de Artisan-Politologue » Jeu 13 Jan 2011 12:40
Un débat passionnant en effet, qui ne sera sans doute pas tranché mais... lançons-nous tout de même!
Etant raide dingue passionné de géographie électorale, j'aurais tendance à penser que la carte électorale de la France est justement une accumulation de comportements locaux.
Bien entendu, ce facteur varie selon les élections, et bien sûr les enjeux. Il sera beaucoup moins pertinent pour les présidentielles, les européennes et les referendum. Le facteur local pèse à mon avis un peu plus lors des législatives, en partie du fait du mode de scrutin par circonscriptions.
Un autre phénomène joue en revanche contre cette accumulation: le cumul des mandats, qui induit certains réflexes légitimistes. Il est non seulement inscrit dans la mentalité des élus français, mais également dans les réflexes de certains électeurs, qui voteront pour tel ou tel élu à la députation parce qu'il ou elle "représentera mieux ma commune, mon canton", etc... Ce qui fait que certains échelons administratifs, classés de droite ou de gauche, votent plutôt pour le candidat du pouvoir.
Pour en revenir à la science politique pure et dure, je me réfèrerait au sablier de Kleinchmager, décrit dans ses "Eléments de géographie politique" analysé par Michel Bussi dans ses "Eléments de géographie électorale" (Publications de l'Université de Rouen).
En haut du sablier on trouve l'électeur avec ses réflexes. Il réagit selon:
-ses déterminants externes: appartenance sociale, revenus et patrimoine, âge et sexe et milieu géographique
-ses déterminants subjectifs: religion, conscience de classe, représentation du monde, histoire individuelle.
Au milieu se trouve le vote, qui agit comme un filtre.
En bas, le choix de l'électeur est transformé par l'offre politique. Elle se détermine selon:
-le contexte: nature du scrutin, enjeux, rapports de force
-la stratégie des partis (et les phénomènes notabiliaires): candidats, campagne, programme
-la conjoncture sociétale: situations économique, sociale et internationale.
Bien sûr tous ces facteurs n'ont pas la même intensité.
Mais ce petit sablier donne une réponse de normand (sans faire de mauvaises vannes à propos de la fac de Rouen) à la question de notre ami Vudeloin: le haut c'est l'accumulation, le bas le courant qui traverse toute l'opinion française.
J'ai tendance à penser que le haut est un peu plus important, mais ça n'est qu'un avis personnel.
Manu