de vudeloin » Lun 15 Oct 2012 10:14
Des subventions distribuées dans des conditions opaques ?
Encore une clause de style et un effet journalistique facile, cette affaire là puisque, sur le fond, il suffit (même si cela demande de sortir de la paresse intellectuelle créatrice de préjugés et de lieux communs) de se rendre sur n'importe quel site préfectoral pour savoir ce dont n'importe quelle commune de France dispose comme moyens financiers.
Et mon vieux compagnonnage avec les lois de finances, le droit des collectivités locales et un certain nombre de choses du même ordre m'ont familiarisé avec ce qu'est la dotation globale de fonctionnement, comme d'ailleurs les autres dotations et de quoi est faite la fiscalité directe locale.
Je conçois fort bien que tout le monde ne soit pas outillé de la même manière pour comprendre comment ça marche mais soit... Je dois dire, à ce propos, que si je comprends assez mal qu'en termes de DGF, un habitant n'ouvre pas droit à la même dotation en tout point du territoire, il importe de se souvenir que cette dotation, constituant 75 % des dotations budgétaires de l'Etat, a une histoire particulière.
Elle a notamment remplacé la taxe locale puis le versement représentatif de la taxe sur les salaires dans les années 70 au fur et à mesure de la montée en puissance de l'assujettissement des entreprises à la taxe sur la valeur ajoutée.
Le problème, pour certaines communes, est qu'elles avaient été plutôt indulgentes en matière de taxe locale puis de VRTS et que le décalage s'est naturellement retrouvé quand on a remplacé tout cela par la DGF.
Depuis, ceci dit, de l'eau a coulé sous les ponts, de la Seine à la Loire, au moins...
Et il est loin le temps où la DGF constituait un prélèvement sur les recettes de TVA (logique de par l'origine de la DGF) puisqu'elle fut ensuite fondée depuis sur un indice regroupant indice des prix à la consommation et croissance économique.
Et la réforme de la DGF version Sarkozy organise de fait la mise en déshérence de la dotation (normal, vu les objectifs de la réforme territoriale du même).
Tout cela pour pointer la question cruciale et même déterminante des réformes à mener, non sur le nombre éventuel des convives du "grand banquet du partage des concours budgétaires de l'Etat" mais sur le montant et l'importance de ce qui leur sera servi.
Comme sur la nécessaire justice sociale et fiscale qui doit animer tout gouvernement soucieux de réformer un tant soit peu les règles du jeu en la matière (comment prendre en compte la situation de revenus des habitants sans transformer la taxe d'habitation en poll tax, par exemple ?)
La volonté de faire disparaître un certain nombre de communes surnuméraires, au regard des standards européens, est une vieille idée des technocrates et des crânes d'oeuf de la place Beauvau comme de Berlaimont aujourd'hui.
L'intéressante situation de l'Espagne, qui a mené la chasse à son éclatement communal, ou celle de la Belgique, qui a procédé à nombre de regroupements, montrent que ces politiques n'ont aucunement renforcé la cohésion territoriale du pays ni réduit les tensions sociales de nations en grave crise économique !
Que reproche t on, en dernière instance, aux communes françaises ?
De générer l'existence de 5 à 600 000 élus locaux, dont les deux tiers sont d'ailleurs des bénévoles et dont la majorité de ceux qui restent ne peuvent décemment vivre uniquement de leurs indemnités ?
Personnellement, je trouve que nous devrions au contraire être particulièrement fiers d'avoir, au sein de la collectivité nationale, autant d'hommes et de femmes, de toutes conditions sociales (il n'y a pas que des agriculteurs en activité ou retraités qui soient élus maires de communes rurales), capables de s'impliquer dans la vie quotidienne de leur village, de leur commune, que celui ou celle ci comptât 100 ou 10 000 habitants.
D'ailleurs, j'ai cru remarquer que plus le nombre des habitants est faible, plus la participation électorale s'avère élevée lors de toute consultation (et pas seulement aux municipales).
Pour le coup, la face cachée des "bonnes intentions" de tous ceux qui veulent réduire le nombre de nos communes est à retrouver dans les perspectives ouvertes.
Et l'observation vaut aussi pour tous ceux qui souhaitent dissoudre le département dans la métropole ou une Région aux compétences renforcées (mais privée du moindre droit de lever l'impôt aujourd'hui).
C'est que, dans le cadre de la programmation des finances publiques à horizon 2017, on entend réduire le montant des concours budgétaires de l'Etat pour faire contribuer, in fine, les collectivités territoriales à l'effort de réduction du déficit public, dans un premier temps, et de la dette, dans un second temps.
Une réduction qui va d'ailleurs de pair avec une augmentation prévue, d'un montant strictement équivalent, de la contribution française au budget de l'Union européenne.
Il est évident que s'il y avait moins de monde autour de la table, on s'en rendrait moins compte...
Pour le reste, comme vous le savez sans doute, la distribution des subsides européens est fondée sur la plus absolue transparence, au point que la moitié du Pacte pour l'Emploi et la Croissance défini en juin dernier par le Conseil européen est financée par utilisation des crédits non ventilés (55 milliards d'euros).