de vudeloin » Dim 9 Sep 2012 01:55
Même si la relecture du fil de discussion permet de constater que nous nous sommes quelque peu répétés (orional avait eu le bon goût de donner les résultats de Nice et de Toulouse que j'ai remis ces derniers jours et certaines précisions de découpage avaient déjà été apportées), eh bien, nous allons nous répéter encore puisque je vais vous donner quelques indications sur le vote des électeurs dans deux régions assez emblématiques : PACA et Languedoc Roussillon.
Dans la région Provence, la gauche disposait alors de positions assez nettement différentes d'aujourd'hui.
Ballottages dans les deux principales villes du département, Digne et Manosque, la ville du bon docteur Romieu et celle marquée par Jean Le Bleu.
Par contre, Gap réélut son équipe municipale de droite qui avait conquis en 1971 la mairie au radical Emile Didier, père de l'actuel maire (ex PRG passé à l'UMP) de la ville.
Le premier tour des municipales dans les Alpes Maritimes fut marqué par la victoire de la liste de Pierre Merli, radical valoisien à Antibes, de la liste Cornut Gentille à Cannes (sur une équipe de gauche et de centre gauche comprenant, entre autres, onze élus PS, cinq élus PCF, quatre MRG et neuf divers gauche), de la liste Vanco (PCF) à Beausoleil, alors la banlieue des ouvriers et employés de la Principauté de Monaco, le succès de la liste Sauvaigo à Cagnes sur Mer ou encore la victoire de Louise Moreau à Mandelieu la Napoule.
Dans le cas de Vallauris, comme cela fut déjà précisé, un adjoint PS du maire communiste de la ville (Paul Derigon, élu depuis la Libération), Pierre Donnet fit une liste dissidente comportant un certain nombre d'élus socialistes en rupture de ban avec le programme commun et des élus de droite (je crois que le rapport était de treize élus ex socialistes sur vingt sept candidats de la liste Donnet) qui l'emporta avec juste un peu plus de 50 % des suffrages.
Dans les Bouches du Rhône, je crois que le millésime 1977 n'a jamais été aussi positif pour les forces de gauche (malgré sa division historique sur Marseille) que n'importe quel autre renouvellement municipal précédent ou ultérieur.
Ballottage général sur les six secteurs marseillais, où la configuration des listes était assez simple : d'une part les listes Defferre, composées essentiellement de militants PS et de personnalités issues du MRG (guère influent cependant) et de la société civile ; ensuite les listes UDF et RPR, comportant notamment une bonne partie des anciens élus centristes des listes Defferre de 1971 et, enfin, les listes communistes animées entre autres par les députés PCF de la ville à l'époque, comme l'ancien Ministre François Billoux et Georges Lazzarino.
Pour le reste du département, si Salon de Provence reconduit sans problème le centriste Jean Francou (sénateur UCDP du département de 1971 à 1989, où il verra son successeur en mairie, le PS André Vallet lui succéder au Luxembourg), le PCF obtient dès le premier tour la réélection de ses sortants à Arles (Jacques Perrot), Martigues (Paul Lombard), Aubagne (Edmond Garcin), Port de Bouc (René Rieubon) et conquiert deux positions de force avec Gardanne (Roger Mei) et, surtout La Ciotat (Louis Perrimond).
Si dans le premier cas, la mairie de Gardanne avait un élu socialiste sortant, c'est la force et la position du PCF sur place qui plaça en tête de la gauche la candidature communiste.
Dans le cas de La Ciotat, l'équipe municipale sortante était constituée de socialistes et d'élus de droite et du centre.
Lors du scrutin de 1977, dans cette ville « double », à la fois balnéaire et ouvrière (le Chantier naval dispose encore d'une certaine activité à ce moment là ), le PCF prend la tête d'une liste regroupant communistes, socialistes attachés à l'union de la gauche et autres personnalités de gauche tandis que les socialistes membres de la majorité municipale constituent une liste propre.
L'élan de 1977 est tel que la liste menée par les communistes dépasse la majorité absolue dès le premier tour et ramasse la mise.
Dans le Var, le PCF maintient ses positions en gardant la ville de La Seyne sur Mer et celle de La Garde, tandis que le cacique PS Edouard Soldani, à l'époque Président du Conseil général, est réélu à Draguignan.
Mais Edouard Soldani est comme Gaston Defferre : il ne goûte pas beaucoup les délices de l'Union de la gauche et il s'est fait réélire avec une équipe comprenant de bons élus socialistes et quelques élus sans étiquette qui sont, en fait, des élus de droite.
Enfin, dans le Vaucluse, Avignon réélit son maire PS dès le premier tour (en l'occurrence, Henri Duffaut), à la différence près que l'intéressé mène une liste d'Union de la gauche à la place d'une liste PS « troisième force » comme en 1971.
Le PS gagne la mairie de Cavaillon sur la droite, tandis que la droite gagne celle de l'Isle sur la Sorgue.
Le PCF, pour sa part, conserve sa mairie de Sorgues.
(Rappelons aux personnes peu familières du provençal que le mot sorgue désigne les sources, ou les rivières, parfois présentes dans le paysage local, notamment à l'Isle où la rivière traverse la ville en passant par des norias caractéristiques, ou à Fontaine de Vaucluse où la Sorgue se fait parfois attendre).
Le second tour donne lieu à quelques menues surprises et résultats étonnants.
Dans les Alpes de Haute Provence, le RPR Pierre Rinaldi (qui finira invalidé pour détournement financier) est élu, par le jeu du panachage avec 14 élus sur 27 au sein du conseil municipal de Digne.
Pour ceux qui l'auraient oublié, en 1977, nous avions un mode de scrutin comportant deux types.
Dans les villes de plus de 30 000 habitants, le scrutin consistait à élire des listes bloquées, la liste majoritaire, fût ce d'une voix, obtenant la totalité des sièges.
Dans les autres villes, le vote préférentiel (panachage) était en vigueur et étaient élus les premiers candidats, quelque soit leur liste d'origine, dès lors qu'ils disposaient soit de la majorité absolue soit d'une majorité relative des suffrages.
A Digne les Bains, sur l'ensemble des deux tours, la liste RPR obtint donc 14 élus sur 27 à ce jeu et prit la majorité au PS dans cette ville, jusqu'alors gérée par une équipe de « troisième force ».
A Manosque, par contre, ce fut la gauche, avec le MRG Robert Honde, qui va emporter le scrutin de panachage en gagnant 15 des 27 sièges en jeu dans la ville de Giono.
A l'inverse de Digne, c'est une liste de droite qui avait gagné en 1971.
Le PS était également aux commandes des mairies de Forcalquier (avec le député Delorme) et de Sisteron.
Dans les Hautes Alpes, le RI Paul Dijoud (il fut Ministre de Giscard) est reconduit maire de Briançon, mais il dut laisser deux sièges au conseil municipal à la liste du socialiste Robert de Caumont qui réussira, un temps, à devenir maire de la cité alpestre.
Dans les Alpes Maritimes, trois changements au second tour.
La mairie du Cannet Rocheville est gagnée par le RPR Pierre Bachelet (sans lien quelconque avec le chanteur populaire) sur le centriste Gaston Ducros, élu depuis la Libération.
Celle du Menton vit la victoire d'Emmanuel Aubert (RPR) sur le centriste Francis Palmero, alors sénateur du département.
Enfin, la ville de Grasse passa du RI Hervé de Fontmichel au communiste Georges Vassalo, élu un peu à la surprise générale, même si le pays grassois n'est pas forcément le bastion intégral de la droite (l'élection en 1997 d'André Aschieri l'a suffisamment montré).
Le style De Fontmichel était cependant assez peu sympathique, la ville de Grasse ayant notamment connu des « ratonnades «, ce que l'édile grassois n'avait pas le moins du monde condamné.
Hervé de Fontmichel sera élu de nouveau en 1983, en élargissant son équipe municipale jusqu'au Front National, le plus important pour lui étant alors de se « débarrasser des socialo communistes ».
Dans les Bouches du Rhône, la liste Ciccolini fut élue, liste regroupant socialistes, divers gauche et radicaux de gauche, sans participation communiste, sur Aix en Provence.
Sur Marignane, après un premier tour où il fut tenu en échec par la présence d'une liste PCF et d'une liste PS, le maire DVD Laurence Deleuil fut réélu au second tour, une partie des électeurs socialistes ne votant manifestement pas pour la liste de gauche unie.
Il faut dire que l'élection municipale à Marignane, est, pour une part, une sorte de prolongement des élections professionnelles de l'Aérospatiale (aujourd'hui EADS), où le syndicat FO, composé à la fois de gens proches de la droite et du PS, s'opposait fortement au syndicat CGT, où l'on trouvait les communistes...
A Miramas, le PCF Georges Thorrand emporte la mairie de droite sortante, dans cette ville cheminote de l'Ouest du département.
A Istres, victoire de la liste de gauche menée par le PS Jacques Siffre, sur la municipalité RI sortante, une victoire particulièrement serrée puisque la moyenne des voix des candidats de gauche fut de 4 340 bulletins tandis que la liste de droite obtint une moyenne de 4 248 bulletins.
(on voit qu'Istres s'est quelque peu développée depuis).
Le PCF emporta aussi la mairie de Vitrolles (qui n'avait alors qu'un lointain rapport avec la ville actuelle) et le PS celle de Saint Victoret.
A noter que Victor Mellan, directeur de cabinet de Gaston Defferre, fut élu maire des Pennes Mirabeau sur une liste PS autonome, face au PCF et qu'un socialiste opposé au programme commun fut reconduit à la mairie de Carry le Rouet en s'alliant avec des candidats de droite.
Dans d'autres villes, Roland Povinelli (PS) commençait son règne sur Allauch, Lucienne Martin (PCF) était reconduite à Auriol, Roger Martin (PCF) continuait son mandat sur Berre l'Etang.
Le PS gérait également Bouc Bel Air, Châteauneuf les Martigues (avec Henri d'Attilio, futur député et sénateur) ou encore Tarascon et Le Puy Sainte Réparade, avec le truculent Louis Philibert, président du Conseil général, sans oublier Les Saintes Maries de la Mer.
Le PCF, pour sa part, gérait des villes et communes comme Septèmes les Vallons, La Penne sur Huveaune, Port Saint Louis du Rhône (avec le député Vincent Porelli), Orgon, Noves, Mimet ou encore Gréasque dans le bassin minier de Provence.
De même pour Le Rove et Roquevaire.
Un petit détour par Marseille, enfin.
Dans le premier secteur (1er et 4e arrondissements), ce fut la liste Defferre menée par Jacques Rocca Serra qui fut élue.
Dans le second secteur (2e et 3e arrondissements) succès de la liste Vigouroux pour Defferre.
Dans le troisième secteur (6e et 7e arrondissements), victoire de Gaston Defferre en personne.
Dans le quatrième secteur (8e et 9e arrondissements), victoire du député socialiste Charles Emile Loo, qui sera battu l'année suivante aux législatives par un certain Jean Claude Gaudin.
Dans le cinquième secteur (5e et 10e arrondissements), victoire de la sénatrice Irma Rapuzzi, pour les listes Defferre, après avoir devancé au premier tour la liste communiste de Georges Lazzarino et la liste de droite menée par Robert Gardeil.
Dans le sixième secteur (11e et 12e arrondissements), victoire du socialiste Jean Bonat.
Dans le septième secteur (13e et 14e arrondissements), succès du socialiste Marius Masse, face au député communiste François Billoux, ancien Ministre.
Marius Masse sera battu l'année suivante aux législatives par le candidat communiste Marcel Tassy.
Enfin, dans le huitième secteur (15e et 16e arrondissements), la victoire était revenue à la liste PCF menée par Pascal Posado qui avait manqué à une poignée de voix (moins de cinquante) l'élection au premier tour.
Dans le département du Var, la mairie de Toulon était restée aux mains de Maurice Arreckx, dont la carrière politique sera interrompue le jour de son arrestation dans son bureau parisien de parlementaire au Palais du Luxembourg.
Au premier tour, Maurice Arreckx, le « patron du Var », avait devancé, dans une primaire à droite, le jeune et ambitieux député RPR Aymeric Simon Lorière.
Cet échec du jeune député néo gaulliste connaît d'ailleurs un prolongement tragique puisqu'on retrouvera, un mois après les municipales de 1977, le corps sans vie d'Aymeric Simon Lorière à son domicile parisien.
Une des premières victimes, apparemment, d'une vie politique varoise qui n'a jamais été connue, ces dernières décennies, pour son absolue tranquillité.
Le patron du Var vit, cette même année 1977, la ville de Hyères se choisir un maire socialiste, élu face à une mairie RPR sortante, et à l'issue d'un duel de premier tour entre communistes et socialistes de peu favorable au PS.Â
A tel point que la liste d'union de la gauche du second tour comportait la moitié plus un de candidats issus de la liste PS et la moitié moins un de candidats issus de la liste PCF.Â
Un divers gauche, ex socialiste peu favorable au programme commun, fut reconduit à Six Fours Les Plages.
Par contre, Fréjus, tenu par une mairie centriste alliée au PS, put assister au retour du fils prodigue, avec la première élection de François Léotard, venant prendre la succession de son père André, qui avait été battu en 1971.
De même, Saint Raphaël, jusque là gérée par un maire radical de gauche, vit s'imposer une liste RPR menée par René Georges Laurin, ancien député du département et qui sera aussi Sénateur à la fin de sa carrière politique.
Enfin, dans le Vaucluse, le PCF gagna sur la droite les mairies de Bollène (Georges Sabatier) et d'Orange (Louis Giorgi), battant dans ce cas le député RPR Jacques Bérard, qui deviendra lui aussi Sénateur à la fin de sa carrière politique.
Le PS, pour sa part, gagna la mairie d'Apt, conservait Pertuis ou Valréas, tandis que la droite se trouvait en quelque sorte confinée sur Carpentras (avec le RI Maurice Charretier) ou Le Pontet.
Nous verrons la suite dans un second message pour le Languedoc...