Un nul est un bulletin ne respectant pas les règles, et donc n'a pas à être compté comme exprimé, mais comme erreur. Le blanc est une expression, cela veut dire quelque chose, généralement qu'on ne se reconnait dans aucun des candidats et qu'on ne souhaite pas apporter son bulletin à l'un d'eux...
Le bulletin dit nul est une expression au même titre que le bulletin blanc : lorsqu'un électeur prend la peine de rayer un nom sur un bulletin, ou de le déchirer, ou de commenter la personnalité de tel ou tel candidat, ou encore de laisser l'enveloppe vide, c'est généralement délibéré et pas du tout fortuit. Connaissez-vous beaucoup de gens dont le stylo, dans l'isoloir, glisse inopinément sur le bulletin et y forme spontanément des lettres composant des mots que l'on trouve dans le dictionnaire ?
Distinguer entre blancs et nuls en contrepartie de la seule reconnaissance des premiers, c'est dire à l'électeur : je veux bien admettre que tu ne te reconnais dans aucun des candidats, ou que tu refuses de voter pour celui qui devrait en principe avoir ta faveur, mais à une seule condition, c'est que tu ne dises rien des motifs de ton insatisfaction ; la moindre opinion personnelle que tu aurais l'outrecuidance d'exprimer est bonne pour la poubelle. Or il n'est pas inutile que les citoyens scrutateurs (et les militants politiques qui surveillent le dépouillement, sans même parler des observateurs professionnels ou simplement curieux) sachent, par exemple, que la multiplication des bulletins "nuls" est liée au rejet de telle ou telle personnalité. Pourquoi museler et corseter le citoyen au moment même où l'on affecte de reconnaître davantage sa libre expression ?