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Elections législatives de 1936

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Re: Elections législatives de 1936

Messagede vudeloin » Mar 17 Mai 2011 23:52

Outre que l'USR signifie Union Socialiste Républicaine et non révolutionnaire ( je me suis laissé emporter par mon élan ), on verra dans les jours prochains la question des scores des uns et des autres lors de ces élections...

COmme celle de la répartition des élus entre les différents partis en France qui aura, chacun le verra, un air de déjà vu pour bien des aspects...
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Re: Elections législatives de 1936

Messagede vudeloin » Mer 18 Mai 2011 15:56

Deux trois petites choses dans la liste des élus parisiens, mais qui ne changent pas grand chose au film : outre les élus USR qui sont républicains et non révolutionnaires ( l'USR étant un groupement assez surprenant qui regroupa des gens aux destinées fort variables dont Marcel Déat, entre autres ), notons juste que Louis Sellier et Garchery étaient élus du parti d'unité prolétarienne et que seul Le Troquer était élu SFIO sur le 12e arrondissement.
Enfin, un oubli un peu rapide m'a fait omettre que le PCF avait deux élus en Seine et Marne et non un seul.
Le premier était Emile Fouchard, maire de Chelles depuis le renouvellement 1935 et qui sera élu sur le siège de Claye Souilly Lagny.
Le second était Roger Benenson, mécanicien au Service des Eaux de la Ville de Paris qui va créer la surprise.
En effet, alors qu'il avait déménagé en Seine et Marne, et avait échoué aux municipales de 1935 dans la petite commune des Ormes sur Voulzie, il est élu député de Provins au bout d'une triangulaire acharnée.
Il sera également élu conseiller général du canton de la cité des Roses ( un canton fort ressemblant de celui d'aujourd'hui )en octobre 1937.
Il connaîtra une fin tragique en déportation, en ayant connu quelques unes des vicissitudes de l'engagement communiste de l'époque ( opposé au pacte germano soviétique et mobilisé, il rompra avec le PCF début 1940 mais n'en sera pas moins arrêté, interné à Châteaubriant et Voves, et déporté en Allemagne ).
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Re: Elections législatives de 1936

Messagede vudeloin » Mer 18 Mai 2011 18:39

Pour que chacun mesure l’état des rapports de forces politiques de ces élections du Front Populaire, un état des élus Région par Région, sachant que nous avons arbitrairement pris le découpage régional actuel en référence et non ce qui aurait pu être un autre découpage, plus proche des habitudes et des réalités de l’époque.

Alsace : 15 élus de droite ( 12 Action populaire, 2 URD – FRF, 1 républicain de gauche – Alliance démocratique )
1 élu de gauche ( 1 PCF )

Aquitaine : 9 élus de droite ( 3 URD, 4 républicains de gauche, 1 indépendant, 1 radical indépendant )
24 élus de gauche ( 4 PCF, 4 SFIO, 6 USR, 8 radicaux socialistes, 2 gauche indépendante )

Auvergne : 6 élus de droite ( 3 républicains de gauche, 2 URD, 1 agrarien )
15 élus de gauche ( 12 SFIO dont les 6 élus de l’Allier, 2 radicaux socialistes et 1 gauche indépendante )

Bourgogne : 7 élus de droite ( 4 républicains de gauche, 2 radicaux indépendants, 1 URD)
16 élus de gauche ( 12 SFIO, 2 radicaux socialistes, 1 unité prolétarienne, 1 gauche indépendante )

Bretagne : 26 élus de droite ( 6 républicains de gauche, 9 URD, 5 démocrates populaires, 3 radicaux indépendants, 1 conservateur, 2 agrariens )
9 élus de gauche ( 4 SFIO, 5 radicaux socialistes )

Centre Val de Loire : 3 élus de droite ( 2 républicains de gauche, 1 radical indépendant )
24 élus de gauche ( 1 PCF, 7 SFIO, 6 USR, 1 Unité prolétarienne, 9 radicaux socialistes )

Champagne Ardennes : 1 élu de droite ( 1 URD )
17 élus de gauche ( 1 PCF, 2 SFIO, 1 Unité prolétarienne, 1 USR, 12 radicaux socialistes ).

Corse : 3 élus de droite ( 2 républicains de gauche dont Rocca Serra, 1 républicain indépendant )
1 élu de gauche ( 1 radical socialiste à Bastia )

Franche Comté : 10 élus de droite ( 4 républicains de gauche, 4 URD, 2 radicaux indépendants )
5 élus de gauche ( 1 SFIO, 1 socialiste indépendant, 3 radicaux socialistes )

Languedoc Roussillon : 2 élus de droite ( 2 URD en Lozère )
22 élus de gauche ( 2 PCF, 9 SFIO, 3 USR, 7 radicaux socialistes, 1 Jeune République )

Limousin : 14 élus de gauche ( 1 PCF en Haute Corrèze, 11 SFIO dont les 5 élus de Haute Vienne et 2 radicaux socialistes )

Lorraine : 17 élus de droite ( 3 républicains de gauche, 3 radicaux indépendants, 1 démocrate populaire, 7 URD, 1 agrarien, 2 indépendants )
7 élus de gauche ( 1 USR, 2 Jeune République, 1 Frontiste, 3 radicaux socialistes )

Midi Pyrénées : 8 élus de droite ( 3 républicains de gauche, 1 démocrate populaire, 4 URD, ces 4 élus étant dans l’Aveyron )
24 élus de gauche ( 14 SFIO, 2 USR, 8 radicaux socialistes )

Basse Normandie : 17 élus de droite ( 6 républicains de gauche, 1 radical indépendant, 1 démocrate populaire, 9 URD )

Haute Normandie : 7 élus de droite ( 4 républicains de gauche, 3 URD )
10 élus de gauche ( 1 SFIO, 2 USR, 7 radicaux socialistes )

Nord Pas de Calais : 9 élus de droite ( 4 républicains de gauche, 1 radical indépendant, 4 URD)
30 élus de gauche ( 7 PCF, 19 SFIO, 1 USR, 3 radicaux socialistes )

Pays de Loire : 24 élus de droite ( 4 républicains de gauche, 3 radicaux indépendants, 2 démocrates populaires, 1 indépendant, 3 conservateurs, 11 URD )
7 élus de gauche ( 4 SFIO, 3 radicaux socialistes )^

Picardie : 2 élus de droite ( 1 républicain de gauche, 1 conservateur )
18 élus de gauche ( 2 PCF, 10 SFIO, 6 radicaux socialistes ).

Poitou Charentes : 8 élus de droite ( 1 républicain de gauche, 3 radicaux indépendants, 3 URD, 1 conservateur )
14 élus de gauche ( 2 SFIO, 1 USR, 8 radicaux socialistes, 3 Parti Camille Pelletan )

Provence Alpes Côte d’Azur : 7 élus de droite ( 2 républicains de gauche, 1 indépendant de gauche, 1 indépendant, 1 URD, 2 républicains nationaux )
24 élus de gauche ( 7 PCF, 12 SFIO, 1 socialiste indépendant, 2 USR, 3 radicaux socialistes )

Rhône Alpes : 22 élus de droite ( 6 républicains de gauche, 6 radicaux indépendants, 1 démocrate populaire, 8 URD, 1 républicain indépendant )
30 élus de gauche ( 3 PCF, 16 SFIO, 1 Unité prolétarienne, 1 USR, 9 radicaux socialistes ).

Ile de France : 23 élus de droite ( 5 républicains de gauche, 1 radical indépendant, 8 URD – FRF, 8 républicains indépendants et assimilés, 1 PPF )
58 élus de gauche ( 43 PCF, 6 SFIO, 1 Unité Ouvrière, 2 Unité Prolétarienne, 2 USR, 3 radicaux socialistes, 1 Frontiste )

Outre Mer et Colonies : 8 élus de droite ( 7 républicains de gauche, 1 républicain indépendant )
12 élus de gauche ( 2 SFIO, 4 USR, 4 radicaux socialistes, 2 gauche indépendante )

Comme on le voit, une partie des bastions de la gauche, comme de la droite, demeurent ou sont assez clairement identifiés à l’occasion de ces élections du printemps 1936.

Mais les mouvements internes sont importants, puisque le PCF devient par exemple la première force politique en nombre d’élus en Région Ile de France tandis que la SFIO s’affirme en Auvergne (12 élus sur 21), en Bourgogne (12 élus sur 23), en Limousin (11 élus sur 14), en Midi Pyrénées (14 élus sur 32) ou dans le Nord (19 élus sur 39) comme en Picardie ( 10 élus sur 20).

Le recul du radicalisme est une réalité, mais on notera que les positions du parti radical d’Edouard Herriot, Edouard Daladier et Camille Chautemps demeurent assez fortes dans le Centre ( 9 élus sur 27 ) et surtout, en Champagne Ardennes ( 12 élus sur 18 ), dans le Midi toulousain ( 8 élus sur 32 ), ou encore en Normandie ( 7 élus sur 17 entre Eure et Seine Inférieure, avec l’influence de Pierre Mendès France entre autres ).

La mouvance radicale est influente en Poitou Charentes, avec 8 élus sur 22, 3 élus de la tendance Camille Pelletan et, à droite, les 5 élus de la Gauche démocratique et des radicaux indépendants.

Elle est par contre en recul sur la région Rhône Alpes où le parti radical n’a plus que 9 élus de la tendance liée au Front Populaire ( dont 3 sur Lyon avec Edouard Herriot, 2 dans la Drôme et 2 dans l’Isère ), tandis qu’on compte 6 radicaux indépendants et 6 républicains de gauche sur le flanc droit de l’Assemblée.
Enfin, le parti radical est en difficulté sur la région parisienne : 1 élu à Paris Xe ( l’aviateur Lucien Bossoutrot, nous l’avons déjà dit ), 1 élu en Seine et Oise dans la circonscription rurale d’Etampes et un élu en Seine et Marne dans la circonscription de Meaux - La Ferté Sous Jouarre – Lizy sur Ourcq.

On notera également avec intérêt la situation de la Bretagne, encore largement acquise alors à la droite ( 26 sièges sur 35 ), ou encore de l’Est alsacien ( 1 seul élu de gauche, un député communiste sur Strasbourg Campagne pour 14 de droite et du centre droit !) et lorrain ( 17 élus de droite sur 24 sans le moindre député socialiste SFIO ou communiste ).

Dans cette région, l’arrivée des immigrants, italiens notamment, est encore trop récente en 1936 pour que leur naturalisation éventuelle ait produit le moindre effet sur les résultats électoraux.

Enfin, pour la région Provence, notons que PCF et SFIO obtiennent ensemble la majorité des sièges de la région, fortement caractérisée dès lors par leur concurrence et leur implantation respective.

Le PCF a trois élus sur les Bouches du Rhône, deux dans le Var et deux dans les Alpes Maritimes où il est pratiquement seul face à la droite et au centre droit.
Le lieu d’élection ?
Arles, Marseille, Brignoles, Toulon La Seyne, Le Nice populaire de Saint Roch et, incroyable aujourd’hui mais vrai, Antibes et Cannes.

La SFIO dispose de 12 élus dans la région, dont 5 dans les Bouches du Rhône, où elle réduit la droite aux seuls quartiers huppés de Marseille, 2 dans les Basses Alpes, 2 dans le Var et 2 dans le Vaucluse où elle devance le Parti radical en nombre de voix.
Alors même que le chef des radicaux vauclusiens s’appelle Daladier.

Et signe d’une réalité qui n’a que peu bougé, Jean Médecin est élu, à droite, sur Nice.
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Re: Elections législatives de 1936

Messagede Zimmer » Mer 18 Mai 2011 23:54

vudeloin a écrit:La révocation administrative de Doriot a été due, entre autres motifs, pas spécifiquement à une pression du PCF, mais plutôt à quelques approximations dans la gestion des affaires communales et notamment des problèmes de sincérité des comptes administratifs.


Il est exact que c'était les raisons officiellement avancées pour justifier cette révocation mais le PCF se mobilisa également beaucoup pour obtenir celle-ci. Ca a été relaté notamment par l'excellent historien Jean-Paul Brunet dans ses ouvrages consacrés à Saint-Denis, d'une part, et à Jacques Doriot, d'autre part.

vudeloin a écrit:Un Fernand Grenier, natif d'Halluin, qui sera, entre autres, député de l'Assemblée provisoire d'Alger, commissaire à l'Air de la France Libre, et député de Saint Denis de 1945 à 1973...


Fernand Grenier fut député jusqu'en 1968, année où il ne s'était pas représenté et où Marcelin Berthelot (qui succédera également à Auguste Gillot, comme maire de Saint-Denis, en 1971) l'avait remplacé à l'Assemblée nationale.

vudeloin a écrit:Le second était Roger Benenson, mécanicien au Service des Eaux de la Ville de Paris qui va créer la surprise.
En effet, alors qu'il avait déménagé en Seine et Marne, et avait échoué aux municipales de 1935 dans la petite commune des Ormes sur Voulzie, il est élu député de Provins au bout d'une triangulaire acharnée.
Il sera également élu conseiller général du canton de la cité des Roses ( un canton fort ressemblant de celui d'aujourd'hui )en octobre 1937.
Il connaîtra une fin tragique en déportation, en ayant connu quelques unes des vicissitudes de l'engagement communiste de l'époque ( opposé au pacte germano soviétique et mobilisé, il rompra avec le PCF début 1940 mais n'en sera pas moins arrêté, interné à Châteaubriant et Voves, et déporté en Allemagne ).


C’est vrai qu’une proportion non négligeable des députés élus en 1936 allaient connaître un destin tragique, dans les années noires qui devaient bientôt suivre cette période. Il faudra sans doute y revenir ultérieurement, dans ce sujet qu’il convient cependant de traiter, dans la mesure du possible et pour une meilleure lisibilité, plutôt de manière chronologique.
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Re: Elections législatives de 1936

Messagede vudeloin » Jeu 19 Mai 2011 11:01

Les mânes de Marcelin Berthelot ne m'en voudront pas, je l'escompte, d'avoir réduit son mandat de député de cinq ans...
Surtout que 1968 ne fut pas un très bon crû pour la gauche en général et le PCF en particulier... ( en tout cas, sur le plan électoral )
Sur la qualité du travail de Jean Paul Brunet, je n'ai pas d'observations particulières à faire même si je pense qu'il accorde trop d'importance à l'action du PCF pour faire destituer Doriot, quand bien même la vie politique de l'entre deux guerres était d'un autre profil et d'une autre violence que celle d'aujourd'hui ( à côté, l'affaire DSK c'est de la rigolade ! ).
Quant à la question du comportement des députés au fil du temps, qu'il s'agisse des élus du PCF comme des autres, elle est effectivement centrale dans ces élections du printemps 1936.
Pour ceux qui lisent sans doute avec intérêt et curiosité ces messages, ne pas oublier que ce sont les députés de la XVIe législature de la IIIe République, courant de 1936 à 1942 ( prolongation pour cause de guerre en 1939 ) qui vont voter les pleins pouvoirs à Pétain...
Comme ils avaient voté les congés payés, la semaine de quarante heures et les conventions collectives !
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Re: Elections législatives de 1936

Messagede vudeloin » Jeu 19 Mai 2011 18:02

Pour changer un peu du parisianio centrisme trop souvent de règle, ( ceci dit sans vexer quiconque ), un détour par une des régions clés de ces élections législatives de 1936, en l’occurrence les départements du Nord et du Pas de Calais, qui, à l’occasion de ce scrutin, vont élire 19 députés SFIO et 7 députés communistes, c'est-à-dire 26 des 39 parlementaires d’une région ouvrière, marquée par le textile, la mine, la métallurgie et l’Eglise ( aussi )…

Les résultats par département sont d’une limpidité assez nette.

Dans le Nord, on compte en effet 500 234 bulletins exprimés, ce qui fait du département le second de France pour le nombre de votants.

Le département compte 569 468 électeurs inscrits ( seuls les hommes âgés de plus de 21 ans votent alors, ne l’oublions pas ) et élit 24 élus, ce qui donne tout de même une moyenne de près de 25 000 électeurs par circonscription que l’on ne retrouve pas ailleurs.

C’est là la survivance et les effets du scrutin d’arrondissement qui conduit d’ailleurs à ce que les sièges nordistes soient calqués sur les découpages administratifs en vigueur.
Ainsi, a-t-on 10 députés sur l’arrondissement de Lille, 2 sur celui de Douai, 3 sur celui d’Avesnes, 2 sur Cambrai, 2 sur celui d’Hazebrouck, 2 sur celui de Dunkerque, 3 sur celui de Valenciennes.

La droite, en 1936, va subir dans ce département, une défaite sans appel, puisque la SFIO obtient 13 élus, le PCF 6 et la Gauche indépendante un 20e élu.

Les partisans de la droite sont donc réduits à 4 sièges, 3 proches de l’Union Républicaine et Démocratique et un radical indépendant qui s’affiliera au groupe de la Gauche Démocratique et des Radicaux Indépendants.

Dans le détail, voyons donc tout d’abord ces élus de droite.

Le premier, c’est Henri Becquart, né à Houplines près d’Armentières, et qui exerce d’ailleurs la profession de directeur d’usine textile dans ce secteur.

Il est élu sur la 1ere circonscription de Lille ( Lille Nord entre autres ), qui regroupe les vieux quartiers centraux de la cité flamande et certaines de ses communes proches.

Et il est membre de la Fédération républicaine de France.

Henri Becquart se fera le porte parole du patronat textile et du patronat en général, mais il est surtout connu pour avoir été le relais des accusations de désertion portées à l’encontre de son adversaire politique, le maire de Lille Roger Salengro, dont on sait qu’elles conduiront, malgré le soutien affiché et officiel de la majorité de la Chambre, à son suicide à la fin de l’année.

Ayant voté les pleins pouvoirs à Pétain, mais ayant agi dans la Résistance, Henri Becquart ne sera toutefois pas réélu après guerre dans le moindre scrutin.

Second élu de droite, toujours sur Lille, sur le siège de la 9e circonscription, le radical indépendant Léon Marescaux ( un nom à peine répandu dans la région, comme on le constate ), élu donc sur Tourcoing et une partie de son agglomération.

Candidat contre le Front Populaire, membre de la Chambre de commerce et d’industrie, il est élu au second tour avec 13 584 voix contre 12 784 voix au candidat du Front Populaire, 507 allant vers un autre candidat.

C'est-à-dire avec un pourcentage tout juste supérieur aux 50 % ( 50,54 % exactement )…

Parfait représentant du patronat paternaliste du Nord, Léon Marescaux va notamment se préoccuper de questions sociales durant la législature et notamment des différentes formes d’assistance aux plus démunis…

Ayant voté les pleins pouvoirs à Pétain, il sera même fait maire de Tourcoing par décision du régime de Vichy, situation dont il convient de rappeler qu’elle se situait dans un contexte où la région était directement placée sous autorité allemande pour l’essentiel de la vie quotidienne.

Rendu inéligible à la Libération, il se retirera totalement de la vie politique.

Troisième élu de droite, sur l’arrondissement de Dunkerque et, en l’espèce, la 2e circonscription, André Parmentier, député de la Fédération républicaine de France.

Le siège est alors détenu par l’intéressé, et correspond, pour aller vite, à la partie rurale de l’arrondissement de Dunkerque, c'est-à-dire la Flandre flamingante intérieure, largement gagnée au catholicisme militant.

Elu face à un républicain indépendant en 1932, avec un total de voix de droite de 11 628 voix contre 1 499 voix de gauche, André Parmentier va être réélu au premier tour en 1936.
Il obtient en effet 7 697 voix, mais ses adversaires de gauche s’avèrent plus influents : 2 304 voix pour le candidat SFIO Machy ( déjà candidat en 1932 ), 1 994 voix pour le radical socialiste Bernard et 423 suffrages pour le candidat communiste Ryckelynck.

Soit un total de 4 721 voix pour les trois candidats de gauche…

André Parmentier ne votera pas les pleins pouvoirs au maréchal Pétain, au seul motif qu’il fait alors partie des parlementaires empêchés.
Et pour cause, puisqu’engagé volontaire ( à plus de 40 ans ) dans les blindés, il est fait prisonnier lors de l’offensive allemande de mai 40.

Libéré, il se met au service du régime de Vichy et devient préfet des Vosges, puis de Rouen.

En janvier 1943, il organise ainsi la rafle des Juifs dans son arrondissement et finit par y gagner une promotion, en qualité de directeur général de la Police Nationale, nommé par Pierre Laval.

Mais, sentant peut être que le vent de l’Histoire n’est plus aussi favorable, il marquera dans ses fonctions une opposition croissante aux tenants de la collaboration, entrant notamment en conflit avec la Milice, et usant de sa fonction pour permettre à certains ( Juifs, résistants, réfractaires du STO ) d’échapper à une destinée fatale…

Ce qui ne l’empêchera pas d’être frappé d’indignité nationale et de ne pas connaître de prolongation de sa carrière politique après la Libération.

Le dernier élu de droite, élu sur la 2e circonscription d’Hazebrouck ( l’arrondissement a disparu depuis 1926 mais le découpage demeure ), est le jeune Jean Pierre Plichon, ingénieur, centralien, industriel, alors âgé de 29 ans, et qui vient rechercher sur Bailleul le siège détenu jusque là par son oncle, le lieutenant colonel Plichon, élu depuis 1889.

La circonscription, au-delà des vicissitudes du découpage, est comme un bien de famille puisqu’un autre ( Charles Plichon ) avait déjà été député d’Hazebrouck et, de fait, de Bailleul, épousant tour à tour les étiquettes monarchiste libérale à l’époque de la Monarchie de Juillet ou celle de conservateur orléaniste sous le Second Empire.

Ce qui n’empêcha pas ce Plichon là, industriel lui aussi, d’être ministre dans les gouvernements d’Emile Ollivier, peu de temps avant Sedan.

L’oncle Jean, le colonel, a toutes les caractéristiques requises de l’élu de droite du Nord : Président de la compagnie des Mines de Béthune, vice Président du comité des Houillères, administrateur de sociétés, membre de conseil d’administration de banques ( comme la Scalbert Dupont, ou encore le Crédit industriel et commercial ), et il constitue donc une base solide pour l’élection du nouveau député.

Il a d’ailleurs été élu à la suite du premier Plichon sous l’étiquette monarchiste avant de devenir un républicain très modéré, et même indépendant.

Jean Pierre Plichon est élu sans difficulté majeure au second tour, avec 5 722 voix contre 3 370 à son adversaire le plus proche, le futur député socialiste Darou.

Représentant du monde rural, siégeant au groupe des républicains indépendants d’action sociale ( préfiguration des indépendants et paysans d’après la Libération ), il intervient en général sur ces questions, défendant par exemple la production brassicole française ou encore celle du lin.

Profondément de droite, il ne sera pas le dernier à demander l’expulsion des députés communistes en 1940 et vote sans difficultés les pleins pouvoirs à Pétain.

Sa carrière politique semble se dissoudre avec la guerre, puisqu’il ne sera plus jamais parlementaire.

Il est même probable qu’il ait préféré se consacrer à ses affaires...

Notons tout de même que, parmi les personnes liées à la famille Plichon, figurent entre autres des Cleenewerck de Crayencour, des Thiriez et des Descamps.

Dans les deux derniers cas, il s’agit de familles du textile tourquennois bien connues dont la vie politique a encore un rejeton aujourd’hui ( l’ancien Ministre Jean Jacques Descamps ) et dans le premier cas, il s’agit de la famille de l’écrivaine Marguerite Yourcenar ( anagramme de Crayencour ).

Voilà pour la droite, si j’ose dire…

Passons à la gauche et à l’élu de la gauche indépendante, élu sur le siège de la première circonscription d’Hazebrouck, Gabriel Plancke.

Le siège est alors détenu par l’indépendant ( de droite ) René Faure.
Au premier tour, le candidat sortant est en tête avec 6 678 voix, contre 4 831 pour Gabriel Plancke, 2 739 voix pour un autre candidat de gauche ( probablement SFIO ) et 185 voix pour un dernier candidat.

Le report des votes assure le succès de Gabriel Plancke au second tour avec 7 263 voix contre 7 147 voix à son concurrent de droite.

Ecart réduit ( 116 suffrages ! ) qui montre le clivage politique existant entre la Flandre flamingante et le reste du département.

Imprimeur de son état et sensible aux questions du commerce, Gabriel Plancke ne participera pas au vote indigne du 10 juillet 1940, accordant les pleins pouvoirs à Pétain.

Prenons maintenant le cas des députés communistes, qui furent 6 à être élus dans ce département en 1936.

Premier élu, le député de la 10e circonscription de Lille, orientée sur le Tourquennois ( Halluin ) et Armentières.
L’élu de 1936 est Gilbert Declercq, maire d’Halluin depuis 1935, après avoir été rempailleur de chaises, ouvrier tisserand et responsable syndical CGT.
Le premier tour de l’élection de 36 est redoutable.
Il affronte un candidat des républicains de gauche, Bataille, qui obtient 7 966 voix contre 7 025 au candidat PCF, alors âgé de quarante ans.
Les votes se partagent derrière lui entre un candidat radical, un SFIO et un démocrate populaire.

Le second tour se déroule au couteau, et Declercq est finalement élu avec 12 932 suffrages contre 12 320 voix pour Bataille.
Et le siège, jusqu’alors de droite, passe à gauche.

Il sera un député communiste soucieux de rester dans la ligne de son Parti, mais fut lui aussi touché dans ses convictions par le pacte germano soviétique d’août 1939.
Il se désolidarisera du reste du PCF et ne sera d’ailleurs pas déchu de ses droits de parlementaire en janvier 1940, finissant même par voter les pleins pouvoirs au maréchal Pétain.

Pour autant, il entrera dans la Résistance et on retrouvera sa trace dans le Midi, puisqu’il participera, à l’été 44, aux actions des maquis de l’Aigoual, aux confins de la Lozère, du Gard et de l’Ardèche.
Mais arrêté par les Allemands en septembre 1944, il est déclaré décédé le 30 septembre, vraisemblablement abattu par une armée nazie alors en déroute…
Pour les cinq autres élus communistes, nous sommes dans des cas de figure plus « habituels «, en tout cas en ce qui concerne leur terrain d’élection.

Nous avons en effet les trois députés du Valenciennois et les deux députés du Douaisis.

Commençons par le Valenciennois.

Sur la première circonscription de cet arrondissement, couvrant une partie de la ville, mais aussi des localités comme Condé sur l’Escaut ou encore Onnaing.
En 1932, le siège a été gagné par un élu SFIO, Pierre Delcourt, qui l’avait emporté assez nettement sur un candidat de droite, avec 4 300 voix d’avance.
Au premier tour de 1936, la compétition entre Pierre Delcourt, conseiller général et maire de Condé, et Lucien Raux, le candidat du PCF, maire d’Onnaing.

Le délégué mineur l’emporte de 8 voix sur l’ensemble de la circonscription en réalisant 6 437 voix ( gain de près de 2 000 voix sur 1932 ) contre 6 429 voix au sortant SFIO.
Les deux candidats de gauche distancent largement le candidat de la Fédération républicaine qui ne fait que 5 019 suffrages.

La règle de « désistement républicain «, mise en œuvre à l’occasion de ces élections, conduit donc Lucien Raux sur la voie du succès, obtenant au second tour 10 291 voix contre 6 915 au candidat de droite, sur un total de 17 857 suffrages exprimés.

Pierre Delcourt, pour sa part, deviendra, peu après, le directeur de cabinet du Ministre de l’Intérieur Roger Salengro ( maire de Lille ) puis de Marx Dormoy, le député de Montluçon qui succédera à l’élu nordiste tragiquement disparu.

Il sera encore élu après la guerre, puisqu’on le retrouvera sur les listes SFIO aux élections de 1946 puis élu au Conseil de la République jusqu’à sa disparition un peu prématurée en 1949, à l’âge de 59 ans.

Pour Lucien Raux, les années 36 à 39 sont marquées par une activité d’élu communiste, intervenant notamment sur les questions de santé, de relations du travail ou encore de logement des mineurs ( les sociétés houillères sont encore privées alors ne l’oublions pas ).
La rupture avec le PCF intervient lors du pacte germano soviétique d’août 39 et Lucien Raux ne sera pas déchu de son mandat de député, fondant avec d’autres élus le groupe de l’Union Populaire française.

Il vote les pleins pouvoirs à Pétain en juillet 1940 et son nom disparaît des activités parlementaires.

Deuxième cas, celui du député de la 2e circonscription, Arthur Musmeaux.

Né dans la région ( dans la petite ville d’Anor ), Arthur Musmeaux, ouvrier ajusteur, est déjà une figure du milieu syndical lorsqu’il se présente, dans les années 30, aux élections.

Il est élu conseiller général de Valenciennes en octobre 34 et se présente donc aux élections de 1936 sur un siège détenu par le socialiste SFIO Couteaux, siège ouvrier couvrant de fait l’Amandinois ( Saint Amand les Eaux, Raismes ), un des secteurs où l’influence du PCF est aujourd’hui encore des plus fortes.

( il s’agit en effet, sur certains aspects, du siège détenu de nos jours par Alain Bocquet ).

Au premier tour de 1936, Arthur Musmeaux obtient 9 587 voix contre 7 361 au candidat de droite et 7 250 au député SFIO sortant.

L’évolution est sensible puisqu’en 1932, Ernest Couteaux, pour la SFIO, avait eu 10 769 voix au premier tour, Léon Millot, radical de droite et maire de Valenciennes, député sortant 8 697 voix, le tout sur 25 722 votants.

La SFIO perd donc plus de 3 500 voix et le meilleur candidat de droite au moins 1 300.

Au second tour, 14 666 électeurs votent Musmeaux parmi les 25 808 suffrages exprimés (56,83 %, pour un siège ayant changé de titulaire à chaque fois depuis 1928).

Fidèle élu communiste, Arthur Musmeaux sera déchu de son mandat de député en 1940 et emprisonné dès janvier 1940 à la prison de la Santé, notamment pour avoir voulu avec 41 de ses collègues, reconstituer un groupe ouvrier et paysan après l’interdiction et la dissolution du PCF.

Il fera donc toutes les prisons où les anciens députés communistes restés fidèles à leur Parti ont été internés, jusqu’à Maison Carrée, la prison algérienne, où une partie sera libérée après l’opération Torch en novembre 1942.

Revenu en France, Arthur Musmeaux reviendra en France et sera réélu député du Nord pour toutes les législatures de la Quatrième République puis de 1962 à 1973, où il laissera donc la place à Alain Bocquet.
Le troisième élu de cet arrondissement fut Sulpice Dewez.

Cet ouvrier menuisier, militant de la Jeunesse communiste, fut élu en 1932 sur le siège de la partie Sud de l’arrondissement, comprenant notamment la ville de Denain.

Il fut en effet vainqueur d’un second tour particulièrement serré alors, en obtenant 13 692 voix contre 13 207 voix au candidat républicain de gauche Macarez.

En 1936, l’écart fut beaucoup plus net et Dewez s’imposa en réalisant au second tour 17 651 voix sur 27 872 exprimés (63,33 %) face au même adversaire.

Il intervint, comme il l’avait fait entre 32 et 36, sur les questions sociales relatives aux mineurs, mais aussi sur l’armée et les questions militaires.

Jeune ( il avait moins de 30 ans quand il fut élu ), il fut mobilisé à l’automne 1939 et indiqua, dans un courrier adressé au Président de l’Assemblée, qu’il n’était membre du groupe communiste au Palais Bourbon, ayant rompu avec le PCF du fait du pacte germano soviétique.

Il fut donc, dans le cadre d’une permission, en situation de voter en faveur des pouvoirs accordés au maréchal Pétain.

Pour autant, il ne soutint pas le régime de Vichy et, après avoir été assigné à résidence dans le Comminges, participa à la Résistance.

Son vote en faveur de Pétain le prive toutefois, après la Libération, de toute possibilité de se présenter de nouveau aux élections, puisque son inéligibilité n’est pas relevée.

Engagé dans le syndicalisme, Sulpice Dewez anime alors la Confédération générale des syndicats indépendants.

Une organisation où il retrouve des disciples de René Belin, ce dirigeant de la CGT d’avant guerre qui sera Ministre du Travail de Pétain et des militants gaullistes, proches ou issus du RPF.

Protégée par la police du Préfet Baylot, la CGSI prendra des positions notamment dans l’industrie automobile où elle constituera le syndicat « maison « du groupe Simca, en s’appuyant sur le réseau des agents de maîtrise et en constituant, bien souvent, une sorte de hiérarchie parallèle, « politique « en quelque sorte, à la hiérarchie fonctionnelle de l’entreprise.
La CGSI aura d’ailleurs le concours d’un autre ancien député communiste de 1936, André Parsal, dont nous reparlerons à l’occasion, mais surtout celui d’une partie du patronat soucieuse d’éviter que les salariés ne participent à l’action des organisations syndicales confédérées et représentatives.

Et singulièrement, bien sûr, de la CGT, dont la représentativité fut aussi fondée, rappelons le, sur sa participation à la lutte contre l’occupant nazi.

Après de multiples cahots, la CGSI a disparu du paysage syndical, la tendance restant proche de Sulpice Dewez finissant par adhérer à la CFTC, celle plus proche d’André Parsal concourant à la création de la Confédération Française du Travail, devenue CSL ( Confédération des Syndicats Libres ).

Non représentative, la CSL s’est toutefois toujours présentée aux élections aux conseils de prud’hommes, tout en perdant, lors du grand conflit de 1982, l’essentiel de son influence dans le groupe Talbot Citroën qui constituait son point fort.

En tout cas, drôle de destinée pour l’un des députés communistes de 1932 !

Les deux élus du Douaisis, pour leur part, n’ont pas failli à l’attachement à leur Parti.

Elu sur la 1ere circonscription, Henri Martel.
Apprenti mineur à 13 ans, mobilisé en 14 – 18, fait prisonnier puis revenant travailler au carreau avant de devenir un délégué mineur populaire et estimé de ses collègues de la mine d’Aniche, Henri Martel est élu en 1936 député face au républicain de gauche Delsart.

( on rappellera que les républicains de gauche ne sont que républicains et assez peu de gauche, n’ayant gardé cette appellation que par référence à un lointain passé où, sur la droite du Palais Bourbon, siégeaient encore quelques monarchistes plus ou moins libéraux ).

C’est là une revanche sur l’élection de 1932 qui avait vu le conseiller général d’Orchies ( le pays de la chicorée Leroux ) Léon Delsart, par ailleurs agriculteur exploitant et membre de la chambre d’agriculture, l’emporter avec 9 703 voix au second tour contre 9 365 au candidat SFIO sortant Charles Goniaux et 4 351 suffrages pour Henri Martel ( application de la stratégie « classe contre classe « ).

En 1936, le candidat de droite arrive en tête au premier tour avec plus de 10 000 voix mais Henri Martel est en tête à gauche et remporte l’élection au second tour avec 13 296 voix sur 24 550 exprimés et plus de deux mille voix d’avance sur Léon Delsart.

N’ayant pas renié son attachement au PCF après avoir prolongé son activité de délégué mineur en intervenant pendant trois ans en faveur des conditions de vie des mineurs et de leurs familles, Henri Martel est arrêté dès l’automne 1939, et va connaître le même chemin que son collègue Arthur Musmeaux.

Libéré après l’opération Torch en Afrique du Nord, il va reprendre une activité syndicale pour organiser la CGT en Algérie, notamment dans la région d’Oran avant de revenir en France où il exerce simultanément des activités politiques et syndicales au plus haut niveau.

Ayant payé un lourd tribut à la guerre ( ses deux fils furent fusillés par les Allemands ), Henri Martel sera dès 1945 maire de Sin le Noble, puis chef de file des listes communistes dans le département, et notamment sa 3e circonscription, structurée autour du Hainaut et du Cambrésis, où le PCF sera la première force politique tout au long des années de la Quatrième République.

Son parcours parlementaire est notamment marqué par la loi de nationalisation des mines de charbon et ne s’achèvera qu’en 1967, après un échec notable en 1958, dans le contexte si particulier de la naissance du régime gaulliste…

Le dernier des députés communistes du Nord en 1936 est Arthur Ramette, élu sur l’autre circonscription de Douai.

Une circonscription qui ressemble assez fortement, faut il le dire, à celle de Jean Jacques Candelier, dont nous avons eu le portrait chinois il y a peu.

Pourtant, Arthur Ramette est plutôt du Cambrésis, puisqu’il est natif de Caudry, la cité du tulle, ville où, jeune mécanicien, il déploie très tôt une intense activité politique et syndicale qui lui vaut maille à partir avec la justice de l’époque qui assimile souvent assez rapidement mouvement syndical revendicatif et délinquance.

Membre du comité central du PCF dès 1931, dans la foulée de l’arrivée de Maurice Thorez à la tête du Parti, Arthur Ramette est encore en prison quand il est élu député de Douai – Marchiennes en 1932 avec 8 316 voix au premier tour, contre 6 781 voix au radical de droite Debève, 3 096 voix au radical socialiste Lefebvre et 3 080 au SFIO Laurent.
Au second tour, Arthur Ramette obtient 10 717 voix contre 9 951 au docteur Debève, fils d’un ancien député de l’arrondissement.

En 1936, les choses s’avèrent plus simples pour Arthur Ramette.

Etant l’un des rares députés communistes sortants, il est réélu sans difficulté dès le premier tour, en obtenant 11 246 voix sur 21 818 exprimés, laissant loin derrière lui le radical de droite Dufour ( 7 742 voix ) ou le SFIO Lanselle ( 2 257 voix ).

Arthur Ramette déploie une intense activité parlementaire, rapportant notamment sur le budget du Travail, intervenant souvent sur l’ensemble des questions sociales.

Déposant, peu de temps après l’interdiction du PCF, la déclaration de création du groupe ouvrier et paysan sur le bureau de l’Assemblée, Arthur Ramette va connaître une autre destinée que celle de ses collègues.

Fidèle au PCF, il participe à l’organisation de la fuite de Maurice Thorez, celui-ci ayant déserté, vers l’URSS via la Belgique, en étant tout simplement le chauffeur de la voiture emmenant vers Bruxelles le secrétaire général du PCF.

Arthur Ramette sera déchu de son mandat, comme les autres députés du groupe ouvrier et paysan et condamné par contumace.

Revenu en France à l’automne 44, il reprendra toute sa place dans l’organisation communiste du Nord, qu’il contribuera à remettre en place avec le concours de son collègue Henri Martel, entre autres.

Il est notamment le responsable du quotidien communiste issu de la Résistance, Liberté.

Il est réélu député sous la Quatrième République, dans la seconde circonscription du Nord, organisée autour de Lille, où le PCF est moins influent que dans la partie Sud du département.

Il sera toutefois un parlementaire chevronné et actif, ne subissant d’échec qu’en 1951 du fait des apparentements et en 1958 lors de l’isolement du PCF face aux gaullistes.
De 1962 à 1973, il est cependant de nouveau député de la 15e circonscription du Nord, correspondant, comme nous l’avons dit, à peu de choses près, à celle où est élu Jean Jacques Candelier.

Comme cet article a déjà une certaine densité, nous garderons pour un autre article ( au moins ) le cas des députés SFIO de 1936 et celui des élus du Pas de Calais.
Ceci dit, chacun pourra tout de même constater, à la lecture de ces indications, quelque chose qui s’apparente tout de même à un air de déjà vu, ou de quelque chose qui nous dit que ce que nous connaissons aujourd’hui ne tombe pas tout à fait du ciel et s’avère le produit de toute une histoire…
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Re: Elections législatives de 1936

Messagede Zimmer » Jeu 19 Mai 2011 22:22

vudeloin a écrit:Revenu en France, Arthur Musmeaux reviendra en France et sera réélu député du Nord pour toutes les législatures de la Quatrième République puis de 1962 à 1973, où il laissera donc la place à Alain Bocquet.


C'est encore un détail mais cette circonscription du Valenciennois fut conquise, en 1973, par celui qui était alors maire de Saint-Amand-les-Eaux, Georges Donnez, lequel siégera, après son élection comme député, au sein du groupe des Réformateurs démocrates sociaux de l'Assemblée nationale. Membre de la SFIO jusque dans les années 60, il deviendra ensuite l'une des figures du Parti Social-Démocrate (PSD) qui sera l'une des composantes de l'UDF.

Ce n'est qu'en 1978 qu'Alain Bocquet reprendra la circonscription pour le PCF. En 1995, ce dernier prendra également la mairie de Saint-Amand-les-Eaux au même Georges Donnez, alors battu après 42 ans de mandat (il avait été élu maire de la commune, pour la première fois, en 1953). Mais tout ça nous mène là bien loin de 1936. ;)
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Re: Elections législatives de 1936

Messagede vudeloin » Ven 20 Mai 2011 11:13

Si j'oublie Jojo Donnez, le maire référence d'Intervilles, ça va pas le faire !
CEci dit, Alain Bocquet s'est présenté aux élections de 1978 avec une Dame Lefebvre Musmeaux, dont je crois bien qu'elle était liée directement à l'ancien député...
Et préparons nous aussi à l'examen du cas des députés SFIO de 1936 dans le Nord, fort instructif, députés dominés par deux fortes personnalités, Roger Salengro et Léo Lagrange...
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Re: Elections législatives de 1936

Messagede vudeloin » Ven 20 Mai 2011 20:22

Avant d’examiner la situation des différents élus SFIO du Nord en 1936, un petit rappel sur les rapports de forces politiques issus des urnes dans ce département.

Car si les partis du Front Populaire obtiennent 20 des 24 députés du département, ils sont également très influents en termes de voix.

La poussée en faveur du PCF a permis à celui-ci de passer de 2 à 6 élus dans le département, en prenant deux sièges à la SFIO mais aussi deux sièges à la droite.

La SFIO n’est pas en reste, comme nous allons le voir…

En termes de suffrages, on compte 500 234 bulletins exprimés dans les urnes nordistes, sur un total de 569 468 inscrits, c'est-à-dire, tout de même, un taux de 87,84 % de suffrages exprimés !

Signe d’une évidente politisation d’un électorat limité pourtant aux seuls hommes majeurs âgés de plus de 21 ans…

A gauche, le PCF obtient 104 804 suffrages (20,95 %), un nombre de voix et un pourcentage élevé qui fait du département un des points forts du Parti.
Les voix du Nord représentent en effet plus de 7 % des suffrages communistes de métropole et cumulées avec les votes du Pas de Calais, dépassent le dixième des suffrages en question.

La SFIO est le parti politique le plus influent du département.
Le Parti aux trois flèches réalise en effet 161 540 voix dans le Nord (32,29 %) devenu place forte du socialisme.
Ce qui donne au Nord une autre particularité : celle d’être, en 1936, un département où la SFIO et le PCF dépassent ensemble la majorité absolue des suffrages.
Plus de 8 % des électeurs socialistes de 1936 habitent dans le Nord.

Les radicaux sont en voie de disparition dans un département où ils ont maintes fois peiné et totalisent 31 521 suffrages (6,30 %) score très nettement inférieur à leur moyenne nationale et qui ne leur offre aucun élu de la mer à l’Escaut…

Les divers gauche, enfin, réalisant 10 132 voix (2,02 %) complètent une gauche de Front Populaire dépassant les 60 % dans le département.

Le bloc de droite du département dispose de 45 483 suffrages (9,09 %) et souffre de la présence d’un courant de centre droit plus influent, ayant obtenu 146 425 voix (29,27 %) mais que la presse de l’époque ( notamment Le Temps ) constitue de manière un peu hétéroclite en associant à l’intérieur radicaux de droite, républicains indépendants et membres du parti démocrate populaire.

Un PDP qui groupe quelques forces dans la Région mais ne disposera en 1936 d’aucun élu dans le Nord Pas de Calais.

Passons donc à la SFIO, dont nous avons qu’elle avait perdu deux sièges, entre Douai et Valenciennes, face au PCF.

Dans l’Avesnois, la première circonscription, organisée autour du chef lieu d’arrondissement, est détenue depuis 1932 par Léo Lagrange.

Léo Lagrange n’est pas nordiste d’origine ( il est né à Bourg, en Gironde ), et il a fait ses études à Paris ( lycée Henri IV, hypokhâgne, étudiant en droit et à Sciences Po après un stage d’un an dans l’armée où il s’est engagé à dix sept ans ) et il n’est arrivé dans le Nord qu’en 1930.

A ce moment là, le siège est détenu par Louis Loucheur, maintes fois Ministre depuis le début des années 1910 et auteur de la fameuse loi Loucheur qui crée de fait le régime des habitations à bon marché ( HBM devenues plus tard HLM ), c'est-à-dire les logements sociaux à loyers modérés qui vont progressivement constituer le nouveau tissu urbain des villes françaises, à commencer par les portes de Paris et les espaces rendus disponibles par l’arasement des « fortifs « et l’annexion des villages au nouveau Paris.
Sans parler de la nécessité de réduire la « zone « , c'est-à-dire les bidonvilles sans confort construits eux aussi dans les franges de la ville, là où nous avons aujourd’hui une bonne partie du tracé du périphérique parisien…

Louis Loucheur, qui avait commencé sa carrière comme chef d’entreprise ( la fameuse Société Générale d’Entreprises ou SGE, filiale importante de la Générale des Eaux bien des décennies après ), siège sur les bancs de la gauche radicale, c'est-à-dire, en fait, plutôt du côté des gouvernements d’alliance regroupant radicaux et hommes de droite ou socialistes repentis durant les années 20…
Il aura ainsi travaillé autant avec Poincaré que Millerand ou encore Briand.
Et aura manifesté une certaine attention aux questions sociales, puisque, outre la loi sur les HBM, figurent aussi à son actif des textes sur les assurances sociales.

Mais Louis Loucheur meurt en 1931 et la droite ne dispose pas, sur place, d’un candidat ayant les mêmes qualités que lui.
Léo Lagrange est donc élu, arrivant en tête au premier tour avec 7 570 voix ( plus de 40 % des suffrages ) et est élu au second avec près de 700 suffrages d’avance sur le second.
En 1936, Léo Lagrange, dont la personnalité s’est affirmée ( il prend notamment une part importante aux débats lors de la révélation du scandale Stavisky ), arrive de nouveau en tête au premier tour en réalisant 8 167 voix, contre 7 492 voix au second candidat et 1 078 voix au candidat PCF.
Il est élu sans coup férir au second tour avec 9 258 voix contre 7 635 voix pour son adversaire.

Léo Lagrange est nommé sous secrétaire d’Etat aux Loisirs et aux Sports dans le gouvernement Blum.

C’est là qu’il va mettre en œuvre une politique audacieuse et populaire de développement des activités de plein air et de sport, dont nous connaissons encore aujourd’hui bien des manifestations.

Léo Lagrange parvient ainsi à mettre en place les fameux billets de « congés payés « pour les transports ferroviaires, les principes de tarifs familiaux dans bien des lieux de vacances, se rapprochant des syndicats d’initiative et des offices de tourisme surpris notamment par l’accroissement du nombre de vacanciers lié à la mise en place des congés payés.
Il aide aussi au développement des auberges de jeunesse ( dont on rappellera qu’elles furent, au départ, inspirées en grande partie par le catholicisme social ), du camping populaire, de la pratique décentralisée des activités culturelles.
Il jette les bases de l’organisation des sports en France, récusant la domination du sport spectacle, et créant ce qui sera plus tard le Comité national olympique et sportif français, mais aussi l’Institut National des Sports et de l’Education Physique.
Enfin, avec les « clubs de loisirs «, il lance l’amorce de ce que seront les Maisons des Jeunes et de la Culture après la guerre.

C’est un Ministre de son temps et qui, sous bien des aspects, fait entrer la France dans le XXe siècle.

Bien que non mobilisable, Léo Lagrange redeviendra militaire pendant les premiers mois de la guerre.
Et c’est d’ailleurs ainsi qu’il disparaît prématurément, tué dans un village de l’Aisne, Evergnicourt, à une distance finalement assez courte de la région nordiste qui l’avait élu.

La Fédération des clubs Léo Lagrange, qui porte son nom, n’a pas à voir de prime abord avec son œuvre mais elle fut, et encore aujourd’hui, l’un des vecteurs de formation de nombreux cadres socialistes.

Les deux autres députés SFIO de l’Avesnois sont moins connus que Léo Lagrange et c’est peut être dommage.

Le second était Maurice Deudon, député sortant républicain socialiste ( il adhérera à la SFIO pour les élections de 1936 ) et maire de Maubeuge.
Elu en 1932 avec une nette majorité ( 11 820 voix sur 21 233 votants pour lui contre 6 094 pour son premier adversaire ), Maurice Deudon sera reconduit dans ses fonctions en 1936.
Mis en ballottage, il est élu avec 14 020 voix contre 7 928 au candidat de la droite.

Médecin de formation et de profession, il participera activement à la mise en œuvre du programme du Front Populaire, mais finira, comme tant d’élus de la XVIe législature, par voter les pleins pouvoirs à Pétain.

L’invasion allemande, en mai 40, le contraint à se réfugier dans le Sud de la France, et il sera connu, pendant la guerre, comme le médecin du maquis en Dordogne.

Toutefois, son inéligibilité ne sera jamais relevée et il n’aura plus d’activité politique après la Libération.

Le troisième député d’Avesnes, c’est Eugène Thomas, élu sur le secteur du Quesnoy ( entre autres ).

Jeune instituteur, il est élu en mai 1936 en délogeant de sa position le député radical socialiste sortant Lacourt, qu’il domine avec 7 667 voix contre 6 719.
( la circonscription est manifestement plus rurale que d’autres…)

A peine âgé de 33 ans, Eugène Thomas voit le programme du Front Populaire se réaliser en grande partie et apporte son concours à l’adoption de textes sur l’allongement de la scolarité à 14 ans, la création de l’Office du blé et j’en passe.

Mobilisé en 1940, il est fait prisonnier par les Allemands sur la Somme mais parvient à s’évader sans toutefois participer à la réunion du 10 juillet 1940 sur la révision constitutionnelle accordant les pleins pouvoirs à Pétain.

Opposé au régime de Vichy, Eugène Thomas est l’un de ces résistants de la première heure, honneur de la SFIO, à avoir contribué à reconstituer la mouvance et le courant socialistes dans sa région et avoir mené des actions de Résistance à l’ennemi.

Il sera arrêté en 1943 par la Gestapo, torturé et emprisonné pendant neuf mois avant d’être déporté à Buchenwald où il fondera une section socialiste des déportés.
( un camp où existait également une organisation communiste particulièrement active avec le futur Ministre Marcel Paul, entre autres )

Eugène Thomas finit d’ailleurs par participer, au sein de l’organisation clandestine du camp, distant de quelques kilomètres de la ville de Weimar, au comité des intérêts français où il côtoie l’ancien chef de cabinet de Pierre Cot au Ministère de l’Air, Frédéric Manhès, l’ex député socialiste républicain de l’Eure Albert Forcinal et Marcel Paul, déjà nommé, qui sera l’un des Ministres communistes de la Libération et le père de la nationalisation du gaz et de l’électricité ).

Il est donc libéré, avec ses camarades, en avril 1945, par les troupes américaines, avancées jusque dans ce qui fut la villégiature du conseiller aulique Johann von Goethe et était devenu l’un des synonymes des persécutions nazies.

Dès la fin 1945, Eugène Thomas est de nouveau élu député du Nord, sur les listes de la SFIO, dans la troisième circonscription où la force du PCF est la plus importante, ce parti étant mené dans ce secteur par Henri Martel.

Il siégera au Palais Bourbon jusqu’à la fin de la Quatrième République, après une carrière ministérielle qui fera de lui « le « Ministre des PTT de l’époque, mandat exercé en effet à de multiples reprises entre juin 45 et janvier 1959.

A noter qu’ayant été ministre d’un gouvernement De Gaulle à la Libération, c’est aussi en qualité de ministre d’un ministère De Gaulle, qu’il achèvera ses fonctions ministérielles, marquées par le premier développement du réseau téléphonique dans notre pays.

Mais son vainqueur sera aussi gaulliste, en la personne de Paul Bécue, député UNR, soutenu par le MRP, les indépendants et les radicaux, et qui représentera cette partie du Nord jusqu’en 1967.

Allons maintenant à Dunkerque où nous attend le député SFIO, maire de Dunkerque, Charles Valentin.

Avocat âgé de 55 ans au printemps 36, Charles Valentin a attendu son heure.
Sa première candidature date de 1910 où il se contente de 2 540 voix sur 18 974 exprimés.
En 1928, il se retrouve au second tour face à Félix Coquelle, le sortant URD maire de Rosendael, qui ne l’emporte que par 11 539 voix contre 10 332.
La partielle, organisée en novembre 28 après le décès de Félix Coquelle, voit le succès du républicain de gauche Vincent, victorieux avec 10 318 voix contre 10 034 pour Charles Valentin.
L’écart s’est donc réduit et en 1932, la lutte entre les deux candidats reprend.
Vincent l’emporte avec 13 164 voix contre 12 481 voix pour Valentin.

Ces trois échecs, avec un écart inférieur à 1 500 voix à chaque fois, montrent à quel point la façade maritime de la Flandre voit s’affronter des forces d’importance proche, les ouvriers du secteur portuaire s’opposant à l’univers des armateurs et des commerçants qui s’affairent dans les deux ports de Dunkerque et Gravelines.

Le chirurgien dentiste Maurice Vincent sera toutefois battu par Charles Valentin.
En 1936, le candidat de la SFIO arrive en tête au premier tour avec 12 390 voix contre 12 222 au candidat de la droite.
Avec le soutien des voix communistes, en progression dans ce secteur, Charles Valentin est clairement élu, faisant 15 142 voix contre 12 392 au sortant.

Il sera dès lors un député socialiste SFIO attentif au sort des travailleurs de la marine, et au respect des droits des salariés et des droits syndicaux en général.
Il décède cependant, de manière un peu prématurée, en septembre 1939.

Un détour par Cambrai, maintenant où le PS obtient les deux élus de l’arrondissement.

Le premier est relativement connu, il s’agit de Raymond Gernez.

Jeune ébéniste de 30 ans au moment des élections, secrétaire de section SFIO et militant ardent, Raymond Gernez se présente sur la 1ere circonscription du Cambrésis, qui avait déjà voté SFIO en 1932 pour élire d’abord Maurice Camier, un ouvrier mutilé du travail qui mourut à 49 ans en 1933 puis Louis Brodel, un autre élu socialiste, également prématurément disparu en janvier 1936.

Raymond Gernez n’arrive pas en tête au premier tour où c’est un candidat radical de droite, Deltour, qui vient en tête avec 11 288 suffrages.
Le jeune SFIO obtient 6 702 voix, devançant un candidat communiste, Adolphe Glay, maire d’Avesnes les Aubert ( qu’il gratifiait peu de temps avant encore de « braillard moscoutaire « ) 4 486 voix, et Moithy, membre des radicaux Camille Pelletan, 2 291 voix.

Raymond Gernez l’emporte au second tour, grâce au rassemblement des voix de gauche, avec 13 375 voix contre 12 382 au candidat radical de droite.

Bien qu’il vote les pleins pouvoirs à Pétain, il entre dès le début de la guerre dans la Résistance à l’ennemi, et on retrouve sa trace dans de nombreuses actions de résistance dans le Nord comme dans le Sud de la France, notamment du côté de la Provence où son maquis contribue à l’avancée des troupes alliées.

Contrairement à ses prédécesseurs sur le siège, il va gérer pendant de longues années sa ville, Cambrai ( de 1945 à 1977 ) et rester député du Nord, quelque soit le mode de scrutin, de la Libération à 1973.

Raymond Gernez, s’il a voté les pleins pouvoirs à Pétain, a donc fait exception et son comportement pendant la guerre lui a évité, du point de vue de la SFIO, de connaître l’indignité de la mise à l’écart.

Pour autant, il fut de longues années un élu socialiste de tendance assez modérée, très souvent favorable à la troisième force et, surtout, anticommuniste virulent.

Opposé au programme commun et ayant subi l’affront d’avoir été devancé sur Cambrai par le candidat communiste, il laissera peu à peu ses mandats ( députation en 1973, mairie en 1976, conseil général en 1979 ), non sans avoir aussi, quitté un PS dont il ne partageait pas l’option d’Union de la gauche.

A preuve le fait que son retrait en 1973 conduisit à l’élection de Jacques Legendre, l’actuel sénateur UMP du Nord et ancien Ministre, en lieu et place du candidat communiste qui semblait pouvoir être élu sur les résultats du premier tour.

Je crois, sans me tromper de beaucoup, qu’une bonne partie de ceux qui lui succédèrent à la mairie de Cambrai en 1977 étaient déjà élus au sein de son équipe de 1971.

L’autre élu du Cambrésis fut Auguste Beauvillain.

Cet élu, déjà relativement âgé en 1936 ( il était né en 1879 ), était représentant en vins, et était devenu maire de la petite ville ouvrière de Caudry, dans l’actuel canton de Clary, ville consacrée à l’industrie de la dentelle et notamment à cette forme particulière qu’est le tulle.

Il fut élu en remplaçant sur ce siège en partie rural un radical de droite, ancien juge et haut fonctionnaire, Maurice Deligne.
Ayant voté les pleins pouvoirs à Pétain, Auguste Beauvillain fut maintenu dans ses fonctions de maire de Caudry par le régime de Vichy jusqu’à son arrestation, dans le courant de l’année 1942 par les Allemands.

Frappé d’indignité nationale du fait de son vote de juillet 40, sa peine fut relevée en 1947 mais il se contenta, alors, de se présenter comme simple conseiller municipal dans la ville dont il avait été le premier édile pendant 23 ans.

Il ne nous reste désormais que le cas des sept élus SFIO de l’arrondissement lillois.

L’un est très connu, il s’agit de Roger Salengro, alors maire de Lille et élu de la 2e circonscription de Lille, correspondant à la partie Sud, Sud Ouest de la ville.

Après des études brillantes, Roger Salengro, qui a eu la malchance de naître en 1890, se retrouve confronté à la loi de trois ans et à son entrée dans la vie militaire dès 1912 qui va le conduire à connaître en 1915 les épreuves du champ de bataille puis celles de la captivité en Allemagne, suite à sa capture par les Allemands sur le champ de bataille de Champagne ( cet incident donnera lieu à la cabale sur sa « prétendue « désertion qui aura tant d’incidences sur la fin de sa vie et amènera son suicide ).

Rentré en France peu de temps après l’armistice, Salengro reprend ses activités politiques et choisit de rester fidèle à la « vieille maison «, revenant à Lille pour réorganiser la SFIO et prenant, à 35 ans, dès 1925, la suite du maire socialiste Gustave Delory.

Il est élu pour la première fois député en 1928, l’emportant avec 668 voix sur son adversaire de droite.

En 1932, il est reconduit dans ses fonctions dès le premier tour avec 2 800 voix d’avance sur le second.

En 1936, Salengro est réélu au premier tour, en battant son adversaire de plus de 4 000 voix.

Devenu le Ministre de l’Intérieur de Léon Blum, il joue un rôle essentiel dans la crise sociale qui suit la victoire électorale du Front Populaire et qui amène la CGT, réunifiée en 1935, à conduire des luttes syndicales sous la forme inédite de l’occupation d’usines.

Salengro est à la fois le socialiste qui soutient l’action des travailleurs et fait tout pour que les discussions de Matignon portent leurs fruits et le ministre de l’Intérieur qui maintient l’ordre public.

A ce titre, il est en action pour la dissolution des ligues factieuses, ce qui lui vaut la haine tenace des députés comme Ybarnegaray, Des Isnards ( le député de droite du 8e arrondissement parisien ), Xavier Vallat ( le député de droite ardéchois ) ou encore de Taittinger, député du 1er arrondissement, porte parole à peine voilé des Camelots du Roi au Palais Bourbon et qui glissera dans la collaboration pendant la guerre.

C’est à cette occasion que la presse de droite et notamment le journal satirique Gringoire, se déchaîne contre Salengro, victime notamment des attaques du Prix Goncourt 1922 Henri Béraud, passé de l’extrême gauche à l’extrême droite pendant les évènements de février 34 et qui finira par glorifier l’Allemagne nazie et par écrire des textes et des articles où l’anglophobie le disputera à l’antisémitisme.

La presse de droite, à l’époque, qu’il s’agisse des journaux comme le Jour ou l’Echo de Paris, mais surtout des Gringoire, Je suis partout et autres Action Française, diffuse à des milliers d’exemplaires, voire des centaines de milliers.

Comme nous l’avons vu, l’un des adversaires locaux de Salengro, le député Becquart, va reprendre à son compte les accusations portées par la presse de droite et d’extrême droite.

Bien que lavé de tout soupçon par un vote solennel de la Chambre, Salengro se suicidera le 18 novembre 1936.

Il sera remplacé dans les fonctions de député de Lille Sud Ouest par son cadet de quatorze ans, Henri Salengro, élu sans coup férir en janvier 37 avec près de 4 000 voix d’avance sur le candidat de droite.

Mobilisé pendant la guerre de 39 40, Henri Salengro, en permission, votera la révision constitutionnelle de juillet 1940.

Le second député SFIO de Lille, dans la 3e circonscription, fut Louis Masson, un ancien ouvrier imprimeur de 60 ans qui délogea le député de droite sortant, Coutel, en le battant par 8 961 voix contre 8 540 dans une circonscription difficile…

Absent le 10 juillet 1940, Louis Masson n’aura pas laissé d’empreinte essentielle comme député, et reste plus connu comme élu local.
Il décède pendant la guerre, en 1942.

Dans la 4e circonscription, orientée autour de Lille Sud Est, les socialistes font élire Charles Saint Venant, l’emportant de plus de 5 000 voix sur son premier concurrent.

Il succède ainsi au sortant SFIO Alexandre Bracke Desrousseaux, qui ne se représentait pas.

Fils lui-même d’un ancien député socialiste, Charles Saint Venant, militant depuis l’âge de 16 ans, devient maire de Lille à la suite de la tragique disparition de Roger Salengro.

Il vote la loi constitutionnelle donnant les pleins pouvoirs au maréchal Pétain, un vote qui semble avoir mis un terme à sa carrière politique.

Dans la 5e circonscription, organisée notamment autour de Lomme et Haubourdin, les socialistes font élire Eugène Dereuse, fils d’ouvrier, cafetier à Lomme et conseiller général, vaincu en 1932 par le sortant de droite Guillaume des Rotours, fils et petit fils d’une famille de députés du Nord.

A la vérité, Guillaume des Rotours, élu républicain de gauche, était apparenté par cousinage aux Plichon que nous avons vu précédemment à Bailleul comme aux Diesbach dont nous parlerons plus tard pour le Pas de Calais.

Cet élu de droite fut élu sénateur lors d’une partielle en 1935 où il battit le maire socialiste de Douai Charles Goniaux, dont nous verrons qu’il fut battu lors des législatives du printemps 36 par le candidat communiste Henri Martel.

Le siège, laissé vacant, fut donc récupéré par la SFIO et le brave Eugène Dereuse, enfin victorieux, avec 11 070 voix contre 9 296 voix pour son adversaire de droite, pourtant arrivé en tête au premier tour mais victime du rassemblement des voix de gauche.

Déjà sexagénaire, Eugène Dereuse interviendra peu et son nom apparaît dans la liste des parlementaires ayant donné les pleins pouvoirs à Pétain.

Même s’il apporte aide et soutien aux réfractaires du STO, Eugène Dereuse ne reviendra pas dans la vie politique, du fait de son inéligibilité liée au vote de juillet 40.

Il décèdera en 1953 dans sa ville de Lomme.

L’élu de la 6e circonscription est d’un autre profil.

Il s’agit en effet d’Augustin Laurent, qui fut longtemps l’un des élus les plus importants de la SFIO du Nord.

Né d'une famille de mineurs, Augustin Laurent s'engage à 18 ans, en 1914, et se bat sur le front pendant 46 mois. Il est décoré de la Croix de guerre. Après l'armistice, il devient secrétaire de mairie et prend une part active au mouvement socialiste dans le Nord. Il remporte son premier succès électoral en 1931, année de son entrée au Conseil général du Nord.

Aux élections générales de 1936, il est candidat du Front populaire dans la 6e circonscription de Lille. Il est élu au second tour par 11.980 voix contre 9.169 à son concurrent immédiat, sur 21.565 suffrages exprimés. A la Chambre, il s'inscrit au groupe socialiste S.F.I.O. Il fait partie de la commission de la législation civile et criminelle, de celle du travail, enfin de la commission d'assurance et de prévoyance sociales.
Il prend par la même occasion le siège à un radical de droite.

En 1938, il intervient dans la discussion du projet de loi tendant à l'institution de l'office national interprofessionnel du blé ; du projet de loi relatif à la propriété culturale ; du budget des Travaux publics. En 1939, il dépose une proposition de loi tendant à assujettir les ouvriers et employés des usines travaillant les produits de distillation de la houille à la caisse autonome des retraites des ouvriers mineurs et une proposition de loi tendant à la création d'un conseil de prud'hommes dans tous les chefs-lieux de canton.

En juillet 1940, il se solidarise avec les parlementaires qui refusent d'accorder les pleins pouvoirs au maréchal Pétain.

Absent de Vichy le jour du vote des pleins pouvoirs au maréchal Pétain, le 10 juillet 1940, Augustin Laurent manifeste aussitôt son opposition au nouveau régime, et entre parmi les premiers dans les rangs de la Résistance. Dès octobre 1940, il écrit des articles pour L'Homme libre, publication clandestine dirigée par son ami Jean Lebas, à laquelle succédera Quatrième République à la fin de l'année 1941. Courageux, discret et efficace, Augustin Laurent devient secrétaire à l'organisation dans le comité exécutif clandestin du parti socialiste, dont il coordonne l'activité entre la zone d'occupation et la zone libre. Après avoir échappé d'extrême justesse à une arrestation, Augustin Laurent rejoint Lyon en 1942 ; il y siège au comité politique du mouvement Libération-Sud, et prend la tête du réseau France au combat. Augustin Laurent accomplit alors d'incessants aller-retours entre le Nord et le Lyonnais, assurant liaisons, transmissions d'ordres et renseignements, tout en participant à la rédaction, au tirage et à la diffusion de journaux clandestins.

Sollicité pour représenter le parti socialiste au sein du CNR, et encouragé dans cette voie par Léon Blum, Augustin Laurent décline la proposition, afin, dit-il, de mieux concentrer ses efforts sur l'organisation de la Résistance dans le Nord ; c'est à André Le Troquer qu'échoit alors cette responsabilité. En janvier 1944, Augustin Laurent s'établit définitivement à Lille ; il y dirige les activités du comité départemental de libération, changeant sans cesse de logement pour échapper aux recherches de la Gestapo.

Le jour de la libération de Lille, Augustin Laurent, entouré de quelques FFI, prend possession au nom de la République de l'Hôtel de la préfecture. Porté à la tête de la fédération socialiste du Nord, il reprend les rotatives du journal collaborationniste Le Réveil du Nord et créé Nord Matin, dont il assume jusqu'en 1979 la direction politique.

Son action dans la Résistance et son poids dans l'appareil socialiste lui valent d'être appelé par le général de Gaulle le 10 septembre 1944 pour prendre les fonctions de ministre des PTT du Gouvernement Provisoire de la République Française. Augustin Laurent présente sa démission le 27 juin 1945, invoquant les séquelles d'une opération chirurgicale, mais faisant peu mystère de son irritation croissante devant les orientations et les méthodes du général de Gaulle.

Déjà membre de l'Assemblée consultative provisoire, Augustin Laurent se présente le 21 octobre 1945 aux élections pour la première Assemblée nationale Constituante, à la tête de la liste SFIO dans la 2e circonscription du Nord. La liste recueille 124 360 voix sur 451 443 suffrages exprimés, et emporte trois des neuf sièges à pourvoir ; la liste du MRP conduite par Maurice Schumann obtient quatre sièges, et la liste communiste d'Arthur Ramette les deux derniers.

Augustin Laurent est nommé membre de la Commission du travail et de la sécurité sociale et de la Commission des affaires étrangères. Il est l'auteur de plusieurs textes, parmi lesquels deux rapports au nom de la Commission du travail, déposés le 13 décembre 1945 et le 12 février 1946, dans lesquels il plaide avec force pour que soient enfin respectés la loi du 21 juin 1936 limitant à quarante heures par semaine la durée légale du travail et le décret du 27 octobre 1936 fixant le régime des heures supplémentaires : les nécessités de la reconstruction, assurément impérieuses, ne sauraient toutefois justifier que l'on s'affranchisse du principe d'une juste rémunération des heures de travail accomplies au-delà de l'horaire légal.

Avec ses collègues du groupe socialiste, le député du Nord vote les nationalisations et approuve, le 19 avril 1946, le projet de Constitution de la IVe République ; le texte est cependant rejeté par le référendum du 5 mai 1946, ce qui rend nécessaire la convocation d'une nouvelle Assemblée nationale Constituante.

Les élections se tiennent le 2 juin 1946 ; Augustin Laurent conduit de nouveau la liste de la SFIO, qui consolide ses positions, avec 128 900 voix sur 457 801 suffrages exprimés, et retrouve ses trois élus.

Augustin Laurent est de nouveau nommé membre de la Commission du travail et de la sécurité sociale. Il intervient à deux reprises à la tribune de l'Assemblée, le 18 et le 24 septembre 1946 ; déplorant l'incapacité du gouvernement à enrayer les mécanismes inflationnistes et à mettre un terme au marché noir, il se prononce en faveur d'une politique des prix souple mais vigilante : « je pense, moi, que la liberté est un meilleur moyen, qui n'est, sans doute, pas absolu. Je pense que cette liberté doit être contrôlée par l'Etat qui doit en sanctionner les excès ».

Augustin Laurent approuve le nouveau projet de Constitution, voté par l'Assemblée le 28 septembre 1946, et ratifié par référendum le 13 octobre. Il sollicite de nouveau le renouvellement de son mandat lors des élections législatives du 10 novembre. La liste socialiste perd un peu de terrain, avec 113 298 voix sur 453 725 suffrages exprimés ; ses trois députés sortants sont certes réélus, mais dix sièges étaient cette fois à pourvoir, contre neuf lors des consultations précédentes.

Augustin Laurent retrouve la Commission du travail et de la sécurité sociale ; il siège aussi à la Commission des boissons, et est appelé à figurer sur la liste des jurés de la Haute cour de justice. En décembre 1946, Léon Blum l'appelle dans son gouvernement, avec le titre de ministre d'Etat. Il y demeure quelques semaines, jusqu'à la mise en place officielle de la IVe République ; il déclinera par la suite plusieurs propositions de portefeuille ministériel, entendant se consacrer pleinement à ses mandats électifs et à ses responsabilités au sein du parti socialiste.

L'activité parlementaire d'Augustin Laurent témoigne de son intérêt pour les problèmes sociaux. Il dépose ainsi, le 18 mars 1947, une proposition de résolution destinée à modifier le régime des prestations familiales ; le 10 mars 1949, il est l'auteur d'une proposition de résolution destinée à augmenter le taux de l'assistance à domicile versée aux vieillards, infirmes et incurables ; le même jour, il dépose une autre proposition de loi visant à obtenir, pour les travailleurs indépendants les plus modestes, l'exonération des cotisations aux caisses d'allocations familiales.

A l'Assemblée, Augustin Laurent incarne la tradition du socialisme guesdiste, dont le Nord fut l'une des premières terres d'élection.

En 1946, Augustin Laurent est aussi élu président du conseil général du Nord. C'est d'ailleurs pour mieux se consacrer à l'action locale qu'il choisit de ne pas solliciter le renouvellement de son mandat lors des élections législatives du 17 juin 1951.

Après avoir été élu conseiller municipal de Lille en 1953, il en devient maire en 1955, la reprenant des mains des républicains sociaux ; il administre la ville avec une majorité de Troisième force (SFIO, MRP et Indépendants), et l'engage dans une politique urbaine qui se concrétise notamment par la rénovation du vieux quartier Saint-Sauveur - l'actuel quartier de la mairie.

Parlementaire, ministre, élu local, Augustin Laurent est aussi un homme de parti. Secrétaire depuis 1945 de la puissante fédération socialiste du Nord, il échoue en septembre 1946 contre Guy Mollet dans la lutte qui les oppose pour l'accession au poste de secrétaire général de la SFIO ; mais soucieux avant tout de l'unité du Parti, il soutient loyalement, par la suite, le député du Pas-de-Calais. Augustin Laurent n'est toutefois pas homme à renier ses convictions : favorable à la CED, il s'élève en 1952 contre ceux qui, dans son propre parti, s'acharnent à saborder le projet ; il s'oppose en 1956 à Guy Mollet lors de l'affaire de Suez, puis en 1965 à Gaston Defferre, dont il récuse, au nom de l'unité du groupe socialiste, le projet de « grande fédération ». Agé déjà de soixante-sept ans, Augustin Laurent se démet en 1963 de ses fonctions de secrétaire de la fédération du Nord ; quatre ans plus tard, il se retire des instances dirigeantes de la SFIO.

Hostile au cumul des mandats, Augustin Laurent abandonne en 1967 la présidence du conseil général du Nord à Albert Denvers, avant de prendre, deux ans plus tard, la présidence de la Communauté Urbaine de Lille. Il quitte cette présidence en 1971, la confiant à Arthur Notebart ; de même, refusant « d'attendre que ses forces s'endorment sous le beffroi », il cède en 1973 son fauteuil de maire à son premier adjoint, Pierre Mauroy.

Désormais simple spectateur de la vie politique, Augustin Laurent reste passionné par l'évolution d'un parti dont il fut, plusieurs décennies durant, l'un des principaux animateurs. Il décède le 1er octobre 1990 à Wasquehal, dans le département du Nord ; Michel Rocard, alors Premier ministre, salue la mémoire de ce « militant fidèle, qui a parfaitement incarné les vertus du socialisme nordiste à travers les vicissitudes de l'Histoire ».

( ces éléments, trouvés sur le site de l’Assemblée, permettent d’ailleurs de préciser quelques éléments sur les élections ultérieures ).

Dans la 7e circonscription, les socialistes mènent à la députation Jean Lebas, maire de Roubaix, déjà élu en 1932.
L’élection de Jean Lebas est la plus nette de toute sa carrière avec plus de 6 400 voix de majorité.
Jean Lebas qui, comme d’autres élus SFIO , a été longtemps anticommuniste, doit au report des voix PCF son élection brillante.

Jean Lebas est un des ministres essentiels du Front Populaire, tout simplement parce que Léon Blum le choisit comme Ministre du Travail, ce qui signifie que c’est sous sa responsabilité que sont rédigées les lois instituant les congés payés, la semaine de quarante heures, les conventions collectives ou encore la généralisation des assurances sociales.

Jean Lebas quittera ses fonctions de Ministre du travail en 1937, devant le refus du Sénat de laisser au gouvernement les moyens exceptionnels de sa politique.
Il sera ensuite Ministre des PTT, jusqu’en 1938 où les ministères de Front Populaire sont de plus en plus radicaux et de moins en moins socialistes.

Engagé dans la Résistance ( notamment pour permettre aux aviateurs anglais abattus de retourner dans leur pays ), Jean Lebas sera arrêté en mai 1941 par la Gestapo puis incarcéré à la prison de Loos et ensuite envoyé en Allemagne.

Il connaît la forteresse à Charlottenburg, à côté de Berlin avant d’être condamné aux travaux forcés par un tribunal allemand et placé dans le camp de Sonnenburg.

Il y meurt de maladie et de privations en mars 1944.

Cette destinée tragique, qui ne sera connue en France qu’après la Libération, fera l’objet d’une cérémonie commémorative officielle en 1951…

Enfin, dans la 8e circonscription du Nord, également organisée autour de Roubaix, la SFIO va obtenir la réélection du docteur Léandre Dupré.

Médecin du peuple, promoteur de nombreux dispensaires d’hygiène dans la ville de Roubaix ( historiquement marquées par les courées, ces habitats ouvriers lépreux et insalubres dédiés aux ouvriers des filatures et des tissages ), Léandre Dupré fut adjoint au Maire de Roubaix ( de fait Lebas ) tout en étant député SFIO élu en 1932 face à Thellier, le candidat des patrons du textile, battu alors de près de 4 000 voix et fut réélu en 1936 face à Derycke, battu de plus de 6 000 voix.

Ne prenant pas part au vote du 10 juillet, Léandre Dupré se retrouvera dans le Midi ( en l’occurrence replié sur Sète ) pendant la guerre.

Fort âgé ( il avait déjà 65 ans en 1936 ), il sera appelé à siéger dans la délégation provisoire de la ville de Roubaix mise en place à la Libération.
C’est d’ailleurs à ce titre qu’il sera, de nouveau, élu local de la cité textile, en redevenant adjoint au Maire en 1945 et 1947.
Un mandat que son décès en 1951, à l’âge de 80 ans, ne lui permettra pas d’achever.

Comme on le voit, la destinée des élus socialistes de 1936 dans le Nord a été fort variable.

Au tragique destin de Salengro ou de Lebas, répondent les longues carrières de Raymond Gernez ( pourtant favorable au vote donnant les pleins pouvoirs à Pétain ) et d’Augustin Laurent ( l’un des 80 ayant voté contre et ayant pris une part active à la Résistance ).

Et nous avons les quasi anonymes, Beauvillain, maintenu dans ses fonctions par Vichy ou Dereuse, disparu de la vie publique après guerre, sans parler de Charles Saint Venant, qui ne semble plus avoir joué le moindre rôle après la Libération, et dont le nom figure pourtant dans l’annuaire des rues de Lille.
Pour un motif très simple : c’est que son père, portant le même patronyme, fut aussi élu de Lille…

Et nous avons aussi les relations souvent complexes avec les communistes, l’autre grande famille de la gauche nordiste.
Parce que bon, 1936 marque peut être le grand succès de la SFIO sur Lille ( 7 élus sur les 10 de l’arrondissement ) mais deux sièges sont perdus ailleurs au profit du PCF dans le Valenciennois et cela ne peut convenir…

Bref, bien des éléments d’un débat dont nous retrouvons les traces encore aujourd’hui…
Un regard sur la géopolitique nordiste montre d’ailleurs que les rapports de forces de 1936, l’influence des uns et des autres trouve encore écho aujourd’hui...
vudeloin
 
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Re: Elections législatives de 1936

Messagede Jean-Philippe » Ven 20 Mai 2011 21:18

vudeloin a écrit:Hostile au cumul des mandats, Augustin Laurent abandonne en 1967 la présidence du conseil général du Nord à Albert Denvers, avant de prendre, deux ans plus tard, la présidence de la Communauté Urbaine de Lille.


J'ai déjà signalé cette erreur au site de l'AN qui n'en a pas tenu compte, mais je le redis ici, c'est Victor Provo, le maire de Roubaix qui lui succède à la tête du conseil général de 1967 à 1973, Albert Denvers leur succédant de 1973 à 1985.
Jean-Philippe
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