Distinguons déjà les référendums en fonction de qui les convoque:
-le référendum à l'initiative de l'exécutif ou de la majorité parlementaire, autrement dit du pouvoir. Il peut être utile pour renforcer la validation d'une décision ou pour trancher une question qui s'y prête mais présente inévitablement un aspect plébiscitaire puisque c'est "le chef" qui pose la question et se voit un brin désavoué si la réponse ne correspond pas à sa consigne.
-le référendum d'initiative dite "populaire" qui est en fait un référendum d'initiative partagée entre des parlementaires et les électeurs, avec un double seuil de déclenchement de part et d'autre. Il est inscrit dans la Constitution depuis la révision de 2008 mais ses textes d'application ne sont pas en place sauf erreur et il n'a toujours pas été utilisé... Concrètement, il ouvrirait une issue à des opposants parlementaires déterminés (et pas trop isolés).
-le référendum d'initiative citoyenne proprement dit, dont le seuil de déclenchement dépendrait uniquement de la collecte de signatures de citoyens. Il nécessiterait de toute façon une modification constitutionnelle, au moins pour une application nationale, cette modification pouvant aussi porter sur les sujets pouvant être soumis à référendum. Le minimum serait qu'il puisse porter sur tous les sujets actuellement permis mais ce ne serait probablement pas suffisant. Il pourrait être logique que tout sujet pouvant être porté à la décision des représentants du peuple puisse l'être à celle des représentés, dont émane la souveraineté. L'intérêt peut être de pouvoir diminuer le pouvoir ou les avantages de certains élus sans avoir à croire certains candidats prétendant baisser leurs prérogatives une fois en place.
-la démocratie directe à proprement parler, où c'est le peuple qui vote directement sans avoir à le réclamer à chaque fois. En pratique, cela peut être à un point précis du processus de décision, par exemple pour validation des textes avant mise en application. Il peut aussi s'agir d'une dose de démocratie directe avec, au milieu des sièges classiques d'élus, des sièges parlementaires (notamment) dont le vote dépend d'un vote des citoyens, reporté soit majoritairement soit proportionnellement.
Par rapport aux programmes, notamment aux programmes présidentiels à rallonge puisque cela a été évoqué, des référendums ou votes directs ont de l'intérêt:
-pour laisser une question en suspens dans un programme tout en affirmant la nécessité d'un débat dessus (ex. position de Mélenchon en 2012 sur le nucléaire) - souvent parce que cette question est déjà clivante dans le camp du candidat...
-pour traiter une question nouvelle apparue après l'élection (ex. le TCE, dont le texte détaillé n'était pas du tout prêt lors de la présidentielle de 2002)
-pour ne pas enfermer l'électeur dans les programmes: il est difficile de ne pas trouver, à force, de point gênant voire quasi-bloquant dans un programme en plusieurs dizaines de points. Il est certes tentant pour l'élu de considérer que le peuple entier a validé chacun des points de son programme mais la réalité est plus complexe...
Quant aux points sur lesquels peut porter un référendum, il peut s'agir
- d'un référendum révocatoire (surtout envers l'exécutif dirais-je, sur un parlementaire d'opposition isolé ça a effectivement moins de sens - et sur un parlementaire ça n'a vraiment de sens que si on est dans une circonscription et qu'on considère qu'il ne représente que celle-ci)
-de référendums législatifs ou constitutionnels, ce second cas étant en fait un cas particulier (la Constitution est simplement, en un sens, une loi de statut et niveau supérieur, d'où le dernier article de la nôtre) où il faudrait possiblement des seuils plus élevés, avec notamment la possibilité de propositions de lois citoyennes (pour pousser le débat voire le vote de propositions dont les élus ne voudraient pas), de référendums abrogatoires pour bloquer l'adoption de lois votées par un Parlement pas forcément bien représentatif (s'il l'était, aucun référendum abrogatoire ne pourrait réussir). Ainsi que de référendums pour adopter des lois ou des révisions constitutionnelles, ce qui est relativement plus habituel pour nous.
cf.
https://www.change.org/p/pour-un-r%C3%A ... -citoyennehttps://www.mesopinions.com/petition/po ... atie/44693Parmi les arguments contre le RIC, beaucoup reviennent à dire que le peuple est trop bête pour décider... mais si c'est le cas, ce devrait m'être aussi de ses représentants... En tous cas, le passage d'interview d'E.Philippe sur le sujet est fort conciliant et positif de prime abord ("Je ne vois pas comment on peut être contre son principe"), même s'il veut notamment limiter les sujets (ce qui semble presque un non-sens: certains sujets méritent-ils une moindre dose de démocratie que d'autres?). Une avancée semble possible de ce côté, même si elle peut être trop timide.
Ceci dit, localement, cette revendication de RIC semble non prioritaire aux habitués du barrage le plus proche (l'un des proches demandant même si cette vague pro-RIC est un coup du gouvernement!) tant elle peut être amoindrie par une restriction des sujets possibles ou un seuil trop élevé. A quoi l'on pourrait ajouter la possibilité de défaire par vote parlementaire le résultat d'un référendum (cf. TCE/traité de Lisbonne...). La première revendication à mettre en avant semblant plutôt être le retour de l'ISF.
La représentation proportionnelle peut être un autre point important: a contrario, les modes de scrutin plus ou moins majoritaires créent une distorsion qui rend l'assemblée non représentative dès le départ.
Par ailleurs, va se re-poser au fil de ce mandat le décalage dans le temps lié à l'arrivée de nouveaux électeurs, jeunes surtout (pmf fait bien de noter que le corps électoral est déjà une approximation du peuple - et encore plus, ajouterais-je, de la population, qui inclut les étrangers). La baisse des aides au logement notamment pour les jeunes par changement du mode de calcul (ou le CPE dans un mandat précédent...) (cf.
https://www.lemonde.fr/societe/article/ ... _3224.html , déjà cité dans le forum) est un cas typique puisqu'elle va toucher en partie des jeunes qui n'avaient pas 18 ans aux législatives. La démocratie directe ou les référendums sont un moyen d'éviter cela (un autre pourrait être d'ajouter les voix des jeunes au fur et à mesure jusqu'à éventuellement inverser le résultat de leur circonscription).
En tous cas, il serait logique que cette "crise des gilets jaunes" débouche sur des éléments de réforme constitutionnelle ou institutionnelle (une réduction du nombre de parlementaires ou l'introduction de proportionnelle pouvant se faire sans modifier la Constitution actuelle).
Ceci dit, le vrai enjeu est que le pouvoir et les "gros" économiquement écoutent les "petits" et à l'heure des violations manifestes du droit de manifester et du démantèlement des rond-points, c'est loin d'être gagné ou fini...