Redécoupage des circonscriptions électorales

[Artisan-Politologue]

Bravo pour cette carte! Effectivement, la France ressemble, par endroit, à un vivier de salamandres.
Dernier rebondissement en date: le Sénat a rejeté le texte lundi 14 décembre, lors d'une rocambolesque séance, présidée par la socialiste Catherine Tasca, qui a vu le sénateur UMP du Rhône Jean-Jacques Pignard se tromper de bouton. Vraie méprise ou acte manqué à la Jean-François Lamour? (http://www.lexpress.fr/actualite/politique/le-senat-s-emmele-les-ciseaux-sur-le-redecoupage-electoral_836058.html).
En présentant, comme en 1986-1987, le projet de loi d'un bloc, avec les quelques retouches cosmétiques de la commission Guéna, le gouvernement voulait sans doute le faire passer sans (trop de) discussions. Mais il prenait aussi le risque d'un tel incident.
Cette façon de procéder est typique de la Ve République depuis 1986.
Sous la IIIe, la plupart des redécoupages (il y en eu quatre: 1875, 1889, 1919, 1927) étaient instaurés en concertation avec les élus, et quelquefois profondément amendés. Ils se basaient cependant globalement sur les arrondissements, les plus peuplés étant scindés. Une tradition remontant au Second Empire, période riche en gerrymandering. D'ailleurs, la suppression de nombreuses sous-préfectures, en 1926-1927, résultait de la volonté de Raymond Poincaré et des radicaux de noyer les suffrages communistes dans certains départements.
Sous la IVe, régime de représentation proportionnelle à l'échelon départemental, la question ne se posait pas.
En 1958, le redécoupage a été imposé par ordonnance, le texte ayant cependant été préparé par des hommes politiques de différents partis... sauf les communistes.
En revanche, la loi du 11 juillet 1986 a été forgée au pas de charge (4 mois seulement après les élections législatives). Une conséquence du refus de François Mitterrand de signer les ordonnances du gouvernement Chirac.
Pour en savoir plus, se reporter à l'excellent ouvrage de Bernard Gaudillère: "Atlas historique des circonscriptions électorales françaises" (Droz, Genève). Un pavé presque introuvable (le magasin Cultura de Valence a pu m'en dénicher un exemplaire défraîchi. Délai: au moins 3 semaines) mais consultable en grande partie sur Google.

Manu

[vincent]

Hello à tous et merci pour les différents éléments publiés dans ce message.

Afin d'alimenter une des rubriques du site j'ai longtemps cherché le découpage électoral avant le remodelage de 1986.

Malheureusement, je n'avais jamais rien trouvé de bien concluant.

Manu, si je te suis, le découpage de 1958 est resté en vigueur jusqu'en 1986 ?

Et si c'est bien le cas, quelqu'un sait-il où je peux trouver ce découpage ?

Merci d'avance !

[Artisan-Politologue]

Re-bonjour

Oui, le premier redécoupage de la Ve République est resté en vigueur jusqu'en 1986 (1985 en fait, avec la loi sur le scrutin proportionnel sur base départementale). Il y a eu quelques retouches dans l'intervalle:
- en 1966, après le redécoupage de la Seine et de la Seine-et-Oise
- en 1972, avec la modification du tracé entre le Rhône et l'Isère
- en 1975, du fait de la division de la Corse en deux départements.
Toutes les cartes (et bien plus encore) se trouvent dans le livre que j'ai cité. Certaines sont visibles sur Google.
Sur Atlaspol, j'en ai mis quelques-unes, dans les pages des chronologies, mais certaines sont à revoir (je m'étais basé sur le dictionnaire des circonscriptions de Lafarge et Soccol, mais je me suis aperçu que leurs explications n'étaient pas toujours très claires ni complètes). Je fais en ce moment une mise à jour. Celles dont les pages ont une liste de sénateurs depuis 1946 sont justes (mais faites à main levée attention), soit: en Alsace, Aquitaine, et Bourgogne.

Manu

[Artisan-Politologue]

Pour ceux que cela intéresse, j'ai retrouvé le lien sur Google: http://books.google.fr/books?id=u6RF-ljcKxsC&printsec=frontcover&dq=atlas+historique+des+circonscriptions+%C3%A9lectorales+fran%C3%A7aises&cd=1#v=onepage&q=&f=false
Soyez patients, c'est un gros pavé, ça met du temps à charger, mais ce bouquin vaut vraiment lé déplacement!

[Jean-Philippe]

Pour le vote du 14 décembre, je croyais que l'erreur venait du sénateur centriste About.
Le redécoupage de la Moselle a été retoqué hier 22 décembre par la commission des lois, suite à un amendement de Marie-Jo Zimmermann (députée UMP indépendante du département), soutenue par le PS et François Baroin (UMP indépendant). Reste à savoir si ce vote en entraînera d'autres (la Somme serait à refaire notamment).

[vincent]

Merci Manu,
Je vais essayer de trouver tout cela.

[vincent]

Pour le vote du 14 décembre, je croyais que l'erreur venait du sénateur centriste About.

Pour moi, c'est aussi M. Pignard qui est à l'origine de l'erreur.

[Jean-Philippe]

En effet, c'est Pignard, mais il est bien centriste, pas UMP (message de manu hier à 18h27).

[fred75]

la nécessité du redécoupage est incontestable. Il est intéressant, au delà des querelles politiciennes inévitables, de constater que ce projet permet de revisiter des dogmes réputés intouchables. En particulier l'abandon du dogme de deux sièges minimum par département. Je pense d'ailleurs que le gouvernement aurait dû pousser plus loin sa logique, et supprimer le second siège de départements comme les Hautes-Alpes, Alpes de Haute-Provence, ou encore Ariège. Autre dogme revisité, l'instauration de la représentation des Français expatriés.
Sur le redécoupage lui même, censé selon la gauche favoriser l'UMP, c'est à vérifier dans les urnes. Cette critique avait été formulée après 1986, or la gauche a gagné avec ce découpage en 1988 et en 1997 (merci Le Pen cependant).
Enfin, sur le mode de scrutin lui meme, par delà le redécoupage, je crois pour ma part que le scrutin majoritaire dit d'arrondissement, par référence à la 3ème république, est plus sain malgré les apparences que la proportionnelle : cela permet des majorités, évite les combinaisons de chambre dont les citoyens sont exclus de facto, permet d'éviter le reclassement discret du personnel politique désavoué par les citoyens. Ma conviction (que je ne tente pas d'imposer, mais de faire partager!) est que la démocratie, c'est la volonté du plus grand nombre et non pas la volonté individuelle de chacun: çà, c'est plutot le bazar ! Or la proportionnelle tend à justifier la volonté de chacun... d'où le foutoir et l'impuissance qui caractérisèrent la 4ème.

[baudoin]

la démocratie, c'est la volonté du plus grand nombre et non pas la volonté individuelle de chacun: çà, c'est plutot le bazar ! Or la proportionnelle tend à justifier la volonté de chacun... d'où le foutoir et l'impuissance qui caractérisèrent la 4ème.

Cela pourrait se discuter en effet. Mais cela n'empêche que je suis totalement d'accord. Et sans retourner sous la IV République, certains exemples contemporains montrent la difficulté de stabilité face à un multipartisme excessif.