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Débattons sur le mode de scrutin

Forum général sur l'actualité politique du moment. Discutez ici de l'action de la Présidence, des décisions gouvernementales, des projets ou propositions de lois ainsi que de toutes les démarches de l'opposition.

Re: Débattons sur le mode de scrutin

Messagede oldeagle » Lun 2 Juil 2018 08:38

Artisan-Politologue a écrit:Bonjour à tous

Je reprend ici une partie de réponse un peu hors-sujet apportée dans un autre forum,

Le mode de scrutin est un passionnant débat.
J'aurais tendance à renvoyer dos-à-dos le mode actuel, qui permet certes de dégager des majorités (mais pas systématiquement, CF les élections de 1988) mais provoque un effet-loupe injuste (80 % des sièges RPR-UDF en 1993 avec 44 % des voix, 15 sièges pour un PCF à 3 % en 2007) et lamine les partis autres que l'UMP et le PS qui représentent pourtant... 50 % des électeurs, et la proportionnelle intégrale qui ouvre la voie à l'ingouvernabilité, même avec un seuil à 5 %.
Je ne suis pas non plus partisan d'un scrutin mixte qui créerait une Assemblée à deux vitesses.
Alors que faire? Si on veut être plus juste, il faut compliquer la donne. Inventer de nouveaux modes, comme la qualification obligatoire au second tour, et sans seuil de participation, des quatre candidats arrivés en tête. Ou une proportionnelle donnant à la liste arrivée en tête 40 % de voix en plus, et 25 % à la seconde, les autres se partageant le reste. Ou bien une proportionnelle intégrale avec possibilité de panachage. Dernière piste possible: jouer sur les deux chambres. Garder le mode actuel pour l'Assemblée et élire le Sénat à la proportionnelle intégrale. En plus de mettre fin au système des grands électeurs, cette solution aurait l'avantage de combiner les deux modes.
D'autres solutions existent certainement. A vos claviers!

Manu


Vos propositions sont intéressantes. J'ai envie de dire qu'aucun système n'est parfait. Un système proportionnel est toujours dangereux car cela provoque l'ingouvernabilité du pays. La France a-t-elle les moyens d'être ingouvernable ? Le système majoritaire actuel n'est pas parfait, mais au moins il assure la stabilité de la majorité à l'assemblée et donc permet au gouvernement de gouverner. La proportionnelle donnerait plus de sièges aux partis comme LFI ou RN. Je dois rappeler ici aux internautes qu'à cause de la proportionnelle intégrale et de l'instabilité de ce système, Hitler a pu parvenir au pouvoir en 1933 !
Jamais les nazis seraient venus au pouvoir si il y avait eu un système majoritaire en Allemagne.

La proportionnelle peut être bien, à condition que le nombre de partis politiques soient limités. Plus il y a de partis politiques, plus il y aura un émiettement des sièges (tout le monde aura sa part du gâteau), et du coup plus difficile sera d'obtenir une majorité permettant de gouverner.

Pour reprendre l'exemple de l'Allemagne ou de l'Espagne, voire de l'Italie, pourquoi cela fonctionne plus ou moins ? Pourquoi le gouvernement peu gouverner tant bien que mal ? Tout simplement parce qu'il existe que 4 partis politiques ! En France, établir une proportionnelle serait mortelle car nous avons plus de 10 partis politiques ! C'est beaucoup trop !
oldeagle
 
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Re: Débattons sur le mode de scrutin

Messagede Eco92 » Lun 29 Oct 2018 10:39

Je copie colle un post fait dans la "vie politique canadienne" car je pense qu'il peut intéresser des gens ici qui ne le lisent pas forcément.
Eco92 a écrit:Et c'est une transition parfaite pour mon prochain post qui parlera du référendum sur le mode de scrutin actuellement en cours en Colombie Britannique !


Et donc oui bien qu'ayant été en élections municipales la semaine dernière la Colombie vote sur son mode de scrutin. La réforme a été annoncé dès la prise de pouvoir des néodémocrates (NPD) sur les libéraux, il faut dire que le NPD a un siège de moins que les libéraux, mais grâce au soutien des trois députés verts (puis d'un libéral devenu président de l'assemblée contre son camp, leur retirant une voix), il peut gouverner pour 4 ans. Parmi les exigences des verts, outre celles sur les pipelines, il y avait une réforme électorale vers plus de proportionnelle. Elle est donc en cours.

Après un comité qui s'est réuni pour en définir les contours et six mois de débats, le vote a lieu par voie postale durant plus d'un mois (du 22 au 30 novembre). Chaque électeur a reçu son bulletin et un livret d'explication plutôt bien fait (version française ici https://elections.bc.ca/docs/referendum/translations/2018-referendum-voters-guide-French.pdf) et doit donc renvoyer son vote, sans frais pour lui bien sur. Ces conditions de votes ont été adopté car elles seraient les meilleures en terme de participation, et permettent une longue durée de vote (les électeurs reçoivent leur matériel entre le 29 et le 2).

L'enjeu ne mobilise pas les foules et les propositions sont complexes, je vous avoue que j'ai du mal à saisir toutes les subtilités, et je suis passionné de politique donc j'imagine le citoyen lambda, après je ne suis pas électeurs donc je me suis penché récemment sur la question. En tous les cas j'aime bien cette construction en deux temps et j'apprécie quand même cette envie de croire en l'intelligence des électeurs.

Le référendum est en deux temps, une première question demande si l'électeur préfère un mode de scrutin uninominal à un tour (actuel) ou un scrutin proportionnel, la seconde question entre en jeux si le proportionnel est choisi et demande de classer son mode favoris entre trois (on peut bien sur dire qu'on préfère l'uninominal mais choisir un système proportionnel, il est aussi possible ne ne choisir qu'un mode proportionnel, ou de ne répondre qu'à une des questions).

Les trois choix proposés sont :
-la représentation proportionnelle binominale (RPB);
- la représentation proportionnelle mixte (RPM) ;
- la représentation proportionnelle rurale-urbaine (RPRU).

Ce sont des choix complexes, seule la deuxième option est appliquée dans le monde à ce jour, je vais tenter de les expliquer mais encore une fois le guide les explique bien et en détail.

Représentation proportionnelle binominale : Les grandes circonscriptions rurales ne bougent pas et conservent un députés, les circonscription urbaine ou semi-urbaine offrent deux choix, les partis peuvent y présenter un ou deux candidat (en précisant quel est leur n°1 et n°2). Les électeurs votent sur un seul nom : le candidat en tête est élu (y compris si c'est un indépendant), le deuxième siège est attribué à un parti en fonction des suffrages exprimés remportés par ce parti à l’échelle de la province et de ses résultats dans chaque circonscription, pour obtenir un siège proportionnel il faut que le parti ait au moins 5% à l'échelle de la province. De ce que j'en comprend c'est une sorte de proportionnelle corrective à l'allemande mais avec des sièges sanctifiés en rural avec application de la proportionnelle (y compris avec les résultats des ruraux) uniquement sur les circos urbaines et semi-urbaines.

- Représentation proportionnelle mixte (RPM) : C'est pour le coup directement le système allemand ou écossais, il y a redécoupage et deux types de députés (un par circo, un sur liste par région). Plus simple à comprendre mais si ce système est adopté on ne sait pas encore s'il y aura un vote (un vote pour un candidat compte pour son parti sur la liste régionale) ou deux (On vote pour un candidat de sa circo et pour une liste régionale, seuil de 5%, à mes yeux plus juste car on peut vouloir soutenir un candidat mais pas son parti, etc.).

- Représentation proportionnelle rurale-urbaine (RPRU) : il s'agit d'une combinaison de la méthode précédente avec le scrutin à vote unique transférable. Il distingue, comme le premier, les circonscription urbaines et semi-urbaines des rurales. Pour les premières, il y a un bulletin en vote unique transférable, l'électeur a la liste de tous les candidats et les classe, au fil du dépouillement on retransfère les voix des battus au deuxième choix de leur électeurs, puis choix suivant, etc, jusqu'à ce qu'on ai un ordre de sortie correspondant au nombre de sièges à pourvoir. Dans les circonscriptions rurales on applique la représentation proportionnelle mixte soit des élus par circos et une liste régionale.

On note que selon les cas on a des députés élus dans la même assemblée avec deux, voire trois, façon de voter différentes. Et pourquoi pas hein ? J'imagine que le distingo rural/urbain est fait pour des questions de taille et de représentativité, autant j'en comprenais la logique dans le point 1 autant je comprend moins pourquoi on ne pourrait pas faire de transférable là-bas, pas assez de candidats ? Meilleure représentation avec de la proportionnelle ? (il est vrai que le transférable ce n'est pas de la proportionnelle, le vote mixte permet de garder des députés par territoires question moins sensible en ville).

Quelques garde fous sont posés si le mode de scrutin change :
- le nombre de député varie entre 87 (nombre actuel) et 95 députés selon les redécoupages ;
- Aucune région de la province ne peut avoir moins de députés qu'aujourd'hui après le redécoupage ;
- Un autre référendum sera organisé après deux élections provinciales pour s'assurer que les habitants veulent conserver le mode de scrutin.

On notera que dans un sondage réalisé fin septembre, le résultat était plus ou moins flou : 31 % des sondés souhaitaient garder le système uninominal à un tour, 33 % passer à un mode proportionnel et 33% ne savaient pas vraiment quoi choisir !
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Re: Débattons sur le mode de scrutin

Messagede Républicain67 » Lun 29 Oct 2018 18:38

Que pensez-vous de la clé d'Impériali, utilisée en Belgique pour les élections communales et provinciales. ttps://www.rtbf.be/info/belgique/detail_des-majorites-absolues-avec-40-des-voix-aux-communales-on-conserve-une-methode-qui-favorise-les-grosses-listes?id=10050937

Une représentation entre la proportionnelle et le scrutin majoritaire, qui permet de dégager facilement des majorités, mais a le désanvantage de favoriser les grandes listes, majorité des sièges dès 40% environ.
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Re: Débattons sur le mode de scrutin

Messagede Azertyuiop » Lun 29 Oct 2018 19:59

Républicain67 a écrit:Que pensez-vous de la clé d'Impériali, utilisée en Belgique pour les élections communales et provinciales. ttps://www.rtbf.be/info/belgique/detail_des-majorites-absolues-avec-40-des-voix-aux-communales-on-conserve-une-methode-qui-favorise-les-grosses-listes?id=10050937

Une représentation entre la proportionnelle et le scrutin majoritaire, qui permet de dégager facilement des majorités, mais a le désanvantage de favoriser les grandes listes, majorité des sièges dès 40% environ.

Comme je l'ai dit dans le sujet consacré aux communales belges, la clé d'Imperiali n'est qu'un cas particulier d'un mode de scrutin que j'ai proposé après les législatives et qui a déjà été débattu ici. Lui a été reproché une certaine complexité et ça pourrait en effet coincer quand il s'agirait d'expliquer ça au grand public.

Parce que dire que la clé d'Imperiali donne une majorité dès 40% des voix, c'est un très, très, très gros raccourci. Ça ne fonctionne que s'il n'y a que quelques dizaines de sièges à pourvoir. Sur 577 députés, utiliser la clé d'Imperiali reviendrait à utiliser la représentation proportionnelle par plus forte moyenne classique. Pour qu'il y ait un effet sur une si grosse assemblée, il ne faut pas commencer par diviser par 2 mais par un nombre bien plus élevé.



PhB a écrit:Ce mode de scrutin très ingénieux a aussi attiré mon attention.

Son intention est assez proche de celle du scrutin régional ou municipal à prime majoritaire, que le programme du FN prévoit d'ailleurs de transposer aux législatives, sous l'appellation fallacieuse de "proportionnelle intégrale". Il s'agit bien entendu d'un scrutin de type MAJORITAIRE et non proportionnel puisque la prime à la liste arrivée en tête lui garantit de disposer d'une large majorité dans l'assemblée même avec un score médiocre. C'est d'ailleurs l'objectif commun à tous ces systèmes : éviter une trop grande dispersion idéologique de la majorité au sein de l'assemblée élue, ainsi qu'une trop grande vulnérabilité face à des micro-partis qui "vendent" leurs voix et profitent de leur position de charnière pour imposer leurs vues (souvent sur un thème précis, comme des lobbies), comme on peut le constater en Israël (ou le cas récent des basques en Espagne pour le vote du budget).

Un inconvénient majeur du système à prime majoritaire est de donner toutes les clefs du pouvoir au parti arrivé en tête, quel qu'il soit. Ce n'est certes pas trop dramatique pour une municipalité, mais ça peut devenir très dangereux pour les élections nationales d'une démocratie, surtout si le parti en question en profite ensuite pour instaurer un régime moins démocratique...

La proposition d'Azertyuiop est plus progressive puisque la prime est fonction du score et accordée (ou retirée) à tous les partis. Il faut donc que le parti arrivé en tête obtienne un score significatif pour obtenir les pleins pouvoirs. J'y vois cependant encore plusieurs défauts :
* d'une part je suis attaché aux systèmes électoraux simples et clairs, ne serait-ce que pour éviter de prêter le flanc aux soupçons de magouille électorale. Malgré sa grande finesse mathématique, le scrutin de type Sainte-Laguë inversé avec pas réduit est très complexe à expliquer, à comprendre et à utiliser. Le recours à un ordinateur est incontournable, ce qui est problématique.
* ensuite ce système, en favorisant les plus gros, pousse les "petits" et les "moyens" à se coaliser sans réelle cohérence. L'"alliance de la carpe et du lapin", qui ratisse large, sera favorisée face au "parti des mésanges", qui est pourtant plus cohérent.
* par ailleurs je suis attaché aux scrutins en deux tours, car ils permettent aux électeurs d'apporter une correction à leur expression selon les résultats du premier tour : remobilisation d'abstentionnistes, changement de vote... On a souvent pu le constater en France, les tendances du premier tour sont fréquemment modifiées au second, entre autres pour amoindrir un raz-de-marée annoncé. À l'inverse, les scrutins de type "FPTP" à l'anglo-saxonne (First Pass The Post), où le premier arrivé au premier (et unique) tour est élu quel que soit son score, peuvent aboutir à des bascules d'assemblées encore plus spectaculaires et brutales (par exemple au Canada...).

Concernant les principaux défauts de ce mode de scrutin qui ont été soulevés, celui de la complexité est évidemment réel, mais expliqué non pas avec un pas dans les divisions successives mais en commençant par diviser par un nombre plus important (par exemple 50) et en prenant ensuite un pas de 1 comme pour la méthode d'Hondt, ce serait peut-être plus clair du coup ?
Le second défaut n'en est pas un pour moi, mais plutôt une vertu car même si alliance de la carpe et du lapin il y a, elle se fait avant passage devant les électeurs et ces derniers pourront trancher. Avec un scrutin proportionnel normal, des partis peuvent s'allier après élections sans que les électeurs n'aient avalisé une telle alliance. Avec ce scrutin, ils le pourraient toujours mais au prix de pas mal de sièges et c'est plutôt un point positif.
Concernant le troisième défaut, notez qu'une version à deux tours pourrait fort bien exister avec qualification pour le second tour des listes ayant franchi un certain seuil.
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Re: Débattons sur le mode de scrutin

Messagede cevenol30 » Ven 30 Nov 2018 09:46

Ce système d'Impériali est en effet intéressant et pas trop hyper complexe. Mais il présente l'inconvénient de trop ressembler à une proportionnelle sans en être une, ce qui est finalement source de confusion (notamment en Belgique où les autres élections sont des proportionnelles "pures" mais souvent avec seuil). Notons aussi qu'il est appliqué, en Belgique, sans seuil préalable et qu'il sert en partie à compenser l'absence de seuil en barrant tout de même l'accès aux petites listes éventuellement farfelues ou extrêmistes (la Wallonie est un des endroits d'Europe où l'extrême-droite notamment fait de tout petits scores).
Les deux manières plus classiques de brider/fausser un peu la proportionnelle étant de mettre un seuil (ce qui non seulement élimine les petites listes mais gonfle de ce fait la proportion de sièges obtenues par toutes les grosses et moyennes listes dépassant le seuil) et/ou une prime majoritaire (qui gonfle le nombre de sièges de la seule liste majoritaire), ces deux méthodes ayant l'avantage de ne pas avoir à bouger les paramètres selon le nombre de sièges (même si des proportionnelles à seuil de 5% avec moins de 20 sièges rajoutent une barrière). La méthode Impériali donne un peu ces deux effets mais de moins en moins quand le nombre de sièges augmente, d'où le besoin de "jouer" sur le paramètre du premier coefficient...

En tous cas, l'enjeu d'une élection d'une assemblée n'est pas seulement de désigner un bloc majoritaire mais aussi de répartir les sièges au sein des blocs et en particulier entre les minoritaires... puisqu'une des oppositions d'aujourd'hui sera probablement la majorité de demain (une démocratie normale connaissant des alternances - d'ailleurs même une dictature n'est pas éternelle mais c'est une autre question). A ce titre, favoriser la représentation des plus importantes listes d'opposition peut être une piste. A contrario, freiner l'émergence de nouvelles petites formations peut retarder l'irruption d'idées neuves...
La problématique entière serait en fait: dégager une majorité et des minorités représentatives.

Dans un mode de scrutin pour une assemblée, se pose aussi la question de la représentation de diverses parties de la population, ce qui suit l'idée de délégation: mon meilleur délégué est celui qui va voter comme je le ferais, ce qui implique un certain degré de ressemblance avec l'électeur y compris dans ce qui sous-tend les décisions. Plus on s'éloigne de cela, plus on peut courir le risque de demander à l'électeur de "manger son chapeau" dès le moment du vote.
Pour tout ce qui est répartition par sexe, niveau de revenu, façon de penser surtout... la proportionnelle par listes est la meilleure, d'une part en permettant de voter pour la liste dont on se sent réellement plus proche sans effets de vote "inutile" (on pourrait définir celui-ci comme un vote n'ayant pas de chance prévisible d'aboutir à un élu... ce qui démotive) ou "utile", d'autre part en permettant une représentation de la diversité de l'électorat de chaque liste au fil de la composition de celle-ci.
Pour des différences liées aux diverses parties du territoire et à leurs réalités et intérêts différents (voire divergents...), la proportionnelle par listes a encore son intérêt en fait (les très rurales candidatures de chasseurs n'ont jamais si bien réussi qu'à des européennes ou régionales à la proportionnelle...) mais on tend à vouloir avoir au moins en partie des élus un peu ancrés dans des territoires qu'ils connaissent et où ils peuvent tenir des permanences de proximité. Se repose alors la question des circonscriptions (fût-ce en mode de scrutin mixte), de scrutins de listes par sous-parties du territoire (par département ou région, par Etat fédéré pour la représentation fédérale quand c'est le cas - là c'est plus logique) ou de listes à sections comme à nos régionales (c'est certes compliqué en détail mais pas trop dans les grandes lignes: "tu votes pour ta section de liste mais aussi pour le reste" et permet de concilier une répartition précise et une représentation territoriale).

Un scrutin en deux tours permet de regrouper éventuellement des listes au vu (idéalement au prorata) de scores réels et de remobiliser, notamment "contre" il faut bien le dire. Là, il faut distinguer:
- les "contre" quasi-absolus liés à une grande incompatibilité de fond avec une candidature qui réussit relativement bien: là, il faudrait éventuellement que le mode de vote (classement, note) permette de l'exprimer dès le premier tour (les révulsions aussi, et non pas seulement les adhésions, font partie d'un processus de décision, d'autant qu'on est souvent plus sûr de ce qu'on ne veut pas que de ce qu'on veut...)
-les "contre" plus relatifs liés au niveau trop élevé d'un camp à l'issue du premier tour, d'autant qu'il peut y avoir un enjeu à ce que ce camp, même majoritaire, ne le soit pas trop (besoin ou non d'écouter ses diverses tendances, possibilités de modifications d'ampleur et notamment constitutionnelles pour un Parlement -sur la législature 1993-97, un seul camp avait la possibilité de voter des révisions en Congrès): là, il est plus spécialement utile d'avoir un second tour pour "corriger le tir" en connaissant les scores réels. En pareil cas, il peut être utile que le scrutin soit par listes et non en duels locaux.
Il serait aussi souhaitable d'éviter une trop grande déperdition entre les voix des listes présentes au premier tour et celles présentes par éventuelle fusion au second à cause de la non-atteinte du seuil de fusion (classiquement 5%), du seuil de maintien (10% ou 7) ou encore de la non-poursuite de la liste pour cause de barrage (ce qui là aussi revient à des questions de contre absolu et de seuil non atteint même s'il est plus flou). Ces pertes écornent l'aspect proportionnel du scrutin même si elles rajoutent de l'enjeu au second tour (avec des exprimés du premier tour à répartir...).

Au total, il me semblerait intéressant d'avoir comme base le mode de scrutin des régionales (proportionnelle à forte dose et prime majoritaire de moins de 50% des sièges, représentation locale, second tour obligeant à assumer les alliances devant les électeurs) mais avec des modifications telles que:
-abaissement du seuil de maintien de listes (7% comme en Corse et non 10)
-répartition d'une partie des sièges dès le premier tour au vu des scores de celui-ci entre les listes ayant atteint le seuil de fusion (voire partie proportionnelle sur le premier tour et primes sur le second, cf. ci-après)
-adaptation des primes de second tour avec aussi une prime aux premiers opposants (ex. 35% pour le premier, 10% pour le second, aucune prime pour les suivants)
-facilitation des fusions (car fusionner des listes longues à sections multiples est complexe): soit délai allongé pour déposer les listes fusionnées (4 jours au lieu de 2?) et entre les deux tours (2 semaines comme aux présidentielles afin de bien réfléchir au choix restant), soit fusion au prorata pur i.e. répartition des sièges réellement obtenus au sein de l'ensemble de listes fusionné au prorata des scores du premier tour.
-mode de vote permettant l'expression de préférences ou aversions éventuellement multiples (p.ex. chaque électeur a 160 points positifs et 60 négatifs à répartir entre toutes les listes, ou plus simplement 160 à donner à sa liste préférée et -60 à une autre et à la fin on compte)

Un autre mode de scrutin intéressant est l'actuel en vigueur en Italie: vote pour une coalition matérialisé par un vote pour un candidat en circonscription et vote proportionnel avec choix interne éventuel au sein de la coalition choisie. On peut y ajouter un second tour en circonscription (pour éviter l'effet "FPTP" avec une majorité parfois très relative et laisser le choix final aussi aux électeurs des candidatures éliminées) voire un second tour national pour une prime majoritaire même modeste.
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Re: Débattons sur le mode de scrutin

Messagede Républicain67 » Dim 30 Déc 2018 16:33

Les élections législatives est-allemandes du 18 mars 1990 (les seules libres, avant la réunification allemande) sont un exemple de scrutin à la proportionnelle intégrale. Je donne ici les résultats à l'échelle nationale et au niveau des quatorze districts et la capitale Berlin (Est). 400 députés étaient ) élire à la Volkskammer (Chambre du Peuple, parlement de la République démocratique allemande).

Siège à pourvoir par districts

Berlin-Est: 33
Cottbus: 21
Dresden: 43
Frankfurt (Oder): 15
Gera: 16
Halle: 44
Karl-Marx-Stadt: 45
Leipzig: 33
Magdeburg: 30
Neubrandenburg: 13
Potsdam: 22
Rostock: 21
Schwerin: 15
Suhl: 13

Il y a quelques bizzareries dans les résultats que j'ai trouvé (pour l'attribution des sièges dans certains districts).

Deutsche Demokratische Republik
Christlich-Demokratische Union Deutschlands (CDU) : 40,8% : 163 Mandate
Sozialdemokratische Partei Deutschlands (SPD) : 21,9% : 88
Partei des Demokratischen Sozialismus (PDS) : 16,4% : 66
Deutsche Soziale Union (DSU) : 6,3% : 25
Bund Freier Demokraten DFP - LDP - F.D.P Die Liberalen : 5,3% : 21
Bündnis 90 : 2,9% : 12
Demokratische Bauernpartei Deutschlands (DBD) : 2,2% : 9
Grüne Partei + Unabhängiger Frauenverband (Grüne Partei - UFV) : 2,0% : 8
Demokratischer Aufbruch – sozial + ökologisch (DA) : 0,9% : 4
National-Demokratische Partei Deutschlands (NDPD) : 0,4% : 2
Demokratischer Frauenbund Deutschlands (DFD) : 0,3% : 1
Aktionsbündnis Vereinigte Linke (AVL) Die Nelken – VL : 0,2% : 1

Berlin
SPD : 34,9% : 11
PDS : 30,2% : 9
CDU : 18,3% : 6
Bündnis 90 : 6,3% : 2
BFD : 3,0% : 1
Grüne Partei – UFV : 2,7% : 1
DSU : 2,2% : 1
DA : 1,0% : 1
AVL : 0,3% : 1




Bezirk Cottbus
CDU : 42,8% : 9
SPD : 19,3% : 4
PDS : 17,9% : 4
BFD: 5,2% : 1
DSU : 4,8% : 1
DBD : 3,4% : 1
Bündnis 90 : 2,7% : 1

Bezirk Dresden
CDU : 45,0% : 19
PDS : 14,8% : 6
DSU : 13,8% : 6
SPD : 9,7% : 4
BFD : 5,5% : 2
Bündnis 90 : 3,7% : 2
DBD : 2,8% : 2
Grüne Partei – UFV : 1,8% : 1
DA : 1,1% : 1
NDPD : 0,5% : 1

Bezirk Erfurt
CDU : 56,3% : 17
SPD : 18,7% : 6
PDS : 9,9% : 3
BFD : 4,5% : 1
DSU : 2,5% : 1
Grüne Partei – UFV : 2,1% : 1
DA : 1,9% : 1
Bündnis 90 : 1,8% : 1
Bezirk Frankfurt (Oder)
SPD : 31,9% : 5
CDU : 27,8% : 5
PDS : 22,1% : 4
BFD : 4,2% : 1

Bezirk Gera
CDU : 48,9% : 9
SPD : 16,5% : 3
PDS : 12,5% : 2
DSU : 8,2% : 1
BFD : 5,1% : 1

Bezirk Halle
CDU : 45,1% : 19
SPD : 20,8% : 9
PDS : 13,8% : 6
BFD : 10,0% : 4
DSU : 2,8% : 1
Bündnis 90 : 2,4% : 1
DBD : 1,8% : 1
Grüne Partei – UFV : 1,6% : 1
DFD : 0,4% : 1
NDPD : 0,3% : 1

Bezirk Karl-Marx-Stadt
CDU : 45,0% : 20
SPD : 15,6% : 7
DSU : 14,8% : 7
PDS : 11,3% : 5
BFD : 6,0% : 3
Bündnis 90 : 2,1% : 1
Grüne Partei – UFV : 1,6% : 1
NDPD : 1,0% : 1

Bezirk Leipzig
CDU : 39,6% : 13
SPD : 21,5% : 7
PDS : 14,5% : 5
DSU : 10,1% : 3
BFD : 5,4% : 2
Bündnis 90 : 3,3% : 1
Grüne Partei – UFV : 1,9% : 1
DBD : 1,6% : 1

Bezirk Magdeburg
CDU : 44,2% : 13
SPD : 27,5% : 8
PDS : 14,2% : 4
BFD : 4,4% : 1
DSU : 2,0% : 1
Grüne Partei – UFV : 2,0% : 1
Bündnis 90 : 1,9% : 1
DBD : 1,8% : 1

Bezirk Neubrandenburg
CDU : 36,0% : 5
PDS : 25,8% : 4
SPD : 21,2% : 3
DBD : 6,3% : 1
Bezirk Potsdam
SPD : 34,4% : 10
CDU : 31,2% : 8
PDS : 16,6% : 4
BFD : 4,9% : 1
Bündnis 90 : 3,8% : 1
DSU : 2,9% : 1
DBD : 2,2% : 1
Grüne Partei – UFV : 2,1% : 1

Bezirk Rostock
CDU : 34,3% : 7
SPD : 24,8% : 5
PDS : 23,2% ; 5
DBD : 4,4% : 1
BFD : 3,4% : 1
DSU : 2,8% : 1
Bündnis 90 : 2,7% : 1

Bezirk Schwerin
CDU : 39,8% : 6
SPD : 25,4% : 4
PDS : 17,8% : 3
BFD : 4,5% : 1
DBD : 4,0% : 1

Bezirk Suhl
CDU : 50,6% : 7
SPD : 16,1% : 2
PDS : 12,6% : 2
DSU : 8,9% : 1
BFD : 4,1% : 1

Sources:
https://de.wikipedia.org/wiki/Volkskammerwahl_1990
http://www.wahlrecht.de/ergebnisse/volkskammerwahl-1990.htm
http://www.bpb.de/geschichte/deutsche-einheit/deutsche-teilung-deutsche-einheit/43770/volkskammerwahl-1990
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Re: Débattons sur le mode de scrutin

Messagede Etienne92 » Mer 2 Jan 2019 12:38

Plus qu'un changement du mode de scrutin lui-même, est-ce que la France n'aurait pas surtout besoin d'une évolution du calendrier des scrutins ? Les choses changent beaucoup en 5 ans, et l'on constate déjà que les gouvernants doivent changer de pied, parfois plusieurs fois, en cours de mandat. Ce qui conduit parfois à des situations cocasses comme on peut l'observer ces temps-ci, où des élus-militants défendent bec et ongle une mesure qu'ils critiquaient la veille avec la même énergie.
Est-ce qu'il ne faudrait pas introduire une sorte de mid-term à la française, pour institutionnaliser cette évolution, et permettre à l'opposition de viser un objectif plus proche, au lieu d'être déjà en pré campagne pour la présidentielle suivante ?
Après il y a beaucoup de façons différentes de le réaliser. Ma préférence irait vers une utilisation du bicamérisme, avec une chambre au mandat aligné sur celui du président, l'autre au cycle plus court (éventuellement via un renouvellement par moitié pour que le mandat lui-même ne soit pas trop court). En somme un peu ce que nous avons déjà avec le sénat, mais il faudrait alors qu'il soit élu au suffrage direct.
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Re: Débattons sur le mode de scrutin

Messagede Azertyuiop » Jeu 3 Jan 2019 18:59

Etienne92 a écrit:Plus qu'un changement du mode de scrutin lui-même, est-ce que la France n'aurait pas surtout besoin d'une évolution du calendrier des scrutins ? Les choses changent beaucoup en 5 ans, et l'on constate déjà que les gouvernants doivent changer de pied, parfois plusieurs fois, en cours de mandat. Ce qui conduit parfois à des situations cocasses comme on peut l'observer ces temps-ci, où des élus-militants défendent bec et ongle une mesure qu'ils critiquaient la veille avec la même énergie.
Est-ce qu'il ne faudrait pas introduire une sorte de mid-term à la française, pour institutionnaliser cette évolution, et permettre à l'opposition de viser un objectif plus proche, au lieu d'être déjà en pré campagne pour la présidentielle suivante ?
Après il y a beaucoup de façons différentes de le réaliser. Ma préférence irait vers une utilisation du bicamérisme, avec une chambre au mandat aligné sur celui du président, l'autre au cycle plus court (éventuellement via un renouvellement par moitié pour que le mandat lui-même ne soit pas trop court). En somme un peu ce que nous avons déjà avec le sénat, mais il faudrait alors qu'il soit élu au suffrage direct.

Mais dans ce cas, les midterms en question ne concerneraient qu'une moitié de la population (au moins, cela justifierait encore davantage l'expression de "midterms" même si je serais pour une francisation du nom). L'autre moitié serait alors priée d'attendre la fin du mandat pour s'exprimer (même si elle s'exprimerait là sur plus de scrutins).
Et puis, si le but est davantage de donner à l'électorat la possibilité de s'exprimer plutôt que de lui donner celle de priver le président de la République de sa capacité de gouverner, n'oublions pas qu'il existe déjà des midterms en France : ça s'appelle les européennes. C'est un peu avant la mi-mandat, certes, mais 2 ans après l'élection d'une majorité, les électeurs ont assez de matière pour exprimer un jugement à son égard.
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Re: Débattons sur le mode de scrutin

Messagede PhB » Jeu 3 Jan 2019 19:19

Azertyuiop a écrit:Et puis, si le but est davantage de donner à l'électorat la possibilité de s'exprimer plutôt que de lui donner celle de priver le président de la République de sa capacité de gouverner, n'oublions pas qu'il existe déjà des midterms en France : ça s'appelle les européennes. C'est un peu avant la mi-mandat, certes, mais 2 ans après l'élection d'une majorité, les électeurs ont assez de matière pour exprimer un jugement à son égard.

Le problème, c'est que ce n'est justement pas le sujet. L'enjeu des élections européennes est la désignation du parlement européen, dont le rôle est certes insuffisant mais malgré tout majeur pour l'Union Européenne.
Les électeurs qui se prononcent sur la base de leur politique nationale sont à côté de la plaque - hormis peut-être ceux qui votent pour une liste nationaliste prônant une sortie de l'UE, réunissant ainsi les politiques nationale et européenne.
La seule logique qu'on peut trouver à voter aux élections européennes en fonction de considérations nationales, c'est de prendre pour acquis que l'action politique du parti X sera la même au sein des deux parlements (national et européen). C'est plutôt vrai pour certains partis comme EÉLV, mais pas toujours. D'ailleurs les groupes politiques au parlement européen ne se retrouvent pas dans les parlements nationaux.
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Re: Débattons sur le mode de scrutin

Messagede metre3 » Jeu 3 Jan 2019 21:53

La question est avant tout de savoir si par exemple une élection législative anticipée dans 3-4 mois (à mode de scrutin identique) donnerait une composition bien différente à l'AN (majorité plus faible, peut être relative de l'ensemble LREm-Modem-UDI, quelques élus RN, DLF et LR de plus, quel poidspour le PS et la FI ?) et si la politique suivie par le gouvernement ayant obtenu la confiance de cette dite assemblée serait très différente de celle conduite jusqu'à présent. Sachant que globalement (hormis les 2 premières années de Hollande) cela fait 12 ans que les grandes lignes sont les mêmes et que manifestations, grèves et déficits se succèdent voire s'amplifient.
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