Comparer aux régionales est en tous cas intéressant, d'une part parce que c'est le dernier scrutin en date, d'autre part parce qu'il y avait les mêmes candidatures sur une vaste zone (à l'exception près des histoires de sections départementales) et avec un enjeu exécutif direct à grande échelle.
Or concernant en particulier le FN, il peut y avoir quelque hésitation à lui confier directement le commandement des forces armées et autres. Inversement, aux régionales comme déjà aux européennes, le nom Le Pen semblait mobiliser (il y a d'ailleurs eu un contrecoup en Normandie). Concrètement, si leur candidate ne fait pas mieux que les listes FN aux régionales, le résultat du second tour est très prévisible, vu qu'il y a eu des défaites FN en duel et aucune victoire. La marge pourrait cependant ne pas être grande.
Ceci dit, une partie des intentions de vote sondagières pour le second tour correspondent plutôt à un mouvement d'humeur pré-premier tour, à un "peu envie" de voter pour tel candidat: une fois les autres choix éliminés du premier tour et les deux semaines de réflexion passées, ce sera différent. Un peu comme les intentions de vote au premier tour pour Hamon et Fillon mesurées avant les primaires étaient franchement en-dessous de ce qu'elles ont été après...
Les reports de voix mesurés par le sondage publié par La Libre Belgique (qui donne ses effectifs nets: louable transparence, par contre il est possible qu'il n'y ait pas de redressement-?) sont en tous cas intéressants (au passage, on n'a pas le score de second tour "mesuré")
http://www.lalibre.be/actu/internationa ... 981556229bSur un second tour Fillon/Le Pen, les reports de la gauche
lato sensu seraient de l'ordre de 70-75/25-30. C'est le scénario où il y a le plus d'abstention dans les intentions (68% de participation), signe que ce duel est le moins accepté/désiré.
Sur Macron/Le Pen, c'est au contraire là où il y a le moins d'intention d'abstention (80% de participation), résultat qui là aussi traduit davantage un état d'esprit qu'une prévision effective,on aurait 88 Macron/12 Le Pen chez les candidats plus à gauche, 62/38 chez les électeurs de Fillon.
Sur des Mélenchon/Le Pen et Hamon/Le Pen (reports meilleurs pour Hamon), une majorité des électeurs de Fillon participant se reporterait sur Le Pen (la tactique de "front républicain" a du mal, ceci dit c'est avant le temps d'entre-deux-tours et les appels au vote qui n'iront guère publiquement vers Le Pen). Notons aussi que ce n'est pas ce qui s'est vu lors des duels FdG/FN ou PS/FN aux départementales. Mesurer un second tour dans un sondage où un des deux candidats ne sort pas qualifié au second tour est toujours délicat: si finalement ce candidat se qualifie, il sera en meilleure posture qu'au moment du sondage.
Sur les seconds tours avec Fillon sans Le Pen (ils n'ont pas poussé jusqu'à tester Macron/Hamon p.ex.), les électeurs FN se reporteraient à légèrement plus de 50% sur Macron/40 Mélenchon/38 Hamon (signe d'une origine de gauche et/ou de ce qu'on sait de Fillon, programme et/ou affaire) et là , on peut être à peu près sûrs que comme d'habitude, le FN ne donnera pas de consigne de vote, ce qui limite les évolutions. Le report côté gauche/centre serait bon sur Macron (88% des exprimés de Mélenchon le préfèreraient à Fillon), correct pour Hamon (73% des exprimés sondagiers venant de Macron) et moins pour Mélenchon: 58% des électeurs de Macron préfèreraient Mélenchon à Fillon. C'est tout de même un signe d'origine à gauche et de clivage avec Fillon.
L'étude Cevipof/Ipsos/Le Monde, la plus détaillée avec son important échantillon qui rend les détails régionaux un brin précis, montre entre autres que sous des stabilités ou relativement faibles mouvements de score se cachent des mouvements importants (pour Macron: +5,5 + 3,5 - 4,5 - 2,5 = +11 -9= +2) et aussi que les électeurs de droite sont un peu les seuls à trouver qu'on s'acharne contre Fillon et que c'est un complot.
http://www.ipsos.fr/decrypter-societe/2 ... -etre-plieSur la comparaison avec les régionales, il faut comparer les scores régionalisés avec les résultats sans Bayrou (le Modem a fait de la figuration à ces régionales: seulement 2 listes, alliance avec la droite ailleurs) sans se contenter de ne pas y croire. En Occitanie, Fillon réussirait à faire encore moins bien que D. Reynié, ce qui me semble logique, entre l'affaire et les débouchés d'emploi dans la fonction publique. Plus largement, s'il est largué derrière Le Pen et Macron au national (dans cette enquête, hein mais malgré des marges d'erreur inférieures à 1 point), il faut bien qu'il le soit dans certaines régions - en Occitanie, il prend un retard considérable sur les deux et ce n'est encore une fois pas surprenant.
http://www.ipsos.fr/decrypter-societe/2 ... -etre-pliehttp://www.ipsos.fr/decrypter-societe/2 ... ur-regionsLes résultats depuis ont remis en selle Fillon par rapport à Macron, sur fond de questions sécuritaires et coloniales. Au point qu'on ne sait à nouveau plus la tête d'affiche même d'un sondage à l'autre, même si Macron/Fillon semble peu probable (même quand Macron est devant, c'est Le Pen en face au second tour). La perspective renaissante d'un second tour Fillon / Le Pen, mal vue des autres électeurs, pourrait à son tour faire bouger des lignes...