La question peut paraître saugrenue, et même pratiquement stupéfiante, mais, en tout cas, c’est ainsi que la revue britannique The Economist a placé notre pays dans le cadre de la publication de son indice annuel de la démocratie.
Avant de commenter quoique ce soit, revenons quelques instants sur la méthodologie utilisée par la revue pour définir l’indice de démocratie de chaque pays.
Le principe de l’indice et du classement en découlant est d’attribuer une note à chaque pays, à raison des critères suivants : processus électoral et pluralisme, respect et réalité des libertés civiles, fonctionnement du Gouvernement, participation politique et culture politique.
La transparence et la liberté du suffrage participent évidemment des conditions incontournables pour qualifier un pays de démocratie, de même que la liberté d’association, celle d’organiser un parti politique, la liberté d’opinion et de conscience, notamment en matière religieuse, la liberté d’expression ou encore la transparence et l’équité de la justice.
Chacun des cinq critères indiqués plus haut est classé selon une échelle de valeur de 0 à 10, la note la plus élevée étant le signe de la plus grande liberté.
Et la moyenne des cinq critères donne une note générale à chaque pays qui permet la classification de tous.
Si un pays est noté entre 8 et 10, il est une démocratie.
S’il est noté en 6 et 8, il rendre dans la catégorie des démocraties imparfaites et devient un régime hybride si sa note est comprise entre 4 et 6.
Sous le 4, nous sommes face à un régime autoritaire.
Pour justifier la notation, on peut donc penser que l’indépendance rédactionnelle des journaux de la presse écrite ou des journalistes de l’audiovisuel constitue un bon élément du point de vue de la liberté d’expression ou de la culture et de la participation politiques dans le pays.
Tandis que la corruption galopante des élus, à tout niveau de responsabilités, peut constituer un facteur mettant en question la qualité de la « gouvernance «.
En 2008, la France se positionnait en 24e position dans le classement de The Economist, avec une note globale de 8,07 sur 10, notre pays souffrant d’un mauvais indice de participation politique ( la croissance de l’abstention entre autres ) et d’un fonctionnement du Gouvernement loin d’être exempt de reproches ( noté 7,5 sur 10 ).
Parmi les meilleurs élèves de la classe mondiale, si l’on peut dire, figuraient les pays scandinaves ( Suède 1er, Norvège 2e, Islande 3e, Danemark 5e et Finlande 6e ), mais aussi ceux du Bénélux ( Pays Bas 4e, Luxembourg 9e, Belgique 20e ), les colonies britanniques de luxe ( Nouvelle Zélande 7e, Australie 10e, Canada 11e ), les Etats-Unis, le Japon, l’Allemagne, l’Autriche ou encore Malte et l’Espagne.
A noter que nous n’arrivions qu’en 15e position des pays de l’Union Européenne, devancée par les pays cités mais aussi par la Grèce, le Royaume Uni ou la Tchéquie et l’Eire.
Nous devancions le Portugal, classé 25e, l’Italie (29eet première des démocraties imparfaites ), la Slovénie ( 30e), Chypre (36e), l’Estonie (37e), la Hongrie (40e), la Lituanie (42e), la Slovaquie (44e), la Pologne (45e), la Lettonie (46e), la Roumanie (50e) et la Bulgarie (52e).
Mais nous étions aussi devancés par un pays comme l’Uruguay, celui-ci ayant accompli des efforts particuliers en matière de lutte contre la corruption des élus.
En 2010, la notation de la France s’est trouvée dégradée, et avec une moyenne générale de 7,77 sur 10, notre pays se positionne désormais en 31e position du classement de The Economist.
Nous sommes donc entrés dans la liste des démocraties imparfaites, puisque notre note est inférieure à 8 et nous nous trouvons désormais débordés par des pays comme la Corée du Sud, l’Ile Maurice, le Costa Rica, la Grèce, l’Italie ou même la République du Cap Vert et l’Afrique du Sud !
Les raisons de la dégradation de la note française résident, selon la revue britannique, dans le mode de fonctionnement du Gouvernement, notamment pour la pression exercée sur les media audiovisuels et même une partie de la presse écrite, sur la participation citoyenne ( problème de l’abstention et de la défiance croissante des résidents à l’égard des institutions ), et sur les libertés civiles et publiques.
Je ne sais si les journalistes de la revue britannique pensent aux questions soulevées par l’exercice de la religion musulmane ( affaire du voile par exemple ), mais on ne peut s’empêcher de penser que les lois sur la sécurité et la délinquance, certains textes relatifs à l’immigration ou encore les mesures prises à l’encontre des Roms participent de la dégradation de la note française.
La dégradation de la moyenne sur le mode de gouvernement intègre t elle le rôle de VRP des grands groupes industriels du pays assumé de plus en plus par le Président de la République ou les Ministres en place ?
Ou encore les retards persistants sur le respect de l’indépendance de la justice ou les procédures de garde à vue ?
A moins que ces questions ne soient plus prises en compte dans le champ des libertés civiles…
Je n’ai pas de jugement particulier à porter sur ce type de classement, sinon qu’il me semble devoir éveiller notre attention au moins sur une certaine image internationale de notre pays, de ses dirigeants, de sa vie politique qui n’est pas aussi positive que cela…
Etant entendu que le consensus n’est pas forcément évident sur ce qui serait la démocratie pure et parfaite, je vous laisse libre juge de commenter ces éléments utiles pour notre réflexion commune sur le devenir de notre société démocratique.
PS Le classement complet est évidemment accessible sur une célèbre encyclopédie en ligne que chacun connaît bien ici mais aussi sur le site de The Economist à l’adresse suivante
http://graphics.eiu.com/PDF/Democracy_I ... 10_web.pdf