de vudeloin » Mar 18 Jan 2011 17:24
Pour aller un peu plus loin encore dans le débat sur cette question de la cartographie, j’indique tout d’abord que j’ai accès à la fois à l’atlas électoral réalisé par Salmon mais aussi à l’atlas historique du découpage électoral dont la rédaction est dirigée par R. Gaudillère.
Quelques éléments de plus sur deux séquences électorales, en l’espèce celle de 1936 et les deux scrutins législatifs de 1946.
Pour 1936, comme je le pressentais, les éléments fournis permettent de répartir Paris de manière extrêmement précise entre forces politiques.
Le PCF – SFIC s’avère la première force politique dans 11 des 20 arrondissements de la capitale ( les 3e, 4e, 5e, 10e, 11e, 13e, 14e, 15e, 18e, 19e et 20e ), quand bien même n’y obtient il pas tous les sièges de députés correspondants.
Le Parti d’unité prolétarienne, constitué par des dissidents du PCF et qui, avec d’autres forces de gauche, notamment des dissidents du radicalisme, participe à l’USR, est la première force dans le 12e arrondissement.
Enfin, sans surprise, les forces de droite dominent dans les 1er, 2e, 6e, 7e, 8e, 9e, 16e et 17e arrondissements, même si, comme nous l’avons déjà indiqué, Prosper Môquet est élu dans ce dernier arrondissement, dans le quartier des Epinettes.
Nous ne sommes donc aujourd’hui, dans la géographie politique parisienne, pas loin de la répétition de ce schéma, à la nuance près que la principale force politique à gauche n’est plus le PCF.
Sur Lyon , sans surprise, ce sont les 2e et 6e arrondissements qui votent à droite.
Et le reste de la ville est partagé entre PCF ( sur les Etats-Unis ), SFIO et radicaux.
Quant à Marseille, pas de surprise non plus, avec une droite influente sur les quartiers centraux et les 8e et 9e.
Pour 1946, les éléments que je souhaite communiquer se fondent sur des scrutins de listes départementales, et sur la position occupée par telle ou telle force politique sur l’échiquier local.
Sur les 90 départements métropolitains ( je n’ai pas d’indications précises sur l’Outre Mer en matière de cartographie ), nous rencontrons 6 cas de figure différents quand il s’agit de pointer la première force politique de chaque département.
Premier cas, très à part, celui des Alpes Maritimes où une liste rassemblant des divers droite et des radicaux arrive en tête en avril comme en novembre 1946.
Soyons précis : il s’agit d’une liste pilotée par Jean Médecin, Maire de Nice et dont on sait que le fils occupa pendant quelques années les mêmes fonctions.
Second cas : les départements plutôt fidèles à la droite de l’époque ( indépendants, PRL et autres ).
Il y en a 15 au mois d’avril.
Ce sont les départements de la Meuse, de la Meurthe et Moselle, de l’Aube, de l’Yonne, de la Côte d’Or, de la Haute Saône, du Doubs sur la partie Nord est du territoire ; de l’Eure et Loir, du Loir et Cher, de la Loire Atlantique et de la Charente Maritime sur le Centre Ouest et l’Ouest ; de l’Aveyron, du Cantal, de l’Ardèche et de la Haute Loire sur le Massif central.
En novembre 1946, les partis de droite perdent la Charente Maritime au profit du PCF et l’Aveyron au profit du MRP.
Ils ne regagnent que les Hautes Alpes aux dépens du PCF.
On notera que 10 des départements d’avril ont un conseil général de droite avant ce renouvellement 2011 et 9 de ceux de novembre.
Les radicaux, grande force de la IIIe République, ont été marginalisés par la guerre et ils ne contrôlent plus, en avril 1946, que la Corse, l’Eure, le Loiret et la Haute Marne.
Encore tout cela se passe t il dans un contexte de regroupement, puisque l’alliance s’appelle le Rassemblement des Gauches Républicaines ( RGR ).
La Haute Marne passe au MRP en novembre 1946.
La SFIO, premier parti en 1936, est également en position de faiblesse lors des scrutins de 1946 où son influence globale cache mal qu’elle a perdu le leadership à gauche au profit du PCF.
En avril 1946, la SFIO est sur une logique de bastion qui fait d’elle la première force politique sur la Gironde ( Bordeaux ), les Landes, la Haute Garonne ( Toulouse ), l’Aude, le Puy de Dôme ( Clermont Ferrand ), les Alpes de Haute Provence – alors appelées Basses Alpes – et le Pas de Calais, terre d’élection de Guy Mollet.
En novembre, le parti cède Alpes de Haute Provence, Puy de Dôme et Pas de Calais au PCF.
On notera cependant qu’il s’agit, avec ces 7 départements d’avril 1946, de territoires où la gauche exerce toujours aujourd’hui une certaine suprématie.
Reste le cas des deux partis les plus influents en termes de territoire : le MRP et le PCF.
En avril, le MRP est en tête dans 33 départements.
A l’Ouest, le parti démocrate chrétien contrôle les quatre départements bretons, les trois départements bas normands, la Sarthe, la Mayenne, la Vendée, le Maine et Loire, l’Indre et Loire, les Deux Sèvres et la Vienne, soit un premier ensemble continu de 14 départements.
A l’Est, il contrôle les deux départements alsaciens, le Jura, Belfort, la Moselle, la Marne, les Vosges, soir un ensemble de 7 départements.
Dans la Partie Sud du pays, il tient l’Isère, la Loire, la Drôme, la Haute Savoie, la Lozère, le Lot, le Tarn, le Tarn et Garonne, le Gers, les Hautes Pyrénées et les Basses Pyrénées, aujourd’hui Atlantiques.
Soit un total de 11 départements.
Enfin, isolé mais essentiel, le MRP est en tête dans le Nord.
En novembre, le MRP reprend les Ardennes, la Haute Marne et l’Aveyron.
Par contre, il cède la Drôme, l’Isère et le Nord au seul PCF.
19 de ces départements ont un conseil général de droite aujourd’hui encore.
Le PCF, justement.
En avril, il est première force politique de 30 département, dont les trois constituant l’Ile de France, les trois constituant la Picardie et la Seine Maritime, soit un premier bloc de 7 départements continus, complétés par les Ardennes qu’il perdra en novembre.
Mais le PCF est influent dans le Centre France, étant premier en Charente, en Dordogne, dans les trois départements limousins, dans l’Indre, le Cher, l’Allier, la Nièvre et la Saône et Loire.
Il est présent sur la Méditerranée, étant en tête sur les Pyrénées Orientales, l’Hérault, le Gard, les Bouches du Rhône et le Var, tous départements complétés par l’Ariège, les Hautes Alpes et le Vaucluse.
Enfin, il domine dans le Lot et Garonne, mais aussi dans trois départements du Sud Est, le Rhône, l’Ain et la Savoie.
En novembre, il perdra les Hautes Alpes et les Ardennes, mais il sera en tête dans le Nord, le Pas de Calais, la Charente Maritime, le Puy de Dôme, l’Isère, la Drôme et les Basses Alpes.
Ce qui portera, à ce moment là , à 35 le nombre de départements où le PCF est en tête.
On notera que, dans cet ensemble, nonobstant le redécoupage de la région Parisienne, seulement 7 départements ont un conseil général de droite.
Enfin, comme indiqué précédemment, compte tenu de la nature de l’information dont je peux disposer, je réponds aux demandes sur les évolutions du découpage historique des circonscriptions électorales.
Pour donner un exemple, dans le premier découpage mis en place, une ville comme Toulouse comptait quatre cantons au XIXe siècle et se trouve aujourd’hui partagée en quinze morceaux, huit intra muros et sept couplés avec des communes de son agglomération pour constituer une nouvelle entité administrative.
Et je ne parle pas plus longtemps de Paris, dont les 20 arrondissements étaient, le plus souvent, coupés en deux sièges durant toute la IIIe République, sauf quelques exceptions.