de vudeloin » Mar 8 Mar 2011 20:08
La lecture des résultats des élections régionales néerlandaises a, pour une bonne part, confirmé les tendances observées lors des consultations les plus récentes ( européennes 2009 et législatives 2010 ) où le Parti de la Liberté ( PVV ), parti populiste de droite mené par Geert Wilders, avait opéré une percée.
Ce parti, soutenant sans y participer l’actuelle coalition gouvernementale, composée par le parti libéral VVD et le parti démocrate chrétien CDA, a obtenu environ 12,7 % des suffrages des électeurs néerlandais, réalisant un score inférieur aux performances réalisées précédemment mais néanmoins suffisantes pour devenir la 4e force politique du pays.
Le parti de Geert Wilders obtient finalement 69 élus parmi les conseillers régionaux des différentes provinces néerlandaises, parvenant même en tête dans la province de Limbourg ( chef lieu Maastricht ), province la plus catholique du Royaume, où sa progression se nourrit notamment de l’effondrement du CDA démocrate chrétien qui passe de 18 à 10 élus au Parlement local.
Le CDA est le grand perdant de ces élections, avec une de 151 sortants à 86 élus, les chutes les plus nettes touchant le Flevoland ( province gagnée sur la mer dans l’Ijsselmeer ) où il passe de 8 à 4 élus ; dans la province d’Utrecht ( de 11 à 6 élus ), dans la Hollande septentrionale ( Amsterdam ) avec une perte de 5 des 10 sièges sortants, en Hollande méridionale ( Rotterdam, La Haye ) avec une perte de 7 des 13 sortants, et dans les deux provinces catholiques du Nord Brabant ( Eindhoven, Den Bosch ) et, donc du Limbourg, où 8 des 18 sortants sont ainsi perdus.
Le score du CDA est toutefois légèrement meilleur que celui des élections législatives ( remontée de 0,6 point ) qui avaient été particulièrement mauvaises.
Le parti libéral VVD de l’actuel premier Ministre maintient ses positions avec 20,8 % des voix et le jeu des moyennes lui permet de se renforcer légèrement dans les assemblées provinciales, gagnant 1 ou 2 sièges selon les cas.
Le VVD est ainsi le premier parti de la Gueldre, du Flevoland, d’Utrecht, de Hollande septentrionale, de Hollande méridionale, du Nord Brabant.
Il fait jeu égal avec les travaillistes en Zélande.
Le parti travailliste PvdA, principal parti de gauche – centre gauche, se positionne en second position nationale avec 18,1 %, score inférieur à celui obtenu lors des élections législatives, mais qui permet cependant au parti de connaître une stabilisation de son influence et de se trouver en tête dans les provinces de Groningue ( 12 élus sur 43 ), en Frise ( 11 sur 43 ), en Drenthe ( 12 élus sur 41 ), toutes provinces situées au Nord du Royaume et souvent marquées par le protestantisme plus que par le catholicisme.
Le parti socialiste SP, parti de gauche affilié au PGE en Europe, connaît un reflux de son influence, d’ailleurs généralisé sur l’ensemble du pays, au regard des élections provinciales précédentes puisque le parti perd 27 de ses 83 sortants.
Toutefois, le score atteint ( 10,4 % ) s’inscrit en légère progression sur les précédentes élections législatives et marque donc la consolidation de ce parti dans le paysage politique néerlandais.
Le recul de l’influence du SP ne le prive pas du fait d’avoir tout de même réalisé le second score de son histoire dans le cadre de ces élections.
L’un des principaux gagnants de ces élections provinciales est le parti centriste Democraten 66 ( créé cette année là ) qui présente la particularité d’être plus près de la gauche social libérale, notamment au niveau municipal, que du VVD, actuellement au pouvoir, alors que les deux partis sont membres du même groupe au Parlement européen, celui de l’Alliance des Libéraux et des Démocrates ( le groupe de François Bayrou par exemple ).
D’66 est ainsi passé de 9 à 42 conseillers provinciaux et siégera dans la totalité des assemblées, ce qui n’était pas le cas en 2007 où le parti avait disparu des Provinces de Groningue, Frise, Drenthe, Overijssel, Flevoland et Zélande.
Le mouvement, en obtenant environ 8,3 % des votes, confirme par ailleurs sa progression, déjà visible lors des législatives.
Le mouvement GroenLinks (Verts – gauche ), qui regroupe les Verts, une partie de la gauche chrétienne et les anciens membres du PC néerlandais eurocommunistes ( le SP ayant pour sa part une essence d’extrême gauche plus nette ), a obtenu un peu plus de 6 % des suffrages, pourcentage équivalant celui des précédentes provinciales et légèrement inférieur à celui des législatives.
Ce qui se traduit par une faible progression des élus du parti, de deux sièges sur l’ensemble du pays.
Enfin, le scrutin confirme la marginalisation continue des partis religieux, qu’il s’agisse de la Christen Unie, un peu plus centriste mais néanmoins rigoriste sur les principes éthiques ou de la SGP calviniste qui recrute dans la droite protestante.
La Christen Unie passe ainsi de 38 à 24 élus, en disparaissant notamment du Nord Brabant et la SGP de 14 à 12 sièges.
L’autre dernière surprise du scrutin est la poussée du parti des pensionnés, qui obtient 9 élus sur l’ensemble du pays, là où il n’en avait encore aucun.
Il est important de rappeler que les élus des Assemblées provinciales ont mission de désigner les membres du Sénat néerlandais, ou Chambre Haute des Etats Généraux.
Dans la répartition actuelle des 75 membres, la coalition gouvernementale VVD – CDA disposait respectivement de 14 et 21 élus, soit un total de 35, bonifié, si l’on peut dire, par les 4 élus de la Christen Unie, et les 2 élus de la droite protestante du SGP.
D’66 disposait de 2 élus, tandis qu’on comptait 1 élu du parti des animaux ( Partij voor de Dieren, PvdD ), 1 non inscrit et les élus de la gauche néerlandaise : 14 travaillistes, 12 SP et 4 Groen Links.
Ce qui faisait, grosso modo, un rapport de 41 sur 75 Ã droite, 2 au centre, 2 ailleurs et 30 Ã gauche.
La répartition du Sénat devrait être modifiée avec 16 élus libéraux du VVD, 11 élus pour le CDA et 10 pour le PVV à droite, soit un total de 37.
Le tout bonifié, si l’on peut dire, par 2 élus de la CU et 1 du SGP, soit 3 de plus.
Au centre, 6 élus pour D’66 ; ailleurs, un élu pour le PvdD et un élu pour le parti des pensionnés.
La gauche connaîtrait donc un repli avec 14 travaillistes, 8 SP et 5 Groen Links, soit 27 sièges.
Mais l’analyse concrète des évolutions traduit en fait une régression de l’influence du parti démocrate chrétien, longtemps abonné à l’exercice du pouvoir aux Pays Bas, où il avait tendance à alterner, sinon à gouverner avec les travaillistes, et un renforcement de la droite d’affaires ( celle du VVD ) et sécularisée ( le PVV ).
On rappellera par exemple que le fameux commissaire européen Bolkestein est membre du VVD.
A gauche, le parti travailliste demeure la première force mais sans parvenir à progresser et à redevenir le plus important parti politique néerlandais en termes d’influence.
La progression de D’66, parti situé entre le centre et le centre gauche, influent dans les milieux urbains ( 6 élus sur 55 en Hollande septentrionale par exemple ) montre d’ailleurs qu’une partie des couches nouvelles ne sont pas toujours captées par le parti travailliste qui n’échappe donc pas aux difficultés souvent rencontrées ces temps derniers par les partis sociaux démocrates en Europe.
La perte d’influence, lors des ces provinciales, du SP doit être mesurée à l’aune des résultats les plus récents de ce parti, mais il convient de noter que ces pertes se conjuguent le plus souvent avec une progression de l’influence de D’66, plus encore que toute autre considération.
Un peu comme si l’opposition de gauche et de centre gauche au pouvoir en place s’était répartie de manière différente qu’en 2007.
Ce qui donne un paysage politique avec une gauche recentrée et une droite de plus en plus populiste et laïcisée.