Quels remaniements en 2014 ?

[Jean-Philippe]

Garot et Carlotti devraient faire les frais de leur défaite respective (je serais très impressionné par un renversement de tendances) à Laval et Marseille, de même que Delaunay (le pauvre Feltesse, son suppléant, aura tout perdu en peu de temps).
Ayrault est un peu affaibli à Nantes (le total de la gauche n'y est que de 55%, avec de mauvais reports, je n'exclus plus rien, même si ce serait incroyable). De plus, dans son fief d'origine de Saint-Herblain, la gauche qui change de chef de file ne fait que 44%, soit moins que le total UMP-UDI presque 46%) alors qu'une liste divers peut se maintenir. Une double mauvaise surprise peut contraindre Ayrault à partir précipitamment.

[Corondar]

Cela dit la fenêtre de tir reste très compliquée pour François Hollande. En dehors du problème de confronter un nouveau gouvernement à peine formé à un désaveu aux européennes, il se pose aussi la question du pacte de responsabilité.
Si le Président maintient son calendrier (faire voter le texte en avril via un vote de confiance), il est également compliqué de mettre en place un nouveau gouvernement après cette phase (voter la confiance pour changer les têtes à peine 1 mois après, ça ferait très IVe République, et enverrait un très mauvais signe pour le Parlement). En même temps, faire porter ce texte (sur lequel Hollande semble miser beaucoup pour la deuxième partie du quinquennat) par un gouvernement en sursis ce n'est pas idéal non plus.
Si on rajoute à ça la gauche du PS, le FdG et les Ecolos qui vont réclamer (ça a déjà commencé après ce premier tour catastrophique) à tout va un coup de barre à gauche et l'abandon de la ligne sociale-démocrate...
Bref, François Hollande est face à une équation qui me parait horriblement complexe. D'autant que si la déroute est confirmée au second tour (voire amplifiée), sa majorité risque de devenir bien indocile et exigeante en terme de changements. Rétrospectivement, le gouvernement a peut-être bien fait de lier l'adoption de ce pacte à un vote de confiance. Car, en l'état, il n'est pas certain que la majorité le voterait sans rechigner.

[alamo]

C'est assez significatif que dans les derniers sondages sur le sujet, ce sont les électeurs du FdG qui se disent le moins favorables au départ de JM Ayrault (44%) et à un remaniement (53%) que tous les autres réclament.

Ce qui se comprend : en soi, changer de têtes pour mener la même politique n'a, sur le fond, aucun intérêt, sauf pour le plaisir sadique de voir tirer sur l'ambulance et achever les blessés.

N. Vallaud-Belkacem l'a dit : le PS doit essayer de mobiliser les abstentionnistes, resserrer les rangs et "expliquer" auxgens que demain ça ira mieux... sans changer de cap.

C'est clair, si on change des têtes, c'est pour que rien ne change. La veste aux Européennes sera donc la même (30% de votants, un FN à plus de 25%, un PS sous les 15%), et aux prochaines territoriales et régionales, il pourrait y avoir 2/3 de pertes.

mais bon, du moment que les actionnaires voient grimper leurs dividendes, c'est l'essentiel...

[Marco35]

En tout cas, d'après l'Express, le remaniement serait déjà en cours : http://www.lexpress.fr/actualite/politi ... 03185.html

[Corondar]

Je pense en effet que la majorité des électeurs de gauche attend surtout un changement de ligne. La valse des postes pèsent assez peu je pense dans le choix des électeurs. A la limite, si c'est Valls à Matignon ou Aubry (qui est loin d'être aussi à gauche que certains veulent bien le dire), ça peut peut-être envoyer un premier message. Mais les déçus de gauche jugeront sur les actes, pas sur l'identité des personnes qui mettront ces actes en œuvre.
En même temps je fais parti de ces gens qui pensent que, pour que le clivage gauche/droite ait un sens, il faut que la droite mène une politique de droite, et que la gauche mène une politique de gauche. Le tout est que les différents partis définissent leurs lignes (même si je pense également que sur les valeurs sociétales un pluralisme interne est possible, moins sur les questions économiques), et qu'ils s'y tiennent une fois au pouvoir. Et les moutons seront bien gardés...

[alamo]

Ah ben tiens, ça c’est une question intéressante : qu’est-ce qu’une politique de droite, qu’est-ce qu’une politique de gauche ?

Moi-même je n’en ai pas une idée très claire, juste quelques impressions, et je me trompe peut-être :

Instaurer un bouclier fiscal et abaisser l’impôt sur la fortune pour que les riches puissent devenir plus riches, ça a priori c’est de droite.

Empêcher des banques privées gavées d’argent public de se livrer à des activités purement spéculatives nuisibles à l’économie et à la bonne marche de la société, et de multiplier les filiales dans des paradis fiscaux exotiques pour échapper à l’imposition en France, c’est incontestablement de gauche… (*)

Instaurer le RSA, ça je sais, c’est du vrai social, c’est de gauche…

Faire 40 milliards de cadeaux au patronat en invoquant l’aide à l’emploi en sachant pertinemment que ça gonflera surtout profits et dividendes, ça je sais aussi c’est de droite (Raymond Barre, tout ça…)

Prendre acte de l’échec de la politique de la ville depuis trente ans et engager un vaste programme de rénovation des quartiers en faisant sauter le tabou de la démolition (le PNRU), ça semblerait plutôt être de gauche…

Créer un nouveau système de cadeaux fiscaux dans l’immobilier sous forme d’amortissement qui ne profite au final qu’à la rente foncière en gonflant les prix (De Robien, Scellier, Duflot…), et inonder d’avantages fiscaux (TVA à 10%, exonération de TFPB) du logement dit « intermédiaire» à des loyers de 20 à 24 € / m² pour un studio à Paris ou ses environs, alors ça c’est de droite…

S’opposer à l’invasion d’un pays comme l’Iraq sous un prétexte bidon par une clique de fanatiques et d’affairistes arrivés par la fraude électorale à la tête des Etats-Unis, ça c’est une vraie position anti impérialiste, c’est forcément de gauche …

Se faire le toutou docile des mêmes Etats-Unis, et même de temps le roquet allant japper et mordiller les mollets de ceux que son maître lui désigne, ça c’est de l’atlantisme servile, c’est forcément bien de droite…

En revanche armer et financer la pire racaille islamiste pour complaire à des dictatures féodales et théocratiques qui cherchent à asservir la planète aux dogmes les plus obscurantistes, ça ce n’est ni de droite ni de gauche, c’est juste irresponsable et criminel. En tout cas je crois…

Je ne sais pas si j’ai bon ?



(*) : j’ai mis ça mais en fait il paraît que ça n’a pas été fait.

[Jean-Philippe]

Si certains veulent réagir, merci de le faire dans un autre sujet sur les notions de gauche et de droite.

[alamo]

le message était évidemment volontairement provocateur (mais Corondar posait une question de fond primordiale), et je le reconnais emprunt d'un peu de mauvaise foi (en même temps si vous croyez que ça a été facile de trouver des mesures "de gauche" sous le règne de Sarkozy, je voudrais vous y voir... j'en ai chié...)

Mais il s'inscrit quand même dans l'esprit de la rubrique : la question "quel remaniement ?" devtrait normalement être indissociable de son prolongement naturel : "pour quoi faire ?"

Les journalistes aiment bien jouer aux devinettes sur le côté chaises musicales, et tout réduire à un changement de têtes.
Or N. Vallaud-Belkacem, porte-parole du gouvernement, l'a dit : il n'y aura pas de changement de politique. confirmé ce matin pat T. Mandon.

Alors on glose sur la popularité de M. Valls sans voir que ce qui est populaire dans l'opinion, ce n'est pas Valls, c'est la fonction qu'il occupe. Ministre de l'Intérieur, c'est un poste déconnecté de tous les sujets qui flinguent la popularité de l'exécutif : économie, fiscalité, social, affaires européennes et étrangères, éducation... N. Sarkozy a bénéficié avant Valls de cette position qui permet de se tenir à l'écart des turbulences, on a vu sa popularité une fois qu'il était à l'Elysée.
Si Valls est nommé premier ministre, il assumera l'ensemble de la politique gouvernementale et sa côte de popularité sera divisée par deux en moins de trois mois. Et s'il se rêve un destin présidentiel, il sera fortement grillé. Ni Hollande ni son premier ministre ne seront au second tour en 2017.

Sapin ? le ministre de l'emploi, c'est-à-dire pour tout le monde, du chômage...
Fabius, Le Drian ? au vu de la politique étrangère de la France, j'ai du mal...
Aubry ? on ne cesse de nous la présenter comme bien plus à gauche que Hollande alors qu'elle est pour beaucoup de Français un symbole de l'européisme béat et son arrogance ("la mèremptoire" ne trancherait pas beaucoup avec celle du clone de Balladur qui occupe aujourd'hui Matignon...
Delanoë ? pas pire qu'un autre, mais quand on voit que certains médias assimilent déjà sa nomination éventuelle à un "clin d'œil" anniversaire à sur le mariage homo...

Je ne pense pas qu'aujourd'hui la population et l'électorat de gauche (de droite non plus d'ailleurs), se laissent enfumer par un simple changement de bobines dans les ministères, qui sera vu comme une marque d'autisme ou de mépris pour l'opinion.

Et comme la veste pour la majorité gouvernementale va être encore plus forte aux Européennes qu'aux Municipales, que fera-t-on ? un deuxième remaniement ?

PS : trait d'humour de T. Mandon ce matin : au journaliste (si l'on peut dire) qui le pressait sur la date du remaniement (Mandon venant de dire qu'il faudrait le faire vite), le député de l'Essonne a répondu " mardi c'est le 1er avril, on va éviter"

Humour plus vache de la part de la télé, qui nous a montré des images d'archives d'un député socialiste réclamant le remaniement et le départ du premier ministre de l'époque Edith Cresson (pour montrer que l'on écoutait le message des électeurs). député du nom de Jean-Marc Ayrault...

[Corondar]

En effet, je pense que les électeurs de gauche attendent surtout un changement de ligne politique. Qui le mettra en œuvre importe peu. Le problème pour Hollande, c'est que je crains que sa majorité aussi réclamera ce changement de ligne. Et, après le second tour, il est possible que ce changement soit réclamé bien au-delà de la gauche du PS et de ses alliés trublions.
La question est : Hollande arrivera-t-il à maintenir sa ligne sociale-démocrate (puisque visiblement il ne compte pas revenir là-dessus) à une majorité de plus en plus hostile, qui ne voudra pas enchaîner les défaites électorales ? Ce qui coince c'est que ces municipales ne sont que le début d'une longue liste de scrutins qui, si rien ne change, s'annoncent comme un chemin de croix pour les socialistes.
La chance de Sarkozy c'est que la droite française avait déjà été habituée lors des années Chirac à perdre quasiment tous les scrutins intermédiaires. Du coup, il avait moins de barons locaux à gérer, et la droite avait plus ou moins accepté l'idée que, lorsque l'on est au pouvoir au national, on perd au local.
Hélas pour Hollande, les élus PS sont habitués à gérer les (nombreuses) collectivités depuis un moment, et ils ne seront peut-être pas prêts à se faire hara-kiri pour sauver le soldat Hollande. Bref, ça risque de tanguer au sein de la majorité dans les mois à venir. Et un simple remaniement de façade sans aggiornamento sur le fond ne suffira pas à changer ça je gage.

[Jean-Philippe]

Pour revenir sur des noms, en écoutant Europe 1 hier soir, deux noms ont été lancés pour Matignon (dans le cas d'une lourde défaite avec de plusieurs villes de plus de 100 000 habitants qui basculent (sans compter les dizaines/centaines d'autres plus petites), ce que je n'imaginais pas possible avec une telle ampleur avant dimanche dernier alors que c'est désormais l'hypothèse la plus probable) :
Louis Gallois (un Barre de gauche) et Bertrand Delanoé.

Le problème de Valls, considéré comme favori, c'est son rapport aux écologistes que Hollande veut garder au gouvernement.
Hollande fera t-il comme Chirac avec Raffarin en gardant ce dernier malgré des défaites aux régionales, aux européennes ?

Parmi les entrées jugées probables par plusieurs commentateurs, Royal (à l'éducation et à la jeunesse)

Montebourg pourrait aller à la justice, Taubira à la culture, Fabius à l'économie (ou rester Quai d'Orsay).
Le gouvernement devrait être en tout cas plus resserré avec moins de 20 ministres, avec en revanche des secrétaires d'Etat (qui n'assisteraient plus au Conseil des ministres).