de vudeloin » Ven 23 Sep 2011 11:54
Comme j’ai lu quelques maladresses dans les messages précédents, quelques éléments de rappel.
Pourquoi l’Allemagne a-t-elle appelé de ses vœux la monnaie unique que nous connaissons et qui s’appelle l’euro, monnaie au demeurant restant non adoptée par des pays comme la Grande Bretagne, le Danemark et la Suède (ces deux derniers étant plutôt dans les « clous « des critères de l’Union Economique et Monétaire malgré ou à cause de leur niveau élevé de dépenses publiques) qui ont d’autres parcours et d’autres choix.
Pour les Béotiens, je rappelle que les pays scandinaves ont établi au XIXe siècle une Union Economique et Monétaire entre ce qui est aujourd’hui l’Islande ( et était territoire danois ), le Danemark, la Suède et la Norvège, puisque le mot « couronne « est générique des monnaies de ces pays.
Et que cette union monétaire est maintenue, puisque la parité de chacune des devises concernées évolue en parallèle.
Autre remarque : la Finlande n’a pas de couronne, mais avait un marc ( le markka ) qui trouve son origine dans une réalité historique simple qui veut que, jusqu’en 1912, le pays était sous domination russe…
Pourquoi l’euro, maintenant et pourquoi cette insistance de l’Allemagne à le défendre ?
Tout simplement parce que le pays, nonobstant le paiement des dommages de guerre ( la réunification a été facturée aux autres, de manière générale ), a fait l’expérience de l’hyper inflation pendant certaines périodes de crise bien précises ( années 20 et surtout années 30 après la faillite de la Kreditanstalt de Vienne, premier écho de la crise financière d’octobre 29 aux USA ) dont on sait quelles conséquences elles ont eu.
Et que, l’abandon du deutschmark et des pfennigen pour l’euro et ses centimes nécessitait, aux yeux du gouvernement fédéral et du « peuple allemand « en général, que l’outil monétaire de remplacement soit aussi solide que ce qu’était devenu le DM.
Pour bien rassurer les Allemands, je vous précise tout de même que, quelque part, on a fixé la parité de l’euro par référence au DM, puisqu’on a décidé, qu’en gros, on aurait un euro pour 2 DM.
Quand je suis né ou dans ces années là , le DM valait 1,25 franc.
A la création de l’euro, il était souvent entre 3,20 et 3,40 francs.
On faisait mieux passer la pilule que si on avait été en Italie où les millionnaires en lires allaient souffrir, vu que l’euro avait une parité d’un euro pour pas loin de 2 000 lires !
Le Gouvernement italien, à l’époque, avait recruté des psychologues pour prendre en charge les Italiens que ce brusque phénomène aurait perturbés gravement…
Bon, alors l’euro est donc la monnaie principale de l’euroland, c'est-à -dire, pour aller vite, de la zone économique d’influence de l’Allemagne et notamment de là où elle peut, en tirant parti de l’implantation de son industrie à l’Est de l’Europe, écouler sans risquer les effets des dévaluations compétitives ses productions.
On notera d’ailleurs que l’approche des Allemands a été très systémique dans la construction européenne des années 80 et 90.
Ils ont voulu l’acte unique en 1986 et ils l’ont eu.
Ils ont voulu Maastricht et ses « critères de convergence « et ils l’ont eu !
Ils ont désiré ardemment l’indépendance de la Banque Centrale Européenne et la France s’est empressée de leur emboîter le pas, alors que le siège de la Banque était établi à Francfort, faisant d’elle une sorte de Buba (Bundesbank) renforcée, et dont la mission a été clairement fixée par les textes.
La BCE, c’est fait pour lutter contre l’inflation.
Résultat : la Banque de France n’est plus qu’une sorte de succursale de la BCE et le Gouvernement français, comme celui des autres pays de l’Euroland, a dévolu son pouvoir monétaire entre les mains du Président de l’organisme.
Dont je rappelle qu’il n’est élu par personne, en qualité de citoyen dans l’Union…
Et ils ont voulu l’élargissement de l’Europe à l’Est, au besoin en forçant les portes du destin comme nous avons pu le voir en ex Yougoslavie (l’Allemagne s’est empressée de reconnaître l’indépendance de la Slovénie et de la Croatie, provoquant l’implosion de la république fédérale) ou en Tchécoslovaquie, où elle a réussi à ce que les Tchèques et les Slovaques se séparent.
Et ce, pour une raison simple : c’est que la Slovaquie n’est pas la partie noble de l’ancien pays d’Europe centrale et qu’il était important que les Allemands puissent faire main basse sur l’appareil de production et la main d’œuvre qualifiée résidant entre Brno et Prague…
Si les PECO ont, pour certains, gardé leur monnaie d’origine, ils ont cependant, avant la naissance de l’euro, aligné l’évolution de leurs devises nationales sur celle du mark et cela continue d’ailleurs, maintenant que l’euro est en place.
Après, cela va tellement mal en Hongrie ou en Bulgarie, ces temps derniers, que tout cela craque parfois.
Revenons en à notre euro.
Est-ce la fin de l’euro, sous les coups répétés de la crise financière, celle des dettes souveraines servant de réplique au bordel bancaire de 2008 ?
Oui, si l’on considère que ce qui a échoué est précisément cette conception de la monnaie unique comme pare feu contre l’inflation.
Toutes les politiques budgétaires des Etats de l’Euroland, depuis dix ans, ont consisté, autant que possible, à se conformer aux impératifs de la parité de la monnaie en évitant les déficits publics ( on a vu que cela avait échoué ) et en comprimant autant que possible dépenses publiques et coût du travail.
Les poursuivre, au travers de plans d’austérité, consisterait en fait à fragiliser encore plus une parité monétaire qui apparaît de plus en plus comme ce qu’elle est, c'est-à -dire un étouffoir de croissance.
Alors, il est temps que cela change, et notamment que la monnaie commune devienne, enfin, un outil au service de l’économie.
Ce qui fait bouger l’économie et la société, ce sont les investisseurs, les créateurs, les travailleurs, pas les rentiers, les seuls à trouver leur compte dans l’apparente solidité monétaire de l’euro.