux points noirs: l’opposition des Verts et un "désaccord" sur Saclay.
"Historique!" Ils avaient tous ce mot à bouche mercredi dans le salon de réception du ministère de la Ville, rue saint-Dominique (7e). Maurice Leroy (NC), le ministre en charge du Grand Paris, et Jean-Paul Huchon (PS), le président de la région Ile-de-France, ont annoncé en grande pompe la conclusion d’un accord déterminant pour l’avenir des transports franciliens. Ils enterraient ainsi la hache de guerre, après trois ans de farouche opposition entre l’Etat et la région sur le dossier du Grand Paris. Et fort opportunément, à cinq jours de la fin des débats publics, le 31 janvier, sur les deux projets de métros en rocade jusqu’ici concurrents du gouvernement et de la région.
Nathalie Kosciusko-Morizet (UMP), ministre de l’Ecologie, des Transports et du Logement (n°4 du gouvernement), s’est invitée aux réjouissances. Se sont aussi croisés, tout sourire, André Santini (patron de la Société du Grand Paris), Claude Bartolone (Seine-Saint-Denis, PS), Christian Favier (Val-de-Marne, PCF), Guillaume Pepy (SNCF), Pierre Mongin (RATP), Hubert du Mesnil (RFF), Daniel Canepa (préfet de région)… Seuls les Verts manquaient à l’appel, leur hostilité à ce compromis étant la seule fausse note dans l’euphorie générale.
Métro en rocade autour de Paris
L’accord prévoit un investissement de 32,4 milliards d’euros d’ici à 2025. Il porte sur la modernisation des RER existants (11,9 milliards) et sur la réalisation d’un métro automatique en rocade autour de Paris (20,5 milliards, hors matériel roulant). Ce "Grand Paris Express" fusionne le projet de double boucle du gouvernement et d’Arc Express de la région. Il intègre également deux boucles à l’est - via Clichy-Montfermeil et via Bobigny -, conformément aux attentes de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne. Axe structurant du projet, la ligne 14 du métro sera prolongée au sud jusqu’à Orly et au nord jusqu’à Saint-Denis-Pleyel, d’où une autre ligne desservira Roissy.
"Dans ce vaste projet, il y a du plus et du mieux", se réjouit Nathalie Kosciusko-Morizet, qui promet un milliard d’euros d’ici 2013 pour s’attaquer "tout de suite […] à la galère et la saturation dans les RER". Pour Jean-Paul Huchon, "ce moment a quelque chose d’historique parce que nous nous engageons pour vingt ans sur des montants d’investissement jamais atteints pour des transports collectifs. C’est un vrai tournant économique, social et écologique pour l’Ile-de-France." Il estime que la négociation a débouché sur une "desserte plus fine des territoires", avec sept gares de plus que ce que prévoyait la Société du Grand Paris.
Trouver une "traduction législative"
Mais ses alliés écologistes, Cécile Duflot et Jean-Vincent Placé, ne partagent pas cet enthousiasme. Ils dénoncent une "opération de communication du gouvernement", de la "poudre aux yeux". Craignant un nombre de gares insuffisant, ils estiment que le financement "n’est pas assuré": "Impossible de cautionner cet accord qui ressemble à s’y méprendre aux emprunts russes", accuse Placé.
Autre point d’achoppement, acté par les deux parties: le passage du "Grand Paris Express" sur le plateau de Saclay. "A chaque jour suffit sa peine", sourit Leroy, qui doit encore faire accepter cette exigence, "non-négociable", dit-on, du Président de la République. "Attendons les conclusions de la commission du débat public", avance Huchon, qui préférerait un bus ou un tramway, à l’instar des Verts.
Reste aussi à trouver une "traduction législative" à cet accord: pour le Schéma directeur de la région (SDRIF), bloqué depuis des années; ou pour les modalités de financement (TIPP Grenelle, versement transport, autres ressources fiscales…). Par ailleurs, le Syndicat des transports d’Ile-de-France (STIF), présidé par Huchon, doit être "associé aux choix techniques du nouveau métro, y compris les appels d’offres, précise-t-il. Il devra aussi assurer la maîtrise d’ouvrage d’une partie des projets, à commencer par le prolongement de la ligne 14 dès cette année." Enfin, d’autres protagonistes se frottent les mains: les architectes du Grand Paris, qui ont le sentiment d’avoir fait avancer le dossier. "Ça y est, c’est parti, s’exclame Roland Castro. Le Grand Paris peut démarrer!"
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