de vudeloin » Mer 25 Mai 2011 18:33
Alors, évidemment, parler de la vie politique des Bouches du Rhône amène, dans les années 30 et au moment du Front Populaire en particulier à parler de moments plutôt agités au plan local.
En 1932, le département compte 11 députés répartis entre 8 provenant de l’arrondissement de Marseille dont 5 élus d’une partie de la cité phocéenne et 3 ayant des circonscriptions s’étendant depuis les villages périphériques de la ville jusqu’aux cantons extérieurs ; 2 élus pour l’arrondissement d’Aix et un élu pour celui d’Arles.
La ville principale, Marseille, connaît pendant l’entre deux guerres un développement démographique et urbain réel.
En 1921, la ville compte encore moins de 600 000 habitants ( c’est déjà un niveau élevé pour l’époque ) mais quinze ans plus tard, en 1936, on dénombre plus de 910 000 Marseillais et Marseillaises.
Cette évolution doit évidemment au développement des activités du port, notamment avec l’accroissement du trafic en direction de l’Afrique du Nord et des colonies en général, mais aussi à l’arrivée de plus en plus importante d’immigrés, souvent venus en famille, qui font de la ville l’une des plus cosmopolites de France.
Le résultat est qu’il y aura, en 1936, décalage assez net entre le nombre d’habitants de la ville et celui des suffrages exprimés et des électeurs inscrits.
Situation d’ailleurs également rencontrée dans d’autres endroits du département, puisque, pour ne donner qu’un exemple, l’extension de l’exploitation houillère dans le bassin de Provence, autour de Gardanne et Fuveau, se traduira par des recensements de population mettant en évidence la prédominance de l’élément italien au sein de la population résidente.
Le recensement 1931 concernant Gardanne indique par exemple que 3 742 des 7 092 habitants de la commune sont étrangers ( Italiens d’abord, mais aussi Espagnols, Grecs, Arméniens, Polonais, Tchèques, la plupart fuyant les persécutions dans leur pays d’origine ou étant venus travailler en France et notamment dans les mines de charbon et l’usine de traitement de la bauxite de Pechiney ).
Si l’on compte par exemple un grand nombre de Corses au sein de la population locale, l’arrivée, au début des années 20, de familles venues d’Arménie, d’Italie ou d’Espagne a commencé de changer l’apparence et le caractère même de la ville, sans parler des Maghrébins qui y font déjà séjour.
Pour donner une autre idée, les Arméniens fuyant le génocide de 1915 vont être près de 60 000 à débarquer dans le port de Marseille entre 1922 et 1924, c'est-à -dire au moment où le démembrement de l’empire turc et l’arrivée au pouvoir de Mustapha Kemal entraîne à la fois la guerre ( perdue par la Grèce ) entre Athènes et la nouvelle Turquie et, de fait, le départ massif des communautés grecque et arménienne installées sur les côtes de la mer Egée ou dans Istanbul.
Dans un autre style, la marche sur Rome et l’arrivée au pouvoir de Mussolini a tôt fait de faire de la Provence et de Marseille en particulier le point de repli de nombreux exilés politiques ou économiques, fuyant le nouveau régime.
D’ailleurs, la Provence deviendra aussi un lieu d’affrontement politique parfois sanglant entre les opposants et les tenants du régime fasciste.
La même observation vaut, bien entendu, pour la Yougoslavie et l’installation au pouvoir de la dynastie Karadjordjevic, sur le trône du nouveau royaume et par le biais de la suprématie des Serbes, ceux-ci ayant eu la bonne idée de choisir le camp des Alliés, alors que les Croates, alors placés sous domination hongroise, s’étaient trouvés engagés de l’autre côté, pour un grand nombre à leur corps défendant…
Toujours est il que Marseille et les Bouches du Rhône comptent aussi un certain nombre de Yougoslaves dans leur population et que cela culminera, si l’on peut dire, avec la tragédie de l’attentat contre le roi Alexandre et le ministre français Louis Barthou, dit « Vif Argent «, tués dans l’attentat du 9 octobre 1934 ( même si l’un fut victime d’une balle tirée par un militant macédonien et l’autre par la balle d’un policier français ayant voulu riposter )…
Le fait que la vie politique marseillaise fut agitée et parfois sanglante n’est pas très surprenant à l’époque.
En 1931, après la mort prématurée du maire socialiste Siméon Flaissières, s’installe en effet provisoirement sur le fauteuil de maire un certain Simon Sabiani qui va assurer l’intérim jusqu’à l’élection du nouveau maire, le docteur Ribot, radical socialiste mais anti communiste.
Simon Sabiani est l’un des hommes clés de la vie marseillaise de l’époque.
Militant socialiste SFIO dans sa jeunesse, ayant même ( peut être ) adhéré au PCF pendant quelques mois après le congrès de Tours avant de se détacher peu à peu de la gauche pour vivre une sorte d’aventure personnelle, Sabiani est un homme d’affaires, propriétaire de journaux ( notamment Le Petit Marseillais ), élu député des quartiers Nord de Marseille en 1928, et qui, adjoint au maire comme « socialiste indépendant « , dispose aussi d’intérêts dans des milieux assez peu fréquentables, depuis le jeu jusqu’aux boîtes de nuit, sans compter la prostitution, les uns servant parfois de paravent à l’autre ou aux autres activités douteuses…
Il a surtout noué de solides amitiés avec certains individus du milieu marseillais, Paul Carbone et François Spirito, engagés dans toutes les affaires les plus douteuses ( contrebande avec l’Italie, prostitution, trafic de drogue y compris en direction des Etats-Unis ) et qui fournissent à Sabiani les hommes de main et les nervis dont il a besoin soit pour briser les grèves menées sur la ville par un mouvement syndical de plus en plus puissant et revendicatif, soit pour assurer, si l’on peut dire, la sécurité de ses réunions électorales ou semer le désordre dans celles des autres candidats.
Ce sont ces deux individus, assez peu fréquentables, qui serviront de modèles, si l’on peut dire, aux personnages joués par Alain Delon et Jean Paul Belmondo dans le film Borsalino.
Dans l’équipe des hommes de Sabiani, on trouvera aussi à un moment donné un certain Antoine Guérini, dont le frère Mémé, sera très célèbre après guerre, en soutenant en sous main la municipalité Defferre comme il avait choisi le camp de la Résistance pendant l’Occupation ( ce qui ne fut le cas ni de Sabiani, mort en exil en Espagne franquiste ni de Carbone et Spirito, le premier finissant abattu par la Résistance en 1943 ).
Autant dire que les luttes politiques ont eu de drôles de tours dans la Marseille de l’entre deux guerres.
En 1932, la SFIO est la force dominante aux élections législatives.
Elle dispose en effet du siège d’Arles ( avec Sixte Quenin, qui deviendra maire d’Arles dans une partielle en 1934 ), et des deux sièges de l’arrondissement d’Aix en Provence avec Félix Gouin et Fabien Albertin.
Le premier est alors maire d’Istres et député de la 1ere circonscription qui est pourtant séparée d’Istres par tout le secteur de l’Etang de Berre ( Martigues, Salon, etc…) et le second est élu d’une circonscription où domine un électorat qu’il tire à lui notamment sur Salon.
Le problème, c’est que Félix Gouin, le moment venu, ne votera pas en faveur de Pétain en juillet 1940, connaîtra un parcours de résistant significatif et continuera jusqu’en 1958 sa carrière politique dans les Bouches du Rhône.
Il ne se retirera, notons le, qu’au moment où la SFIO soutiendra la réforme constitutionnelle du Général de Gaulle, alors que lui-même s’y opposait.
Fabien Albertin, lui, votera les pleins pouvoirs à Pétain et sera donc inéligible à la Libération, finissant sa vie, partagé entre Paris et ses activités d’avocat et la Provence.
Les huit députés de Marseille sont d’abord SFIO avec Raymond Vidal, élu de la 5e circonscription ( couvrant une partie des 12e, 13e et 14e arrondissements de Marseille et le canton de Roquevaire ), Henri Tasso, élu de la 1ere circonscription ( organisée autour du cours Belzunce, du port et du secteur du Pharo , c’est, en gros, le futur siège de Gaston Defferre ), Toussaint Ambrosini, élu de la 2e circonscription ( couvrant une partie des 2e, 15e et la totalité du 16e arrondissement municipaux ).
Nous avons aussi, sur la 8e circonscription ( qui couvre la totalité de l’actuel 9e arrondissement municipal, une partie du 10e et le canton de la Ciotat ) la forte personnalité de Fernand Bouisson.
Bien que socialiste indépendant, puisqu’ayant quitté la SFIO en 1934, ce dernier joue un grand rôle dans la vie politique puisqu’il passe du perchoir de l’Assemblée ( il est le Président de la Chambre des Députés de 1928 à 1936 quasiment sans interruption ) au maroquin d’un Ministre et même de Président du Conseil.
Mission qu’il assuma du 1er juin 1935 au 4 juin 1935, après avoir constitué une équipe pour le moins disparate comprenant des personnalités comme Pierre Laval, Edouard Herriot, Georges Mandel, Joseph Caillaux, Louis Marin ( président de la Fédération républicaine de France ), le maréchal Pétain ou encore Mario Roustan ( sénateur radical socialiste de l’Hérault et plusieurs fois Ministre de l’Instruction Publique ).
Fernand Bouisson est aussi devenu maire de La Ciotat, cette ville double partagée entre les villégiatures des armateurs et des bons bourgeois et les chantiers navals et leurs ouvriers.
Mais, donc, en 1932, sont aussi élus à Marseille des élus comme Simon Sabiani, dans la 3e circonscription ( étiquette « gauche indépendante « ! ), couvrant une partie des 2e, 3e et 15e arrondissements municipaux ; Marius Boyer, maire d’Aubagne, et député de la 6e circonscription qui, outre le canton d’Aubagne, recouvre aussi l’essentiel du 11e arrondissement municipal et des morceaux des actuels 10e et 12e arrondissements ( étiquette Gauche radicale, c'est-à -dire de droite ) ; Joseph Vidal, député centre républicain de la 7e circonscription ( qui couvre les secteurs de la Corniche et de l’actuel 8e arrondissement, c'est-à -dire les quartiers les plus huppés de la ville ) et Eugène Pierre, député « indépendant « de la 4e circonscription, qui couvre le cœur de ville ( 4e, 5e et 6e arrondissements municipaux actuels en partie ).
Nous avons donc, hors Marseille, trois députés SFIO, et dans Marseille et ses environs, trois députés SFIO, un socialiste indépendant et quatre élus de droite, sous des étiquettes diverses.
1936 est marqué par un évènement essentiel : l’irruption du Parti Communiste Français dans le paysage politique local.
Le PCF emporte en effet trois sièges sur le département.
Il prend le siège d’Arles à la SFIO ( Sixte Quenin, battu aux législatives par Adrien Mouton, quittera ensuite la mairie ), et deux des sièges marseillais, ceux des 2e et 3e circonscriptions.
Dans le premier cas, Jean Cristofol est élu au premier tour contre le sortant SFIO Toussaint Ambrosini, en obtenant 8 639 voix contre 5 361 au candidat socialiste sur 17 524 votants et confirme de fait deux choses : un, son élection comme conseiller général du 5e canton de Marseille en octobre 1934, après avoir devancé de quelques voix le sortant SFIO Duchemin mais obtenu son retrait au second tour, dans le cadre d’accords de Front populaire ; deux, la poussée de son parti qui quadruple ses voix sur le département au regard de 1932.
Dans le second cas, c’est François Billoux, futur Ministre à la Libération, qui chasse du Palais Bourbon Sabiani, en le battant par 7 286 voix contre 6 323 au second tour.
Sont par ailleurs réélus Henri Tasso ( dès le premier tour avec 15 136 voix sur 19 168 votants ! ) dans la 1ere circonscription – Henri Tasso, depuis les municipales de 1935, est devenu maire de la ville dans une municipalité d’alliance des partis du Front Populaire ; Raymond Vidal, devenu le premier adjoint d’Henri Tasso depuis 1932 ; Félix Gouin ( 10 642 voix sur 17 184 votants, élu avec une majorité renforcée par le report des voix communistes en forte hausse notamment sur le bassin houiller de Gardanne ) ; Fabien Albertin et Fernand Bouisson.
Nous avons donc un département avec 3 élus PCF, 4 élus SFIO et un élu socialiste indépendant.
Reste trois mandats.
Marcel Lucchini, employé d’un bureau de bienfaisance, emporte, pour la SFIO, le siège de la 6e circonscription détenu par Marius Boyer.
Elu du 12e canton de Marseille, Marcel Lucchini bat le sortant, après avoir été devancé au premier tour, en réunissant les voix de gauche pour 11 555 suffrages contre 8 977 pour Marius Boyer.
Cette victoire du candidat SFIO sur la 6e compense donc, en quelque sorte, la défaite de Toussaint Ambrosini face à Jean Cristofol.
Reste qu’en Arles, le communiste Adrien Mouton l’a emporté.
D’abord présenté sur Marseille en 1928 et 1932 ( notamment dans la 2e circonscription ), Adrien Mouton devance au premier tour le sortant SFIO et gagne au second tour contre le candidat agrarien Jouve en obtenant 13 494 voix contre 10 234 suffrages.
La droite ne garde donc que deux sièges sur Marseille en 1936.
Le premier échoit à Henry Ponsard, mutilé de guerre, élu de la 4e circonscription, et membre du groupe des républicains indépendants d’action sociale.
Cet élu de droite annonce clairement la couleur : il se prononce en particulier en faveur d’une normalisation des relations avec l’Italie fasciste, critiquant notamment les sanctions économiques de la SDN à son encontre après l’invasion de l’Ethiopie.
Il est partisan de la protection de l’épargne, de celle des familles nombreuses, de la préférence nationale ( souhaitant la reconduction des étrangers aux frontières ), de la liberté de l’enseignement et j’en passe…
Anti syndical, il demande au Gouvernement de « faire cesser les grèves préjudiciables au commerce marseillais « et condamne « les dirigeants de syndicats qui s’élèvent contre les institutions et font appel à l’émeute « …
Il votera sans sourciller les pleins pouvoirs à Pétain.
Le second siège revient à André Daher.
Celui-ci est le député élu de la Fédération républicaine sur la 7e circonscription, couvrant les secteurs de la corniche et l’actuel 8e arrondissement pour l’essentiel.
Mais, comme il s’agit d’un élu de droite, il est aussi le chef local des Croix de Feu et, surtout, le fil du fondateur d’une société de construction d’avions, et notamment d’avions de guerre, la société Morane Saulnier.
Même si le nom de cette entreprise demeure en effet associé à celui des ingénieurs Léon et Robert Morane et Raymond Saulnier, c’est Paul Daher, le père d’André, qui est aux commandes pour le moins financières, et qui fournit, entre autres, les matériaux de construction des avions.
De fait, quand Morane Saulnier vend à l’Etat son MS 406 pour équiper l’Armée de l’Air avant la Seconde Guerre mondiale, le député Daher est à la fois juge et partie…
Une société Morane Saulnier dont la production, non négligeable ( plus de 1 000 exemplaires du MS 406 ) alimentera surtout l’aviation française ( et subissant 150 pertes en combat pour environ 190 victoires ) et l’aviation d’autres pays.
Les avions réquisitionnés par les Allemands iront, parfois, garnir les aviations des autres nations de l’Axe et l’entreprise principale, à Puteaux, sera utilisée par les Nazis pour faire réaliser certains avions « allemands « comme le Fieseler Storch, célèbre avion de reconnaissance aérienne de la Luftwaffe.
C’est que, sans avoir voté les pleins pouvoirs à Pétain, André Daher collaborera en fait sans problème avec l’ennemi, comme il le fit, après la Libération, avec les Etats-Unis en fournissant des produits d’emballage bois à l’armée américaine stationnant en France.
Morane Saulnier disparaîtra comme entreprise sous le nom de Socata, elle-même filiale de Sud Aviation, puis, de proche en proche, de l’Aérospatiale et d’EADS aujourd’hui avant d’être revendue à Daher en 2009…
Mais tout ceci montre tout de même que la vie politique marseillaise fut pour le moins agitée avant guerre.
La confrontation entre les forces politiques en présence sur place prendra, au cours des années 36 à 40, un tour de plus en plus épique.
Cela commencera, au sein de la mairie, dans la lutte que se livreront le premier adjoint d’Henri Tasso, Raymond Vidal et le syndicat CGT des agents communaux, sur la manière d’organiser les services publics.
Des luttes homériques qui conduiront Vidal à la démission, celui-ci s’inquiétant de la situation financière délicate de la ville et du nombre trop élevé, à son goût, des agents municipaux.
Il faut dire que l’extension continue de l’urbanisation, à partir du noyau du Vieux Port et de Notre Dame de la Garde, crée une situation de plus en plus complexe pour une ville qui ne dispose pas des ressources pour faire face aux besoins croissants d’une population sans cesse renouvelée.
L’adjoint ayant remplacé Vidal, Jean Canavelli, connaîtra le même sort.
Une autre démission intervient : celle de l’adjoint à la voirie, Pierre Ferri Pisani, SFIO que l’on retrouvera dans la vie politique locale après guerre.
Mais l’évènement le plus marquant de l’avant guerre est le 28 octobre 1938, lorsque, alors que se tient le congrès du Parti radical socialiste avec plusieurs Ministres en exercice ( Daladier, Chautemps, entre autres ), un incendie terrible se propage dans l’immeuble des Nouvelles Galeries, causant la mort de 73 personnes, essentiellement employées du magasin et apportant un terrible éclairage sur la situation locale.
La droite marseillaise ( Ponsard le mutilé de guerre, le docteur Canebier, Sabiani rallié au PPF de Doriot depuis 1936 ) prend appui sur la situation pour mener, à l’encontre de la municipalité, une charge d’autant plus forte et, sous certains aspects, grossière, que les pompiers de Marseille, contrairement aux agents de la voirie, sont un des milieux locaux largement pénétrés par les hommes de Sabiani.
Et que l’incompétence dont ils ont fait preuve lors de l’incendie est largement liée aux insuffisances professionnelles nées d’un recrutement purement clientéliste.
Mais le Ministre de l’Intérieur Albert Sarraut, radical socialiste, ne transige guère.
Il dissout le corps municipal des sapeurs pompiers et le remplace par le bataillon des marins pompiers qui existe toujours et, surtout, il place la ville de Marseille sous tutelle directe de l’Etat, comme la ville de Paris et nomme un administrateur général en lieu et place de son maire.
L’épilogue de ces évènements de 1936, c’est évidemment la période de la guerre.
Aucun des trois députés communistes ne manquera de ce point de vue à l’engagement dans la lutte pour la Libération du pays.
Pour les élus de droite, nous avons déjà vu, en grande partie ce qu’il en était.
Daher se repliera sur ses « affaires « après guerre, et Ponsard, qui va mourir en 1960, ne pourra évidemment pas reprendre d’activité politique après guerre.
Du côté des SFIO, Henri Tasso mourra pendant la guerre, Marcel Lucchini, ayant soutenu Pétain sera exclu et ne fera plus de politique ( sauf à participer aux activités du Bureau d’Aide sociale ), Toussaint Franchi, ayant remplacé Henri Tasso devenu sénateur, attendra cependant 1953 et la levée de son inéligibilité liée au vote du 10 juillet 1940 pour pouvoir reprendre une activité politique.
Il deviendra alors l’un des adjoints de Gaston Defferre à la mairie de Marseille, après avoir en quelque sorte fait amende honorable de son pétainisme passager en soignant pendant la guerre les résistants et les réfractaires du STO.
Pour Albertin, nous avons vu : son Oui à Pétain l’a mis hors jeu de la politique après la Libération et nous avons vu que Félix Gouin a, pour sa part, été de tous les moments de la Résistance, depuis le vote Non à Pétain jusqu’à la Libération.
Fernand Bouisson ayant quelque peu résisté à toute envie de résister, sera déclaré inéligible à la Libération et n’exercera plus aucun mandat électif jusqu’à sa mort en 1959.
Bref, la SFIO de l’avant guerre à Marseille et dans les Bouches du Rhône a été marquée par une passivité redoutable qui a conduit le parti à rechercher par ailleurs ceux qui pouvaient l’aider à se redresser.
Et le redressement de la SFIO passera après guerre, par la montée en puissance de deux jeunes élus issus de familles protestantes ( un fait assez étonnant dans une ville où la religion catholique est pour le moins présente ) et militants discrets et peu engagés du courant socialiste avant guerre.
D’abord l’avocat Gaston Defferre, âgé de 35 ans à la fin de la guerre et ensuite l’UDSR, parti allié de la SFIO, Francis Leenhardt.
Tous les deux ont été combattants de la première heure dans la Résistance, et leur action commune a visé, entre autres, à se passer des services des élus de l’ancienne équipe Tasso et à contrebalancer le poids du PCF dans la Résistance locale.
On rappellera, pour le coup, que l’insurrection de Marseille se produisit, en août 1944, avant même que les troupes des généraux De Lattre de Tassigny et Goislard de Monsabert ( tous les deux parfaitement de droite d’ailleurs ! ) ne soient orientées vers la cité phocéenne.
Et après la Libération, nous retrouverons, dans les luttes pour le pouvoir local, Gaston Defferre et Francis Leenhardt face à Jean Cristofol et François Billoux, les élus communistes.
Mais c’est là une autre histoire.