« Le mal dont souffrent l’État et la société n’est ni nouveau ni inconnu, constate Nadji Safir, ancien enseignant en sociologie à l’université d’Alger. Il se nomme le pacte social rentier. Ce pacte repose sur deux types de rente. La première est de nature historique et sa finalité est politique. Elle repose sur l’histoire de la lutte contre le colonialisme, qui a forgé les mémoires et les imaginaires de générations de militants et de citoyens. Les dirigeants politiques, depuis des décennies, ont systématiquement instrumentalisé ce passé, pour fonder leur légitimité historique et justifier leur maintien au pouvoir et leur immobilisme.
« La seconde rente est de nature économique, et sa finalité est surtout sociale. Elle repose sur l’exploitation et l’exportation des hydrocarbures. Depuis des années, le pétrole et le gaz représentent au moins 95 % des recettes d’exportations, près de 70 % des recettes fiscales de l’État et 40 % du PIB. L’une des caractéristiques majeures des trois mandats déjà exercés par l’actuel président est indiscutablement la poursuite délibérée de ce processus de “rentiérisation” qui a transformé non seulement l’économie algérienne, mais toute la société. Nous avons vu naître une “économie de bazar” qui prospère depuis les années 2000 et qui a fini par imposer sa domination à la société. »
Derrière la vitrine de cette « économie de bazar » s’est développé un système économico-politique qui permet à l’État d’acheter la paix sociale et une certaine stabilité politique avec les revenus des hydrocarbures, mais qui le condamne à l’immobilisme et le rend inapte à mesurer les aspirations réelles du peuple. Cinquante-cinq ans après l’indépendance, l’Algérie continue de subventionner le lait, les céréales, l’eau, la farine, l’huile, les logements. C’est-à-dire d’assurer à ses citoyens un minimum vital qui empêche, sauf accident, la frustration de se transformer en colère, voire en révolte.
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On aura tout vu. Abdelaziz Bouteflika n’aura fait que nous infliger humiliation sur humiliation. Si par extraordinaire, il lira ce papier, si un bout de sa conscience fonctionne encore, nous lui adressons solennellement ce message : Monsieur le Président, si vous n’avez cure de votre propre image, de votre dignité, au moins faites-le pour l’Algérie.
Briguez 100 mandats si vous voulez, restez sur le trône 1000 ans encore si cela peut contenter votre ego, mais de grâce, au moins épargnez-nous ce sinistre spectacle. Restez chez vous, ne sortez plus. Epargnez-nous la comédie d’une régence capable de remplir son rôle, quand tout concourt à donner de votre fonction l’image la plus dégradante et la plus vile.
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