Les élections législatives de 2013 en Allemagne

[Pullo]

Le renversement d'alliance que Merkel prépare me fait penser à celui qui avait abouti en 1982 au remplacement d'Helmut Schmidt par Helmut Kohl. Et le FDP jouait un rôle important dans l'affaire, puisqu'il a lâché le SPD pour s'allier à la CDU, à cause de désaccords sur la politique économique. D'abord en quittant le gouvernement (où ils avaient 4 ministres sur 16, sans compter le chancelier), ensuite en votant une motion de censure constructive contre Schmidt. La différence entre 1982 et aujourd'hui, c'est qu'aujourd'hui, c'est le chef du gouvernement qui prend l'initiative de la rupture.

Reste à savoir comment Merkel va opérer ce renversement d'alliances. En révoquant les ministres FDP (5 sur 15, sans compter la chancelière) pour les remplacer par des sociaux-démocrates ? En posant la question de confiance au Bundestag pour avoir les voix du SPD ? En se faisant refuser la confiance pour provoquer des législatives anticipées ?

[Pullo]

Les intentions prêtées à Angela Merkel de mettre fin à la coalition actuelle, au profit d'une grande coalition avec le SPD (voir ici) peuvent peut-être expliquer ce qui ressemble à un léger retournement de situation en faveur du FDP. A confirmer dans les prochaines enquêtes et surtout lors des votes régionaux à venir.
Lorsque c'est nécessaire, les électeurs conservateurs ont souvent tendance (et en particulier via le système de la deuxième voix) à favoriser les libéraux, partenaire vers lequel va leur préférence pour former une collation avec la CDU.

En effet, les rumeurs de renversement d'alliance semblent redonner un peu d'air aux libéraux, y compris au niveau national, si l'on en croit le dernier sondage Forsa du 25 avril publié sur spiegel.de :

CDU : 35%
SPD : 24
Piraten : 13%
Die Grünen : 12%
Die Linke : 7%
FDP : 5%

Le FDP retrouve des chances de rester au Bundestag. La CDU et le SPD sont à un niveau légèrement supérieur à celui de 2009 (33,8% et 23%). Die Linke est en net retrait par rapport aux 11,9% recueillis en 2009, et les Pirates dépassent les Verts. Reste à savoir si les Pirates vont vraiment entrer au Bundestag (il peut se passer plein de choses en un an) et, dans le cas où ils auraient des élus, s'ils vont évoluer de la même manière que les Verts. C'est-à-dire en virant au centre et en devenant amis avec les grandes entreprises...

[Pullo]

Der Spiegel a publié un article (traduit en français par Courrier International) sur le positionnement électoral des Pirates :

Certes, la crédibilité et la transparence sont des éléments importants pour rendre la politique plus compréhensible. Les autres partis commencent d'ailleurs à le comprendre et appliquent la recette des Pirates en se mettant à leur tour à ouvrir le dialogue. Reste que le principe de la transparence ne saurait se substituer à celui de la responsabilité qui incombe à chaque élu. Près de 200 000 électeurs de Berlin [en septembre] et de la Sarre [en mars] ont donné aux Pirates une responsabilité politique. De toute évidence, tous ne savent pas la manier.

Hartmut Semken et Martin Delius, les deux dirigeants berlinois [respectivement à la tête de la fédération régionale et du groupe parlementaire] qui ont, dans des contextes différents, usé des comparaisons avec le parti nazi, ont tous les deux fait le choix de la transparence absolue : Delius a posté son commentaire sur Twitter et s'est expliqué sur son blog, il a fait face aux journalistes et a retiré sa candidature à l'exécutif national. Semken a également présenté ses excuses et émis la possibilité de démissionner de ses fonctions.

Les maladresses des cadres berlinois ont eu des effets dans les sondages. Selon un sondage publié le 29 avril dans l'édition dominicale de Bild, les Pirates sont à nouveau derrière les Verts :
CDU : 35%
SPD : 26
Die Grünen : 13%
Piraten : 11%
Die Linke : 7%
FDP : 5%

[ploumploum]

On constatera, Pullo, que le positionnement de Merkel sur la croissance au sein de l'UE et sur un Smic allemand, semble permettre au FDP de redresser légèrement la situation dans les sondages. Il est donné de nouveau à 5 %.

[Pullo]

Je reviens à nouveau sur le positionnement et l'électorat du Parti Pirate, sur lequel Libération a publié un article quelques jours avant les régionales de Rhénanie du Nord Westphalie :

Deux tiers des électeurs ont choisi les pirates par rejet de la classe politique traditionnelle. Un tiers seulement approuve leur programme. «Ils rassemblent un vote protestataire et populiste, insiste un politologue qui ne les aime guère. Leur discours contre les partis au nom de la démocratie directe sur Internet est naïf, voire dangereux. Ils rejettent toute idéologie, se disent profondément pragmatiques et sont persuadés de détenir la vérité.»

Electeur type des pirates, Roger, 24 ans, est inactif. Désintéressé par toute idéologie, il s’abstenait de voter jusqu’en septembre. Bidouilleur informatique, Roger est DJ à ses heures et vit des minima sociaux. Taciturne, son visage ne s’anime que lorsque la conversation s’engage sur la confidentialité des données informatiques. Roger a rejoint les pirates en 2009, lorsque la ministre de la Famille a décidé de renforcer le contrôle étatique sur Internet pour lutter contre la diffusion de sites à caractère pédophile. En quelques mois, les pirates allemands sont alors passés de 7 000 à 29 000 membres.

«Le Parti pirate, dénonce le quotidien Tagesspiegel, incarne cette société internet dans laquelle chacun s’improvise expert, trouvant sur le Net une recette de cuisine, une réponse à ses maladies, à ses questions sur les impôts plutôt que de consulter un spécialiste…» «Ils veulent faire autrement que les autres partis, mais ils devront s’adapter, estime le politologue Alexander Hensel, de l’université de Göttingen. Jusqu’à présent, les pirates ont curieusement franchi sans dommage un certain nombre d’obstacles, pourtant généralement éliminatoires en Allemagne, comme les accusations de sexisme, ou de mollesse face à la présence de moutons noirs issus de l’extrême droite dans leurs rangs. Mais la pression est forte : il leur faudra respecter le jeu politique et médiatique.»

Ajoutons que les Pirates ne crachent pas sur les coalitions à géométrie variable, en fonction des thèmes abordés : avec Die Linke sur les minima sociaux, avec le FDP sur le refus des subventions à l’industrie. Bon courage aux électeurs, qui n'auront pas tous la capacité de voir la cohérence entre ces deux positions. Et bon courage aux militants pour expliquer ça aux électeurs...

[ploumploum]

La lourde défaite de la CDU en Rhénanie a quelques répercussions sur les sondages. Des 36-38 % crédités avant le scrutin, le parti de la chancelière passe à 33-35 %
Le SPD remonte à 30 %
Grunen tourne autour de 13 %
Piraten tourne autour de 9-11 %
FDP : 4-5 %
Die Linke : 5 %

Le FDP remonte lentement tandis que Die Linke poursuit sa baisse.

Et si finalement, c'est Die Linke qui disparait et non le FDP ?

[manudu83]

j'ai tendance à penser que les deux vont passer la barre des 5% au final mais de peu.
Le FDP semble reprendre du poil de la bête à mesure que la CDU infléchit sa politique économique (ou du moins son attitude), DieLinke récupera quelques votes utiles venus des piraten.

[Pullo]

Gerhard Schröder, alias "le camarade des patrons", alias "l'employé de Gazprom", a refait parler de lui dernièrement, en disant que les sociaux-démocrates ne devaient pas "copier" Hollande pour gagner en 2013 :
http://www.lemonde.fr/europe/article/20 ... _3214.html

Quand on se souvient des conditions dans lesquelles il a quitté le pouvoir en 2005, les cadres du SPD devraient réfléchir à deux fois avant de suivre ses conseils...

[ploumploum]

Gerhard Schröder, alias "le camarade des patrons", alias "l'employé de Gazprom", a refait parler de lui dernièrement, en disant que les sociaux-démocrates ne devaient pas "copier" Hollande pour gagner en 2013 :
http://www.lemonde.fr/europe/article/20 ... _3214.html

Quand on se souvient des conditions dans lesquelles il a quitté le pouvoir en 2005, les cadres du SPD devraient réfléchir à deux fois avant de suivre ses conseils...

C'est vrai que l'Agenda 2010 a été un succès éclatant (c'est de l'ironie)
Le SPD a une chance de gagner s'il retourne à gauche. Le virage à droite opéré par l'Agenda 2010 et les hésitations sur un retour vers la gauche explique, en grande partie, lé désastre de 2009.

(Les sondages indiquent entre 27 et 30 pour le SPD et 30-35 pour la CDU. Grunen tourne autour de 13-14 %. Le FDP franchit régulièrement la barre des 5 % (5-6 %), comme Die Linke.
Piraten : 7-12 %)

[Pullo]

Sondage réalisé entre le 21 et le 23 août dernier pour Der Spiegel :
CDU : 37%
SPD : 29%
Die Grünen : 12%
Piraten : 6%
Die Linke : 6%
FDP : 5%

Les Pirates dévissent fortement par rapport aux sondages du printemps, les Verts et Die Linke se maintiennent plus ou moins, la CDU et le SPD progressent légèrement, et l'avenir du FDP au Bundestag est toujours incertain. Et la situation délicate du parti libéral n'est pas étrangère aux tensions dans la coalition, aggravées par les critiques contre Merkel, jugée carriériste et trop centriste, à l'intérieur de la CDU-CSU.

Et pendant ce temps, onze fondations allemandes ont lancé une campagne de soutien à l'idée européenne. Chacun ses priorités...