Mondran a écrit:Ce qui est frappant dans le sondage Rolling de Paris Match, c'est la proximité sociologique des électorats Hamon+Mélenchon / Marine Le Pen (à l'exception de la géographie et du niveau d'étude) et la forte distance avec celui de François Fillon.
Voici les données issues du Rolling du 13 février
Votants de moins de 35 ans : H+M : 30 % ; 27 % pour MLP contre seulement 11 % pour FF
Votants de plus de 65 ans : H+M : 17 % ; 18 % pour MLP et 35 % pour FF
L'électorat de François Fillon est un très marqué en terme d'âge. A noter qu'il est également nettement plus masculin que féminin (15 % de femmes contre 21 % des hommes). L'électorat de MLP est équilibré en terme de genre (ce qui est assez nouveau) et le cumul H+M est plus féminin (29 % contre 23 %)
Catégories sociales + : H+M : 25 % ; MLP : 18 % contre 20 %
Catégories sociales - : H+M : 30 % ; MLP : 38 % contre 11 %
Retraités : H+M :18 % ; MLP : 21 % ; FF : 30 %
Chômeurs : H+M : 38 % ; MLP : 37 % ; FF : 12 %
Ces chiffres permettent de comprendre l'écart existant entre le programme de Fillon pour l'emploi et le pouvoir d'achat et la cible de ceux qui devraient en bénéficier si on en croit le candidat. Les CSP - et les chômeurs n'adhèrent pas à ce programme. Etonnante également la faible part des CSP + pour Fillon, inférieure à celle de H+M.
En terme de statut de l'interviewé, les votants de FF (hors retraités) sont majoritairement des chefs d'entreprise, alors que pour H+M ce sont des employés et pour MLP des ouvriers.
C'est au niveau de l'éducation que la différence est vraiment nette entre les profils des électeurs de H+M et de MLP
MLP fait un carton chez les personnes ayant un niveau d'éducation inférieur au BAC (37 % contre 23 %) ou Bac (31 % contre 25 %). H+M sont très présents chez les jeunes en cours d'études (38 % contre 20 % pour MLP).
FF est lui plus positionné sur un électorat de 2ème et 3ème cycle (27 % contre 23 % pour H+M ; 13 % pour MLP).
Enfin l'électorat H+M est très francilien (34 % contre 14 % pour MLP et 18 % pour FF).
En synthèse, H+M sont sur un électorat plutôt très jeune, plus féminin que masculin, habitant dans les banlieues et les quartiers urbains, comprenant plus d'employés que de catégories supérieures et très peu d'ouvriers.
MLP a un électorat jeune, équilibré en terme de genre, habitants dans les centres urbains périphériques (hors de la région parisienne) ou dans les communes rurales, comprenant une forte proportion d'ouvriers et un niveau d'éducation faible.
FF a lui un électorat âgé, aisé et éduqué.
La distance entre les électorat FF et MLP est forte ce qui limitera les reports de voix de l'un sur l'autre, si FF n'est pas au 2ème tour.
Je trouve ce sondage vraiment très intéressant. Cela démontre ce que je pensais. Ces chiffres sont à rapporter avec les résultats de Norbert Hofer (FPÖ) à la présidentielle autrichienne et le vote "Leave" lors du référendum britannique. La comparaison avec le vote Trump est selon moi moins pertinente, vu que les clivages sont comme même très différents que dans les pays européens (importance de la religion, du vote ethnique/couleur de peau). Comme en Grande-Bretagne et en Autriche, on assiste à un basculement chez les électeurs populaires et ouvriers de la gauche (Labour, SPÖ, PS) vers un vote national-populiste ou d'extrême droite. Comme en Autriche et en Angleterre l'électorat ouvrier, au niveau d'étude plus bas et habitant hors des grandes métropoles vote massivement pour les partis et options nationalistes. On peut se demander légitimement si outre un rejet des élites et de la mondialisation, il n'y a pas non plus un rejet des grandes villes, dont le mode de vie des habitants (cadres, immigrés, bobos) ressemblent de moins en moins à celui des petites villes et de la ruralité. En Autriche le clivage est vraiment net. En mai, Van der Bellen l'a emporté dans toutes les grandes villes (Vienne, Linz, Graz, Salzbourg...) et les campagnes prospères comme le Tirol. A l'inverse Hofer est majoritaire dans les campagnes, les régions pauvres (ex. Burgenland), les petites villes, les villes de tradition ouvrières (Schwechart, Leoben, Steyr...). Le contraste est encore plus net à Vienne et environ. Les quartiers aisés ou bobo du centre-ville et de l'Est ont voté massivement Van der Bellen, tout comme les quartiers à forte population immigrée. Les seuls arrondissements ayant votés Hofer sont Simmering (mairie d'arrondissement FPÖ) et Floridsdorf, les quartiers ouvriers de la ville. Dans les environs, les villes bourgeoises tel Klosterneuburg, Baden bei Wien ou Wiener Neustadt ont porté leurs suffrages majoritairement sur Van der Bellen, alors que Schwechart, banlieue ouvrière de Vienne (chimie) a voté Hofer. Des chiffres à méditer.