A cette heure où se multiplient les pronostics sur le nombre des conseillers généraux frontistes élus au soir du 28 mars prochain ou sur le sursaut éventuel des abstentionnistes du premier tour, je vous invite un bref instant à vous retourner en arrière vers le passé. La vie électorale éclairée par l'histoire révèle l'existence de tendances politiques anciennes enracinées dans des traditions tenaces et travaillées par des mutations d'ordre économique et social. Ce constat relève de la pure évidence certes, mais les médias classiques, souvent amnésiques et enfermés dans un présent empêchant tout raisonnement sérieux et argumenté, ont tendance à l'ignorer.
Cette nouvelle rubrique du forum a cette vocation de remédier modestement à ce manque d'informations et d'explications historiques des phénomènes politiques et électoraux. Ainsi, je vous invite à examiner cette présente carte établie sur la base du fond de carte du talentueux Hashemite. Elle a pour objet de présenter une photographie de la France électorale à l'aube des années 80 suite aux élections cantonales de 1976 et 1979.
![Image](http://img339.imageshack.us/img339/7206/canton1976.png)
Le contexte est connu : les chocs pétroliers aggravant l'inflation et le chômage en France, une majorité U.D.F.-R.P.R. sortie miraculeusement du scrutin législatif de 1978, une gauche divisée avec un P.S. conquérant et un P.C.F. doutant de sa propre identité passant d'un eurocommunisme critique vis-à -vis de l'Est à un alignement sur Moscou dont le point d'orgue fut le soutien à l'invasion soviétique en Afghanistan. Le "quadrille bipolaire", notion chère au professeur Duverger, est alors à son apogée. L'U.D.F., le R.P.R. à droite, le P.S. et le P.C.F. à gauche obtiennent ensemble plus de 90% des suffrages exprimés marginalisant les extrêmes tandis que l'écologie politique émerge timidement.
Cette carte revèle un visage de la France qui sera bouleversée dans les années 80. Le poids des élus locaux sans étiquette ou indépendant n'est plus à démontrer. La gauche socialiste progresse, consolide ses bases traditionnelles du Sud-Ouest et du Nord et conquiert le grand Ouest supplantant le P.S.U. en Bretagne et séduisant un électorat démocrate chrétien progressiste. Le P.C.F. est conforté dans ses bastions comme le M.R.G. même si ils sont l'un et l'autre chahutés par le concurrent socialiste. A droite, l'U.D.F. et surtout les divers droite surclassent nettement un R.P.R. accroché au sud du Massif Central grâce à l'influence personnelle de Jacques Chirac ainsi qu'en Alsace-Moselle où la fidèlité ancienne à la figure du Général de Gaulle reste présente. Notons aussi la survivance d'un socialisme indépendant, mêlant démocratie socialiste et rejet du communisme, dans les Pyrénées Orientales de Paul Alduy, la Sarthe de Fernand Poignant et bien sûr la Somme de Max Lejeune. Certains de ces élus passeront à droite par la passerelle du giscardisme en créant le P.S.D. partie intégrante de l'U.D.F. avec Georges Donnez et le facétieux André Santini.
Je suis prêt à communiquer cette carte en format png à qui le souhaitera.
Bien à vous.