de vudeloin » Lun 18 Avr 2011 16:32
Les élections finlandaises de ce 17 avril 2011 auront donc été marquées par l’irruption, dans le paysage politique local, du parti des Vrais Finnois ( Perussuomalaiset ou PS ), l’échec des partis associés dans la coalition gouvernementale sortante ( KOK, KESK, VIHR et RKP ), la performance moyenne de la gauche finlandaise et, entre autres phénomènes, la perte sensible d’influence du parti du Centre ( Suomen Keskuta ou KESK ), dont l’origine est, comme nous l’avons indiqué, commune à celle du PS.
Le KESK voit d’ailleurs là sanctionnée, d’une certaine manière, sa pratique du pouvoir depuis 2007, marquée notamment par le départ anticipé de Matti Vanhanen, ancien Premier Ministre impliqué dans des affaires financières troubles et qui avait dû démissionner pour laisser place à Mari Kiviniemi, jeune première ministre ( 42 ans ! ) depuis l’an dernier.
Pour ceux qui suivent un peu la politique finlandaise, Vanhanen est né à Jyvaskyla, la capitale de la Finlande centrale ( Keski Suomi ) mais s’est fait élire dans la circonscription d’Uusimaa ( capitale Espoo ), circonscription du Sud de la Finlande située de part et d’autre de la capitale Helsinki.
Mari Kiviniemi, qui lui a succédé, est, pour sa part, originaire d’Ostrobothnie du Sud ( Vaasan en VO ), région où elle fut élue députée.
Siège qu’elle a aujourd’hui laissé de côté pour devenir, cette année, l’unique élue du KESK dans la circonscription d’Helsinki.
Une circonscription d’Helsinki qui a attiré un certain nombre de leaders politiques du pays : Paavo Ahrinmâki, élu en 6e position de la circonscription pour la VAS ( Alliance de Gauche ), Anni Sinnemäki, élue en 9e position, pour la VIHR ( Alliance ou Ligue des Verts ), en plus donc de la Première Ministre sortante.
Le chef du KOK, le parti conservateur, Jyrki Katainen, qu’on peut considérer comme le plus sérieux candidat au poste de Premier Ministre, a quitté son terrain d’élection ( la Savonie du Nord, la région de Tampere ) pour la circonscription d’Uusimaa, autour de Helsinki où est également élu le leader des Vrais Finlandais, Timo Soini.
La chef de file des chrétiens démocrates ( les KD ), aussi conservateurs que les Vrais Finlandais sur les questions de société et l’immigration, Paivi Räsänen, s’est fait élire dans la circonscription de Häme, tandis que le chef de file du Parti Populaire Suédois ( RKP ), ancien Ministre, Stefan Wallin, a été réélu ( en 4e position de la circonscription ) en Finlande Sud Occidentale ( région dont la première ville est Turku ).
Enfin, la jeune leader des sociaux démocrates, Jutta Urpilainen ( 35 ans ), s’est fait réélire dans la région d’Ostrobothnie du Sud.
Parti par parti, l’analyse du scrutin est la suivante.
Commençons par les premiers, c'est-à -dire les conservateurs du Kansallinen Kokoomus, qui avaient échoué à devenir premiers en 2007 avec Sauli Ninisto, mais ont réussi cette fois à prendre la première place.
Hormis le cas des Iles Aland, où il n’y avait qu’une seule liste en présence ( celle du MUUT que j’ai imprudemment classé à droite dans un message précédent ), le KOK obtient des députés dans l’ensemble des circonscriptions.
Toutefois, ses presque 600 000 électeurs sont largement concentrés dans le Sud du pays : 6 sièges sur la capitale avec 94 762 voix et 27,3 % ( ce qui traduit pourtant une perte d’influence de 2,7 points et 2 sièges ), 11 sièges dans la région d’Uusimaa ( autour d’Helsinki avec Espoo et Vantaa ) et 143 848 voix.
Le KOK arrive également en tête en Finlande sud occidentale ( région de Turku avec 23 % des voix ), en Pirkanmaa ( région de Tampere, avec 5 élus et 22,3 %).
Il perd 6 sièges au total : 2 sur Helsinki, 1 sur Turku et sa région, 1 sur la région de Häme ( Lahti ), 1 sur la région de Kymi ( Kotka ), 1 en Sud Savonie ( région de Mikkeli ), 1 en Ostrobothnie ( Oulu ) mais il gagne un siège en Finlande centrale.
A noter qu’il préserve de 200 voix son 11e élu dans la circonscription d’Uusimaa.
Au final, le parti passe de 22,3 Ã 20,4 % des suffrages.
Les sociaux démocrates du SDP arrivent en seconde position avec 19,1 % ( 21,4 % en 2007 ) et leur représentation parlementaire est, elle aussi généralisée à l’ensemble du pays, même si le parti doit laisser le plus souvent le KOK ou le KESK devant lui.
Le SDP est en tête dans la région de Satakunta ( capitale Pori ) où il devance de 473 voix les Vrais Finlandais du PS ; dans la région de Häme ( Lahti ) où il devance le KOK de 3 380 voix ; dans celle de Kymi où il obtient 2 217 voix de plus que les PS et la Carélie du Nord où il devance le KESK de 192 voix.
La performance globale du SDP se traduit par la perte d’un siège à Helsinki, d’un autre sur Tampere, d’un troisième sur Pori, d’un autre en Finlande centrale, contre un gain en Savonie du Sud.
Passons au cas des Vrais Finlandais.
Au départ, nous comptions, pour ce parti, 2 députés sur Uusimaa, 1 sur Tampere, 1 en Savonie du Nord ( Kuopio ), 1 sur l’Ostrobothnie méridionale.
Et, maintenant nous avons des élus dans toutes les circonscriptions sans que le parti ne se positionne cependant en tête où que ce soit.
Seulement voilà , si les PS ne font encore que « 12,9 » % sur Helsinki, ils font 23,7 % en Satakunta, 20,6 sur Häme, 21,1 dans la région de Tampere, 23,3 % dans le Kymi, 23,1 % en Carélie du Nord, entre autres.
Ils sont en tête dans une ville comme Pori ( 25 % des votes au lieu de 4,1 % ).
Leur progression, générale dans tout le pays ( 15 points de plus en fait ) : ainsi, en Finlande Sud Occidentale, les PS passent de 6 168 à 46 916 votes, prenant des voix à tous les partis et recueillant notamment une large adhésion chez les nouveaux votants.
Le KESK centriste a subi une défaite très sensible.
La perte de 16 des 51 sortants consacre l’échec du parti, matérialisée par la perte de près de 180 000 voix de plus de 7 % en pourcentage.
Le KESK perd 2 élus sur Uusimaa, passant sous les 10 % des votes, 1 élu sur Turku où il obtient 11,6 %, 2 élus en Satakunta, où l’une des pertes est imputable à l’accord passé avec les démocrates chrétiens qui ont pu avoir un élu de ce fait, 1 élu en Häme, 1 élu en Pirkanmaa, 1 sur le Kymi, 1 en Savonie du Nord ( où il perd 10 %, passant notamment de la 1ere à la 4e place sur Kuopio, la capitale de la région ), 1 siège en Carélie du Nord où il cède la 1ere place au SDP, 2 sièges en Ostrobothnie du Sud où il est clairement victime de la poussée des PS, 1 en Finlande Centrale où il passe de la 1ere à la 4e place sur Jyvaskyla, la capitale de la province et ville natale de l’ancien Premier Ministre Vanhanen.
Le KESK perd également 3 sièges en Ostrobothnie du Nord ( Oulu ), passant de 43,1 à 33,4 % dans ce qui est encore sa principale région d’influence.
Dans cette région, le parti du Centre est la victime d’une évolution du rapport de forces ainsi décrite :
En 2007, le KESK avait fait 43,1 % des voix, suivi de loin par l’Alliance de Gauche (16,1 %), le KOK (14 %) et le SDP (12,8 %).
Les Verts (6,2 %) avaient obtenu un élu mais les Vrais Finlandais (3,5 %) et le KD (3,1 %) n’avaient pas eu assez de votes pour participer à la répartition des 18 sièges en jeu.
Cette année, les Vrais Finlandais font irruption dans le paysage local et, avec 20,2 %, viennent chercher 4 des sièges, confisqués au KESK ( pour 3 ) et au KOK ( pour le 4e).
Enfin, le KESK faiblit en Laponie, sans perdre d’élu, puisqu’il doit à la baisse d’influence de la VAS, l’alliance de gauche, la matérialisation, avec un siège, de la poussée des PS.
A noter que le troisième siège de Laponie du KESK a été préservé uniquement du fait de l’application de la règle de la plus forte moyenne car son titulaire a obtenu moins de votes préférentiels que la seconde candidate de l’alliance de gauche.
L’Alliance de gauche est celui des partis habituels de la vie politique finlandaise à ne pas avoir subi une très sensible réduction de son influence.
Les eurocommunistes finnois n’ont globalement perdu qu’un peu moins de 6 000 voix sur le pays mais le découpage électoral les prive finalement de trois élus.
La VAS perd ainsi un siège dans la région d’Uusimaa ( de 200 voix face aux conservateurs ), un siège en Pirkanmaa ( à 800 voix de moyenne face aux conservateurs et malgré un meilleur score personnel de la candidate par rapport à deux des élus ), son siège de Kymi, malgré le 8e score personnel de son candidat ( le parti est en quelque sorte victime de la poussée des PS, comme de la résistance des KD qui ont mieux tenu leur pourcentage ) et un siège en Laponie dans les conditions ci-dessus décrites.
Notons tout de même que l’alliance a gagné un siège sur Helsinki, en réalisant une progression de près de 15 000 votes sur 2007.
Le bilan de la VAS est donc mitigé, l’alliance ayant des élus dans 10 des 15 circonscriptions.
Les Verts de la Ligue Ecologiste ont perdu 5 de leurs 15 élus sortants ( ils ont participé, avec le KESK, le KOK et le RKP, à la gestion du pays ) et environ 10 % de leurs voix de 2007.
Le résultat peut évidemment être interprété de manière fort paradoxale, notamment du fait de la polémique née de l’accident de Fukushima comme de celle, plus locale, liée à la construction de l’EPR finlandais.
Toujours est il que les Verts ont 4 élus sur Helsinki, toujours plus leur zone de force, 3 sur Uusimaa, 1 sur Turku, 1 sur Tampere, et le dernier sur Oulu.
C'est-à -dire que la Vihreä liitto ( ou VIHR en abrégé ) a une influence et une représentation largement concentrée sur le Sud du pays.
16,7 % sur Helsinki, 11,6 % à Espoo, 10 % à Vantaa, 11,4 % sur Turku, 12,1 % sur Tampere ou encore 8,8 % à Oulu, voilà qui caractérise un électorat écologiste largement urbain puisque, notamment pour la Finlande Sud Occidentale, la région de Tampere ou l’Ostrobothnie, le score de chacune de ces villes constitue l’essentiel des votes VIHR de la province.
D’une certaine manière, la perte d’influence des Verts semble donc liée au fait qu’ils ont été associés au gouvernement en place.
Ceci dit, le résultat des Verts complète d’une certaine manière le score de la gauche finlandaise, un score loin de constituer le signe d’une vitalité particulière.
Si les trois principales forces de gauche font 44,6 % des votes sur la capitale (48,3 % en 2007 ), elles ne font plus que 33,5 % sur Uusimaa, 36,4 % sur Turku et sa région (41,7 % en 2007), entre autres cas.
Elles n’arrivent d’ailleurs pas à atteindre, en dehors de la capitale, le seuil des 40 % des voix dans quelque région que ce soit, avec des scores allant de 19,1 % en Ostrobothnie méridionale ( région fortement suédoise où le RKP finit second ) à 38,7 % dans la province voisine de Satakunta.
Mais la déperdition des forces de gauche en Laponie ( chute de 9,5 points ) montre que cet électorat a été clairement tenté par le discours des PS.
Le paysage politique finlandais est donc bouleversé par le résultat de ces élections avec une gauche dotée de 66 élus et disposant du soutien de 34,4 % de l’électorat ; une droite et un centre a priori disposés à gouverner ensemble ( KOK, KESK, RKP, KD ) comptant sur 94 élus et le soutien de 44,5 % des électeurs et des Vrais Finnois nantis de 39 élus ( assez pour faire tomber tout Gouvernement qui aurait aussi la gauche contre lui ) et de 19 % des suffrages.
Rappelons que l’Assemblée sortante comptait 101 élus du KESK et du KOK, contre 79 aujourd’hui.