de alamo » Mer 26 Mar 2014 12:48
Petit bilan du premier tour (et perspectives du deuxième) pour le Front de Gauche et ses composantes.
Premier constat : ce n’est pas le FdG qui profite de la débâcle du PS. On voit d’ailleurs en comparant les chiffres généraux (même s’ils sont à prendre avec des pincettes vu les appellations et étiquetage parfois farfelus de certaines listes :
Par rapport à 2008, dans les villes de plus de 10.000 habitants :
- la droite parlementaire, comme on l’appelle (improprement puisque le FN a des députés...), passe de 45,5 à 45,9% soit une progression très minime
- La gauche passe de 48 Ã 41,4%
- L’extrême droite (FN, LdS pour l’essentiel) passe de 0,7 à 9,2%
- L’extrême gauche reste quantité négligeable, de 1,5 à 1,3%
Le grand vainqueur est bien le FN, qui sur le plan arithmétique gagne ce que perd la gauche, les autres camps restant à peu près neutres.
Le FdG (PCF en particulier) n’affiche pas globalement de progression sur les décombres du PS, il s’écroule tout autant dans les villes où il n’avait que peu (ou pas) de chances de l’emporter et échoue dans certaines tentatives de reconquête.
• Les pertes sèches du premier tour.
Les pertes du FdG au premier tour sont évidemment moins spectaculaires que celles du PS (il dirigeait beaucoup moins de grandes villes aussi)
- La seule ville importante (20.000 habitants) est Limeil-Brévannes (anciennement PG, où la division à gauche due aux errements du maire sortant a manifestement aidé la droite à l’emporter)
- Le PG perd également dès le premier tour Dammartin-en-Goële (77) et Longpont-sur-Orge (91)
- Le PCF perd quelques petites communes sans vraie importance stratégique (sauf parfois au sein d’une intercommunalité) : Cuges-les-Pins (13) qui, ) à la frontière du Var, subit les évolutions sociologiques de la Côte d’Azur, Lunery (18), Cosne d’Allier (03), Quiévrechain (59) dans un secteur où il détient beaucoup d’autres mairies.
- Il perd des bastions anciens plus problématiques : Pierre-Bénite (69) qui va participer (pas toute seule) à la reprise probable de la métropole lyonnaise par la droite ; Drap (06) ; Coursan (11) où le maire en place depuis 1977 a sans doute tenté le mandat de trop, Roussillon (38), embêtant pour la communauté de communes et les futures territoriales, Sainte-Tulle (04), pilier du canton de Manosque sud
- Il perd des villes plus habituées à faire la bascule mais qui ont des répercussions sur les élections départementales : Varennes-sur-Allier et Bourbon l’Archambault (03) dans un des deux départements dirigés par le PCF, ou représentaient son seul ancrage (même récent) dans un secteur géographique : Saint-Orens 31, seule ville détenue, depuis deux mandats, dans la banlieue toulousaine), Trignac (44, son dernier bastion), Portes-lès-Valence (26, seule ville d’importance dirigée dans la Drôme), et on ajoutera Brignoles, perdue puisque la liste se retire du deuxième tour
Rien de comparable à Niort, Chalon-sur-Saône, Clamart ou Poissy, mais tout est relatif…
• Les gains du premier tour
De ce côté pas grand-chose à se mettre sous la dent : le PCF a annoncé le gain de 12 communes au premier tour et c’est forcément vrai, mais j’avoue que je n’en ai identifié que trois :
- Magnanville (78), ville de 6.000 habitants de l’agglo de Mantes, prise au PS (qui a déjà perdu Rosny-sur-Seine et s’apprête à perdre Mantes-la-Ville, continuant sa perte de vitesse sur le Mantois)
- Mauvezin (32), chef-lieu de canton de 2.000 habitants pris lui aussi au PS par le nouveau conseiller général
- Violès (84), charmant village au milieu des vignes entre Bollène et les Dentelles de Montmirail, mais qui ne fait que 1.600 habitants
Pas de quoi pavoiser quand même…
• Première grosse satisfaction pour le FdG, la réélection au premier tour de 94 maires PCF et de quelques alliés :
On peut citer :
- Le carton plein dans les Hauts-de-Seine (Nanterre, Gennevilliers, Malakoff, Bagneux) alors qu’à l’inverse il n’est pas certain qu’il y ait encore un maire socialiste dans le département lundi prochain)
- La Courneuve, Tremblay (93), Limay, la Verrière (78), Champs-sur-Marne (77), Morsang, Grigny, Saulx-les-Chartreux, Briis-sous-Forges (91), Bonneuil (facile quand on est tout seul) , Gentilly, Valenton (94), Bezons, Pierrelaye, Fosses, Marly-la-Ville (95)
- Saint-Amand-les-Eaux, Raismes, Escautpont, Douchy, Marly … (59), Avion, St-Etienne-au-Mont, Rouvroy, Drocourt, Grenay…(62)
- Oissel, St-Etienne-du-Rouvray, Gonfreville, Harfleur , Le Tréport, Arques-la-Bataille, Grand-Couronne (76), Alizay, Gravigny, Saint-André de l’Eure (27) ; Dives-sur-mer, Giberville (14)
- Flixecourt, Camon (80), Montataire, Thourotte, Ribécourt (60)
- Etain (55), Mont-St-Martin, Saulnes, Piennes, Hussigny-Godbrange, Joeuf, Homécourt, Auboué, Jarny, Conflans (54), Sérémange (57)
- Ploufragan, Bégard, Trélivan (22)
- Allonnes (72) ; Saint-Pierre-des-Corps (37), Chalette-sur-Loing, Saran (45), Graçay, Foecy (18),
- Saint-Vallier (71) ; Varennes-Vauzelles (58) ; Damparis (39)
- Saint-Junien, Ambazac (87), St-Sulpice-le-Guéretois (23) ; Courpière (63) ; Désertines, Saint-Yorre (03)
- Tarnos (40), La Force, Boulazac, Trélissac (24) ; St-Benoit-de-Carmaux, le Garric (81)
- La Grand-Combe, Salindres, Rousson, Barjac (30), Vendres (34), Grabels (34, PG) ; Cabestany (66)
- Septèmes, la Penne-sur-Huveaune, le Rove (13) ; Entraigues-sur-la-Sorgue (84), Contes (06), la Cadière d’Azur (83), les Mées (04)
- La Ricamarie (42) ; Salaise-sur-Sanne, St-Maurice l’Exil (38)
• Autre vraie satisfaction pour le PCF, il remporte quasiment partout les primaires dans les villes qu’il dirigeait contre un PS qui cherchait à lui prendre la mairie. Seule exception : Vaulx-en-Velin (69), où le maire FG est devancé de 139 voix dans une ville qui détient par ailleurs la palme de l’abstention à plus de 62%).
Ailleurs le PCF / FdG reste devant :
- Cusset (03)
- Roissy-en-Brie (77)
- Malakoff (élection au 1er tour)
- Bagnolet (malgré la répartition de l’électorat sur deux listes totalisant 37%, et le jeu trouble de la FASE locale, la liste officielle FG arrive symboliquement devant le PS), Saint-Denis (et pourtant tous les ministres ont défilé pour soutenir Hanotin), Saint-Ouen , Tremblay (élection 1er tour) ; Villepinte (mais derrière la sortante) ; Villetaneuse en Seine-Saint-Denis.
- Chevilly-Larue, Choisy-le-Roi, Fontenay-sous-Bois, Ivry , Villejuif, Vitry (là c’était contre un ex PC passé chez EELV) dans le Val-de-Marne
- Gisors (27)
- Dieppe (76,devant l’alliance PS/droite de Le Vern et Hurel)
- Gardanne (13)
- Fontaine, St-Martin d’Hères (38)
- Vénissieux (69)
- Le Boucau (64, mais liste dvg en tête)
- Queven (56)
- Viry-Châtillon (91, plus grosse mairie PG)
Et il devance aussi le PS et/ou EELV dans les deux villes de Seine-Saint-Denis « volées » en 2008, Montreuil et Aubervilliers.
• Enfin troisième satisfaction pour le FdG, il reste en tête de la gauche dans des villes qui avaient été perdues par le PCF et actuellement dirigées par la droite :
- Douarnenez (29), qui fut la première municipalité communiste de France, comptant dans ses rangs la première femme élue alors que les femmes n’avaient pas le droit de vote
- Montargis (45) (mais droite élue au 1er tour) ; Saint-Dizier (52) (mais droite élue au 1er tour)
- Corbeil (on en a déjà parlé) et Etampes : (PCF + PG > PS mais droite élue au 1er tour) dans l’Essonne
- Drancy (mais droite élue au 1er tour), Noisy-le-Sec
- Nîmes (le total FG + PCF dissident fait 21% contre moins de 15% au PS), Alès (mais droite élue au 1er tour), Sète
- Calais
- Rive-de-Gier (mais droite élue au 1er tour)
Les listes PCF/FdG arrivent en tête de la gauche dans d’autres villes
- Commentry (03), qui fut, elle, la première municipalité socialiste de France
- Thiers (63)
- Vesoul (70), (mais droite élue au 1er tour) comme en 2008
- Valenciennes
- Cagnes-sur-mer (mais droite élue au 1er tour), Vence (scores ridicules pour le PC comme pour le PS)
- Manosque (04) (mais droite élue au 1er tour), Sorgues (mais droite élue au 1er tour) et on pourrait presque ajouter Digne (dg soutien FG contre PS officiel) en tordant beaucoup les statistiques.
- En revanche, si le PCF n’est distancé que symboliquement (de 196 voix alors qu’une liste LO en recueille 724, mais c’est une première) au Havre, il est assez nettement distancé à Montluçon (03), Bourges (18) ou Fleury-lès-Aubrais (45)
- Et surtout, dans des villes qu’il avait perdues et qui ensuite ont été reprises par le PS, il est nettement distancé, Argenteuil étant sans doute l’exemple le plus criant, mais c’est vrai aussi à Garges, toujours dans le Val d’Oise. Quant aux deux seules villes où en 2008 le PCF sortant avait été devancé par le PS (Denain et Pierrefitte), les sortants socialistes sont réélus facilement au premier tour.
Maintenant si on regarde les perspectives de second tour, on voit que pour le FdG, ces municipales pourraient être un demi succès ou un désastre.
• [b]Il peut nourrir quelques espoirs plus ou moins sérieux de l’emporter dans quelques villes :
- Montreuil (93) : d’une certaine manière c’est déjà fait puisque le Maire sera soit un PCF officiel soit un apparenté PCF
- Aubervilliers (93) : ce sera sans doute serré, Salvator résiste mieux au premier tour que l’on pouvait s’y attendre
- Corbeil (91) : jouable sur le papier vu que toutes les listes, hors celle du sortant, se présentaient en opposition au système Dassault / Bechter ; cela aurait sans doute été plus facile sans les échanges d’insultes d’abord, de bourre-pifs ensuite, entre les candidats de gauche
- Sète (34) : en quadrangulaire si Marchand se maintient, plus dur en triangulaire vu les faibles scores du PS et des Verts)
- Calais (62) : jouable mais incertain
- Thiers (63) : ce serait une première et ferait de la peine à Salvat, tout dépend des reports de voix mais comme le candidat PCF a semble-t-il refusé toute fusion de liste avec la liste arrivée 3ème, le sortant reste favori
- Romilly (10) : il faudrait un petit miracle
- Sartène (20) : triangulaire entre Bucchini et deux listes de droite. tout peut arriver, c'est la Corse...
On peut citer deux cas atypiques :
- L’Union (31) ou un ex PCF est en tête, mais faut-il le compter ?
- Les Ulis, où le FG rallie au deuxième tour une liste d’obédience chevènementiste, attelage qui a de fortes chances de prendre la ville au PS
• En revanche nombre de mairies apparaissent menacées :
- Auray (des membres du PCF sont présents sur la liste du sortant comme sur la liste du FG menée par un adjoint au maire) et Hennebont (situation un peu compliquée aussi au sein du PCF) dans le Morbihan ; si Auray a été prise par hasard et reposait entièrement sur la personnalité du maire, Hennebont est un fief plus ancien.
- Achères (78), ou le maire PCF est mis en ballotage incertain
- Viry-Châtillon (91) où ce sera très difficile de conserver la plus grande ville à direction PG
- Bobigny et Le Blanc-Mesnil (91) : si on s’y attendait pour la seconde au vu des scores de 2008, la perte de la ville préfecture serait un coup de tonnerre
- Choisy-le-Roi (94) : un ballotage délicat et inédit dans cette ville détenue par le PCF depuis des lustres
- Villejuif (94) où la réélection de al sortante aurait dû être assez facile mais où elle devra faire face à une alliance entre les deux candidats de droite officielle et ceux d’EELV et d’un PS dissident (la droite officieuse donc…)
- Villeneuve-Saint-Georges (94), où la droite pourrait récupérer la mairie en s’alliant avec le FN
- Aubagne (13) où cela risque d’être très dur pour le sortant, même en triangulaire avec le FN
on pourrait presque ajouter Bastia, où le PCF est assez fort dans l'équipe du PRG Zuccarelli
Bilan donc très mitigé et entièrement suspendu à quelques résultats du deuxième tour pour le PCF.
Pas mieux pour le PG, qui va retrouver certains maires sortants (Revol à Grabels) et dont certaines listes autonomes ou en alliance avec EELV ont réalisé des scores intéressants.
Grenoble en tête évidemment
En revanche, le score plus que moyen par rapport aux objectifs affichés à Paris, et le triste spectacle qu’ont donné ses chefs de file en quémandant des places sur les listes de 2ème tour d’Hidalgo dès dimanche soir en direct sur France TV tempèrent l’enthousiasme, comme la victoire au premier tour de la liste PS/PC à Sainte-Geneviève-des-Bois contre le n° 2 du parti F. Delapierre, seul élu de sa liste au CM, et la perte probable de sa vitrine Viry-Châtillon.
En perspective des Européennes, les composantes du FdG vont devoir se remonter les manches et adopter une position cohérente sous peine de désillusions.
Les alliances aux Municipales avec des membres de partis membres d’un gouvernement que l’on vomit, qui avec le PS qui avec EELV, sont une chose (avec les « bavures » médiatisées de Grenoble, où PCF et PG sont opposés même au deuxième tour, ou de Montreuil avec les alliances de second tour à la con) , mais sur les sujets nationaux et européens il va falloir faire des choix.
Que JL Mélenchon se félicite des scores réalisés par des listes d’alliance PG/SSLV aux Municipales, soit, mais aux Européennes, on l’imagine mal faire des mamours à un parti européiste, dont un des mentors et anciens chefs de file, le finalement très libéral et très atlantiste Cohn-Bendit, l’a injurié dans la presse il y a quelques semaines avec une hargne toute béhachélienne (et d’une rare médiocrité ; enfin rare, pas pour Cohn-Bendit..) suite à quelques propos pourtant modérés et de pur bon sens sur la situation ukrainienne.
Et surtout alors que le penseur du programme économique du PG, Jacques Généreux, appelle à durcir la campagne sur les thèmes de la sortie de l’Euro et de la « désobéissance européenne ».
Si ces sujets sont abandonnés au seul FN, il ne faudra pas s’étonner si celui-ci est plus proche des 30% que des 25…