alamo a écrit:Et que malheureusement l'inculture juridique est grandissante, et que beaucoup de gens confondent aujourd'hui les médias ou les réseaux sociaux avec un tribunal.
Dans un reportage diffusé il y a plusieurs mois consacré à Polanski, on voyait une poignée de porteuses de pancartes bas du front tentant d'interdire aux gens d'entrer dans un cinéma où était projeté le film J'accuse.
Pancartes comme slogans accusaient Polanski d'avoir violé douze femmes (voire fillettes), "infos" piochées pour l'essentiel sur un site de fake-news américain et les accusations grotesques de Charlotte Lewis. Quand le journaliste leur a fait remarquer qu'en dehors de la fameuse affaire Geimer, jugée depuis longtemps et dont la victime défend aujourd'hui le cinéaste, il n'y avait aucune autre pousuite judiciaire, et a osé parlé de présomption d'innocence, deux des filles ont répndu en substance (mais ce sont à peu près les mots) : "on s'en fout de la présomption d'innocence et d'ailleurs on s'en fout de la Justice, les médias l'ont condamné, donc il est coupable"
Je sens qu'on va encore méchamment dériver vers du hors-sujet (et je note que c'est encore lié au même contributeur :) ), mais il me semble Alamo que votre paragraphe sur les affaires Polanski est en effet un exemple très net de ce que vous dénoncez vous même : l'influence néfaste du tribunal médiatique et des réseaux sociaux, dans les deux sens des dossiers en l’occurrence.
Dire par exemple que Samantha Geimer "défend" son agresseur, c'est là un raccourci très choquant et qui se méprend gravement sur les propos de cette personne (dont j'ai lu le livre qu'elle a écrit). Elle appelle désormais au droit à l'oubli, critique abondamment que beaucoup de gens utilisent son nom et son viol (car oui, dans son cas il n'y a aucun doute : Polanski l'a bien violée lorsqu'elle était mineure, il a été condamné pour cela, et a fui la justice de son pays pour ne jamais y purger une quelconque peine relative à ce crime) comme un porte-drapeau d'une cause et d'autres dossiers, dans lesquels elle ne veut rien avoir à faire. Mais en dehors de ça, elle confirme sans relâche que Polanski l'a bien violée et que cela reste un traumatisme, et qu'elle aurait largement préféré que ce dernier subisse le châtiment qu'il méritait suite à ce crime (elle pointe par contre avec justesse les grosses carences du système juridique dans son dossier ayant abouti à un fiasco juridico-médiatique), mais que plus de 40 ans après les faits elle essaye de tourner la page, et qu'elle veut qu'on lui foute la paix. Et que dans son processus de reconstruction (personnelle, et elle souligne bien que chaque victime de viol est différente dans sa manière de percevoir et gérer ce traumatisme intime) à elle elle a en effet décidé de pardonner Polanski (mais elle précise aussi qu'elle aurait largement préféré que ce dernier purge une peine aussi, mais que désormais cela n'a plus de sens). Voir dans ces propos une "défense" de son bourreau, ça me parait très excessif, et être pour le coup aussi criticable que les propos des militantes féministes que vous rapportez ici, et qui sont en effet assez lamentables. Bref, Samantha Geimer critique l'usage que certains font de son viol dans le tribunal médiatique c'est très clair, mais dire qu'elle livre une "défense" de Polanski, non (pour elle cela reste un homme puissant ayant profité de ce statut, pour la violer dans un premier temps, et pour s'enfuir dans un second temps). Je me permets de remettre une interview de cette dernière très intéressante, et qui met bien en lumière tout un tas de dysfonctionnements dans l'affaire Polanski, et très intéressante justement dans ce qu'elle dit sur tout un tas de choses (notamment le fait que chaque victime de viol est différente et qu'il ne faut pas en faire par nature des porte-drapeaux ne les ramenant qu'à cette seule condition). Maintenant cela reste l'avis personnel de madame Geimer, éminemment respectable, mais cela ne signifie pas non plus pour autant que toutes les victimes de viol doivent ainsi percevoir leur viol et leur violeur (des victimes de crimes capables de pardonner leur agresseur, cela reste l'exception plus que la norme).
Mais je pense Alamo (pour avoir encore une fois lu le livre écrit par la personne en question) que madame Geimer trouverait votre manière de faire d'elle une porte-drapeau de la lutte contre les dérives de certaines féministes aussi problématique que ceux qui font d'elle une porte-drapeau de toutes les victimes de viol.
http://www.slate.fr/story/187944/interv ... -sexuellesEt pour en revenir à Roussel, je suis le premier à dire qu'il n'y a en effet pas de lien entre ce dont Mediapart parle dans son cas et dans l'affaire Fillon. Mais essayer d'établir là dedans un parallèle avec Polanski, ça me parait encore moins lié et connecté. Et puis si vraiment vous voulez trouver des porte-drapeaux de véritables victimes du tribunal médiatique il y aurait des noms plus judicieux que celui de Polanski (Baudis, beaucoup des accusés d'Outreau...). Même ci cela ne me paraîtrait pas beaucoup plus judicieux de dresser des parallèles entre eux et Roussel, du moins à l'heure actuelle.
Ensuite, dire qu'il n'y aurait absolument rien dans l'article de Médiapart, à minima cela me parait là aussi un peu un raccourci hâtif. Si il devait émerger que Roussel travaillait plus comme employé du PCF que comme attaché parlementaire d'un député PCF, il pourrait y avoir un problème juridique réel. Pour l'heure, Médiapart n'a pas apporté d'éléments faisant la preuve de cette accusation, Roussel n'a pas apporté la preuve du contraire, mais ce n'est pas à un journal ni à un accusé de faire tout ça, c'est à la justice de le faire, si celle ci considère qu'il y a bien des éléments à saisir. Pour le moment ce n'est pas le cas, dans l'intervalle Roussel est innocent et doit être considéré comme tel jusqu'à jugement du contraire par un tribunal compétent (tout comme Fillon devait l'être, même après sa mise en examen).