Si vous ne suivez pas la politique allemande cela vous aura sans doute échappé, mais il y a actuellement de grands changements à l’extrême droite allemande. Ici je ne parle pas de la droite populiste du type AfD (elle contient tout de même un fort courant très droitier, proche des milieux nationalistes et néonazis), mais de la vraie extrême droite néonazie : NPD, Der III. Weg, Die Rechte, les Freie Kameradschaften… On parle aussi outre-Rhin de « Rechte Szene » (scène de droite), soit les milieux néonazis violents, dont le NPD a souvent été la vitrine légale et électorale. Contrairement à la France, et tout comme « destra » en Italie, « rechts » (droite) fait en Allemagne clairement référence à l’extrême droite. A distinguer de « konservativ ».
Les élections fédérales du 26 septembre et les dernières élections régionales (Berlin, Mecklembourg-Poméranie occidentale, Saxe-Anhalt) ont conduit à des évolutions dans l’extrême droite allemande. Le NPD, concurrencé par l’AfD et sa branche la plus droitière (surtout dans l’Est de l’Allemagne), est de plus en plus marginalisé. Il est désormais en dessous de 1% au niveau électoral (fédéral et régional) et a perdu tout financement public. Cela a pour résultat une situation financière très difficile pour le principal parti néonazi allemand. Les nationaux-démocrates ont depuis 2016-2017 (émergence électorale de l’AfD) perdu tous leurs mandats régionaux et une grande partie de leurs membres. Plusieurs cadres « modérés » appellent désormais ouvertement à voter ou à rejoindre l’AfD. A l’exact opposé, des néonazis notoires, tels que Thorsten Heise, membre de l’exécutif national du NPD et dirigeant du parti en Thuringe, critiquent la ligne « modéré » du président Frank Franz, qui selon eux ne se distingue plus vraiment de l’AfD. Le NPD devrait pour se démarquer adopter une ligne encore plus radicale et activiste, alors qu’il est déjà menacé d’interdiction.
A la droite du NPD, il existe deux petites organisations très activistes et ultra-radicales, Die Rechte et Der III. Weg. Le premier est sur une ligne très « mouvementistes » et ne cache pas ses accointances avec les « Freie Kameradschaften », les groupuscules néonazis violents. Le NPD s’est sous la direction de Holger Apfel, puis de Frank Franz de plus en plus éloigné de ses petits groupes activistes, qui ont lui par le passé fourni pas mal de cadres et de militants de terrain. Il en résulte que le NPD, même s’il reste de loin le plus important parti d’extrême droite en Allemagne, a quasi disparu de nombreux territoires. Die Rechte s’est toutefois de nouveau rapproché de son ancien frère-ennemi. Der III. Weg (« la troisième voie), organisation néonazie ultra-radicale, nationaliste révolutionnaire et anticapitaliste, est actuellement le parti qui monte à l’extrême droite, du moins en termes de militants et d’actions médiatiques. S’il ne dispose pas plus de 600 militants, il est très structuré et activiste (il se veut être une avant-garde) et fait depuis quelques mois régulièrement parler de lui dans la presse allemande et internationale : affiches électorales appelant à pendre les Verts, tenues de type paramilitaires, actions musclées à la frontière germano-polonaise, y compris avec des militants équipés d’armes blanches, marches nocturnes… Il dispose d’ailleurs d’un chanteur « maison » avec le rappeur néonazi MakSS Damage (de son vrai nom Julian Fritsch), qui semble être actuellement le musicien d’extrême droite le plus populaire en Allemagne (textes très explicites, bien plus que les rappeurs « natios » français du type Kroc Blanc ou Goldofaf). Le III. Weg attire beaucoup de membres déçus du NPD et est de plus en plus surveillés par les services de renseignement fédéraux.
https://www.belltower.news/ende-der-npd-prominenter-neonazi-spricht-sich-jetzt-offen-fuer-die-afd-aus-121893/https://www.zeit.de/politik/deutschland/2021-10/rechtsextreme-polnische-grenze-dritte-weg-grenzgang-aufruf-brandenburg-migration?utm_referrer=https%3A%2F%2Fwww.google.com%2FIl semble que l'Allemagne ait en terme d'extrême droite pris un certain retard idéologique par rapport à la France ou l'Italie. Le mouvement identitaire connaît actuellement une poussée et s'est rapproché de l'AfD, mais le milieu activiste reste dominé par les néonazis.
Certains partis néonazis osent faire de la propagande électorale à la limite de la légalité (du moins par rapport du droit allemand). Voici par exemple le clip (très explicite) du petit parti "Die Rechte" pour les élections fédérales de 2017 (pas de candidature en 2021)
https://www.youtube.com/watch?v=DZ2CflrpObI Je ne vois pas de partis français, même parmi les plus extrémistes, réaliser un tel clip. Voici un clip du NPD, très légèrement plus modéré.
https://www.youtube.com/watch?v=G-3Dd_GcxjY Le RN ou même Eric Zemmour n'oseraient pas faire une telle propagande électorale. Outre leur extrémiste, je ne sais pas si le côté "beauf" de ces formations aurait la cote en France: crânes rasés, tatouages, gros bras...