de vudeloin » Jeu 11 Oct 2012 13:02
Je ne vais pas te donner de cours de droit parlementaire, manu, parce que, bon, cela nous emmènerait fort loin et que ce forum n'en est pas le lieu.
Mais tu peux penser ce que tu veux, dès lors que la disposition organique que constitue la loi organique de programmation et de gouvernance des finances publiques est présentée au Parlement, c'est précisément parce qu'elle correspond aux stipulations du Traité, et singulièrement de son fameux article 3 ci joint en copie
ARTICLE 3
1. Outre leurs obligations au titre du droit de l'Union européenne et sans préjudice de celles-ci,
les parties contractantes appliquent les règles énoncées au présent paragraphe:
a) la situation budgétaire des administrations publiques d'une partie contractante est en équilibre
ou en excédent;
b) la règle énoncée au point a) est considérée comme respectée si le solde structurel annuel des
administrations publiques correspond à l'objectif à moyen terme spécifique à chaque pays, tel
que défini dans le pacte de stabilité et de croissance révisé, avec une limite inférieure de
déficit structurel de 0,5 % du produit intérieur brut aux prix du marché. Les parties
contractantes veillent à assurer une convergence rapide vers leur objectif à moyen terme
respectif. Le calendrier de cette convergence sera proposé par la Commission européenne,
compte tenu des risques qui pèsent sur la soutenabilité des finances publiques de chaque pays.
Les progrès réalisés en direction de l'objectif à moyen terme et le respect de cet objectif font
l'objet d'une évaluation globale prenant pour référence le solde structurel et comprenant une
analyse des dépenses, déduction faite des mesures discrétionnaires en matière de recettes,
conformément au pacte de stabilité et de croissance révisé;
c) les parties contractantes ne peuvent s'écarter temporairement de leur objectif respectif Ã
moyen terme ou de la trajectoire d'ajustement propre à permettre sa réalisation qu'en cas de
circonstances exceptionnelles, telles que définies au paragraphe 3, point b);
d) lorsque le rapport entre la dette publique et le produit intérieur brut aux prix du marché est
sensiblement inférieur à 60 % et lorsque les risques pour la soutenabililité à long terme des
finances publiques sont faibles, la limite inférieure de l'objectif à moyen terme telle que
définie au point b) peut être relevée pour atteindre un déficit structurel d'au maximum 1,0 %
du produit intérieur brut aux prix du marché;
e) un mécanisme de correction est déclenché automatiquement si des écarts importants sont
constatés par rapport à l'objectif à moyen terme ou à la trajectoire d'ajustement propre Ã
permettre sa réalisation. Ce mécanisme comporte l'obligation pour la partie contractante
concernée de mettre en oeuvre des mesures visant à corriger ces écarts sur une
période déterminée.
2. Les règles énoncées au paragraphe 1 prennent effet dans le droit national des parties
contractantes au plus tard un an après l'entrée en vigueur du présent traité, au moyen de dispositions
contraignantes et permanentes, de préférence constitutionnelles, ou dont le plein respect et la stricte
observance tout au long des processus budgétaires nationaux sont garantis de quelque autre façon.
Les parties contractantes mettent en place, au niveau national, le mécanisme de correction visé au
paragraphe 1, point e), sur la base de principes communs proposés par la Commission européenne
et concernant en particulier la nature, l'ampleur et le calendrier des mesures correctives à mettre en
oeuvre, y compris en cas de circonstances exceptionnelles, ainsi que le rôle et l'indépendance des
institutions chargées, au niveau national, de vérifier le respect des règles énoncées au paragraphe 1.
Ce mécanisme de correction respecte pleinement les prérogatives des parlements nationaux.
3. Aux fins du présent article, les définitions énoncées à l'article 2 du protocole (n ° 12) sur la
procédure concernant les déficits excessifs, annexé aux traités de l'Union européenne,
sont applicables.
Par ailleurs, les définitions suivantes sont également applicables aux fins du présent article:
a) le "solde structurel annuel des administrations publiques" signifie le solde annuel corrigé des
variations conjoncturelles, déduction faite des mesures ponctuelles et temporaires; (Note : bon courage ! parce que, sur le papier, c'est clair, mais dans les faits, beaucoup plus complexe)
b) les "circonstances exceptionnelles" font référence à des faits inhabituels indépendants de la
volonté de la partie contractante concernée et ayant des effets sensibles sur la situation
financière des administrations publiques ou à des périodes de grave récession économique
telles que visées dans le pacte de stabilité et de croissance révisé, pour autant que l'écart
temporaire de la partie contractante concernée ne mette pas en péril sa soutenabililité
budgétaire à moyen terme.
(fin de citation)
J'ai sciemment mis en gras deux éléments dans le paragraphe 2 pour rappeler que le premier élément fait référence à la loi organique créant la "règle d'or" (c'est sur la base de cette rédaction du TSCG que le Conseil constitutionnel a estimé, je le rappelle, que le vote d'une telle loi organique suffisait pour introduire ce texte en droit français et que l'on pouvait se dispenser d'une consultation référendaire, notamment.)
Et pour indiquer que le second élément, moins connu et qui nécessite expertise (je sais, manu, tout le monde n'est pas mordu comme je peux l'être à la lecture attentive des dispositions législatives), est la raison d'être de la création d'une nouvelle autorité administrative indépendante, à savoir le Haut Conseil des finances publiques.
Le problème est que cette autorité sera constituée de huit personnes, dont quatre conseillers de la Cour des Comptes et quatre personnalités qualifiées choisies, respectivement, par les Présidents de l'Assemblée, du Sénat, de la Commission des Finances de l'Assemblée et de la commission des Finances du Sénat.
Ce collègue de docteurs de la foi budgétaire sera, en quelque sorte, pour le compte de la Commission Européenne, le surveillant général de la pratique budgétaire de l'Etat, mais aussi, comme l'indique l'article 3 du Traité, des autres ensembles d'administration publique que constituent la Sécurité Sociale et les collectivités locales et peut être au delà , d'ailleurs.
Je pense notamment aux établissements publics dont la dette est souvent consolidée avec la dette publique de l'Etat, de la Sécurité sociale et des collectivités au sein de la dette publique française version Maastricht.
Pour donner deux exemples concrets, l'Université de Toulon et du Var et Pôle Emploi peuvent avoir une situation budgétaire et d'endettement dont le contrôle sera aussi du ressort du Haut Conseil, comme d'ailleurs du TSCG...
On peut, par exemple, concevoir, notamment en vertu de l'article 4 de la loi organique, que les sages du Haut Conseil recommandent une augmentation significative des droits d'inscription en fac' si les comptes de nos Universités, devenues autonomes, tombent dans le rouge ou qu'ils appellent Pôle Emploi et les partenaires sociaux à régler la dette de l'établissement sous forme d'une minoration des prestations d'assurance chômage...
Mais ce ne sont que des exemples du pouvoir dont vont être investis les membres du Haut Conseil, qui seront, en quelque sorte, dépositaires du pouvoir de contrôle sur l'utilisation des fonds publics dévolu normalement au Parlement et à ses représentants.
"No taxation without representation" disaient pourtant les révolutionnaires américains en 1776...