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Les élections législatives pour les membres du gouvernement

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Re: Les élections législatives pour les membres du gouvernement

Messagede PhB » Lun 20 Juin 2022 10:57

Emmanuel Macron s'est tiré une balle dans le pied en revendiquant la règle de ne pas garder au gouvernement les ministres battus dans les urnes. Certes ça donne un affichage populaire, voire populiste, de "je respecte le verdict des urnes". En outre ça correspond bien au Macronisme qui a plutôt tendance à ne s'occuper que des vainqueurs, et à laisser tomber les autres.
Cependant cette règle est stupide :
Selon que le ministre est candidat dans une circonscription imperdable ou disputée, il pourra prolonger - ou pas - son bail au gouvernement sans que la qualité de son travail soit en cause ?
Que faire des ministres prudents qui ne se sont pas présentés aux élections ?
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Re: Les élections législatives pour les membres du gouvernement

Messagede Corondar » Lun 20 Juin 2022 12:21

PhB a écrit:Emmanuel Macron s'est tiré une balle dans le pied en revendiquant la règle de ne pas garder au gouvernement les ministres battus dans les urnes. Certes ça donne un affichage populaire, voire populiste, de "je respecte le verdict des urnes". En outre ça correspond bien au Macronisme qui a plutôt tendance à ne s'occuper que des vainqueurs, et à laisser tomber les autres.
Cependant cette règle est stupide :
Selon que le ministre est candidat dans une circonscription imperdable ou disputée, il pourra prolonger - ou pas - son bail au gouvernement sans que la qualité de son travail soit en cause ?
Que faire des ministres prudents qui ne se sont pas présentés aux élections ?


Outre que je trouve cette règle très saine (un ministre qui n'a pas obtenu la confiance de ses administrés dans sa circonscription peut difficilement se prévaloir d'une légitimité forte dans son action publique), je vois au contraire tout un tas d'avantages pour Macron à avoir quelques ministres et secrétaires d'état recalés : ça libère des postes pour élargir le gouvernement et envoyer quelques signes aux différents groupes parlementaires, signes qui seront nécessaires pour assurer la viabilité d'une majorité de vote à l'Assemblée...
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Re: Les élections législatives pour les membres du gouvernement

Messagede jean24 » Lun 20 Juin 2022 18:19

Corondar a écrit:
PhB a écrit:Emmanuel Macron s'est tiré une balle dans le pied en revendiquant la règle de ne pas garder au gouvernement les ministres battus dans les urnes. Certes ça donne un affichage populaire, voire populiste, de "je respecte le verdict des urnes". En outre ça correspond bien au Macronisme qui a plutôt tendance à ne s'occuper que des vainqueurs, et à laisser tomber les autres.
Cependant cette règle est stupide :
Selon que le ministre est candidat dans une circonscription imperdable ou disputée, il pourra prolonger - ou pas - son bail au gouvernement sans que la qualité de son travail soit en cause ?
Que faire des ministres prudents qui ne se sont pas présentés aux élections ?


Outre que je trouve cette règle très saine (un ministre qui n'a pas obtenu la confiance de ses administrés dans sa circonscription peut difficilement se prévaloir d'une légitimité forte dans son action publique), je vois au contraire tout un tas d'avantages pour Macron à avoir quelques ministres et secrétaires d'état recalés : ça libère des postes pour élargir le gouvernement et envoyer quelques signes aux différents groupes parlementaires, signes qui seront nécessaires pour assurer la viabilité d'une majorité de vote à l'Assemblée...

Au contraire je trouve cela inutile. La ministre Bourguignon a surperformé par rapport à Macron et à la présidentielle, mais n'étant pas dans un bastion ça n'a pas suffit, elle a perdue et elle doit partir, alors que Borne (entre autre) a fait moins bien que Macron au second tour (Macron était face au RN, Borne face à la NUPES il est vrai mais le pourcentage reste moins élevé) mais reste ministre. De plus Lemaire ne s'est pas présenté, et sa circonscription passe au RN ! Soit on instaure la règle anglaise qui impose aux ministres d'être issus du parlement, soit on enlève cette règle tacite sans grand intérêt pour la France qui n'est pas un régime parlementaire… pas avant hier vingt heures en tout cas !
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Re: Les élections législatives pour les membres du gouvernement

Messagede Eco92 » Lun 20 Juin 2022 19:01

Je suis d'accord avec jean24, je trouve cette règle absurde et c'est une prime au manque de courage.
Dans d'autres pays, où les ministres doivent être députés, c'est évidemment différent.
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Re: Les élections législatives pour les membres du gouvernement

Messagede emile » Lun 20 Juin 2022 19:15

Exact. Totalement stupide puisqu'aucune loi n'oblige un ministre à être parlementaire. Et Dieu sait que Macron a choisi des ministres sortis des grands cabinets du privé, des administrations, etc.
En plus, la règle a été imaginée par Sarkozy. Cela a sorti Jupé du gouvernement en 2007 au motif qu'il était battu. Et il a fini par retourner au gouvernement trois ans plus tard.
Alors oui, ça se comprend. Mais cela sert surtout à faire des ministres des cibles pour l'opposition, et n'a pas la vertu de pousser des candidatures fortes et d'arracher des sièges à l'opposition.
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Re: Les élections législatives pour les membres du gouvernement

Messagede jordan » Mar 21 Juin 2022 09:03

Devoir renoncer à un mandat ministériel pour cause de défaite aux élections législatives n'est tout de même pas nouveau, et n'a pas attendu les présidences ni d'Emmanuel Macron, ni même de Nicolas Sarkozy.

Si sous la IVe République le mandat parlementaire était pour ainsi dire impératif (les ministres conservaient d'ailleurs leur mandat parlementaire pendant et après leur titulature), le fondateur de la Ve, Charles de Gaulle lui-même, a pu tenir compte des défaites aux législatives des aspirants ministres.

La chronique du temps retient qu'en 1967, un homme de confiance de de Gaulle qu'il tenait en très haute estime, Maurice Couve de Murville, son ministre des Affaires Etrangères depuis 9 ans, était pressenti par le Président pour occuper Matignon après Georges Pompidou, dont l'ambition était grandissante.

Pour asseoir sa stature politique nationale, Maurice Couve de Murville fut candidat aux élections législatives de 1967 dans le VIIe arrondissement de Paris (alors 5e circonscription). Ces élections avaient vu également le parti présidentiel gaulliste pousser maints jeunes loups à l'assaut des circonscriptions législatives tous azimuts, notamment dans les vieux fiefs d'opposition parlementaire en Auvergne, Limousin ou Midi-Pyrénées, dans le sillage de George Pompidou se présentant dans le Cantal. Ce fut le début d'une longue carrière politique pour un jeune énarque nommé Jacques Chirac en Corrèze...

Maurice Couve de Murville, moins aventureux, jeta donc son dévolu sur la circonscription parisienne qui abrite le Palais Bourbon et l'essentiel des ministères. Son principal adversaire était Edouard Frédéric-Dupont, dit "Dupont des Loges", car il avait bâti une bonne part de son action parlementaire (commencée dès 1936) sur l'amélioration du statut professionnel des concierges. Concierges dont on disait qu'ils "faisaient" l'élection dans le VIIe arrondissement, arrondissement de bureaux et de logements bourgeois.

Frédéric-Dupont s'avéra un sortant tenace et solide, et Couve de Murville fut battu. Georges Pompidou dut en ressentir une peine toute relative.

En tout état de cause, Couve ne fut pas nommé à Matignon (il resta cependant au Quai d'Orsay, à un poste moins "politique"). Pompidou fut lui élu dans le Cantal, et sa jeune garde avec lui (Chirac en Corrèze, Pons dans le Lot, Limouzy dans le Tarn...).
Ce n'est qu'après les élections législatives anticipées de 1968, très largement remportées par l'UNR et les pompidoliens, que Couve de Murville fut nommé à Matignon (sans avoir été candidat cette fois).

Pour la petite histoire, Couve de Murville tenta à nouveau sa chance aux législatives lors d'une partielle en automne 1969, dans la 4e circo des Yvelines (La Celle St Cloud, Marly le Roi, Le Chesnay), circonscription bourgeoise largement à sa portée. Il y fut pourtant à nouveau battu, cette fois par un jeune énarque inconnu nommé... Michel Rocard, lui aussi à l'aube d'une brillante carrière !
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Re: Les élections législatives pour les membres du gouvernement

Messagede jordan » Mar 21 Juin 2022 09:16

François Mitterrand institua par la suite une "jurisprudence" particulière : un député sortant qui serait battu dans les urnes ne pourrait pas être ministre. En revanche un non-sortant pouvait se présenter, être battu, et devenir ministre. Ce fut par exemple le cas de Bernard Kouchner, envoyé aux législatives de 1988 dans le fief communiste de St-Amand les Eaux. Arrivé 2e derrière le sortant communiste, il dut renoncer au 2nd tour par le "désistement républicain" de l'époque. Mais entama une carrière ministérielle qui devait l'emmener jusqu'aux années Sarkozy...

En 1988, nombreux furent les nouveaux ministres "d'ouverture" ou de la société civile qui furent lancés aux élections législatives, sans craindre pour leur maroquin. Beaucoup furent même élus, profitant de l'élan de la majorité présidentielle (Stirn, Stoléru...). A l'époque, la dissolution immédiate avait permis de tenir les législatives juste un mois après la présidentielle, et non deux comme cette année.

Il me semble que le seul cas de figure connu d'un sortant battu qui est empêché d'être ministre sous François Mitterrand fut la malheureuse Catherine Trautmann, sortante aux législatives de 1986 à la proportionnelle, et battue en circonscription à Strasbourg en 1988. Elle obtiendra par la suite ses lettres de noblesse en devenant maire de Strasbourg à la surprise générale.
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Re: Les élections législatives pour les membres du gouvernement

Messagede Corondar » Mar 21 Juin 2022 10:39

J entends les remarques de bon sens des contributeurs qui pointent l hypocrisie de cette règle non écrite. Mais vous êtes conscients que si Macron ne respectait pas cette "tradition", dans la minute tous les partis d opposition, sans exception, entonneraient le refrain du non respect de la démocratie et du choix des électeurs, accusant Macron d être un technocrate dans sa tour d ivoire, déconnecté des Français ?
Et je suis persuadé que tout un tas de députés utiliseraient cet argument pour justifier de renverser le gouvernement...
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Re: Les élections législatives pour les membres du gouvernement

Messagede lindet » Mar 21 Juin 2022 10:45

Pour la petite histoire, si, en 1968, Maurice Couve de Murville se présenta à nouveau aux élections, mais il fut plus prudent. Au lieu de chercher à conquérir une circonscription, il s'entendit avec Raymond Bousquet député gaulliste du 8e arrondissement (donc en face du 7e mais rive droite) pour prendre la première place en le gardant comme suppléant. Il fut élu dès l 1er tour de scrutin, devint Premier ministre et Bousquet à nouveau député jusqu'en 1973. Cela explique pourquoi en 1969 il ne chercha pas à redevenir député en privant l''aimable parlementaire de son siège mais accepta la proposition de Pierre Clostermann de démissionner afin de devenir député des Yvelines. Mais Michel Rocard fut élu, sur la base d'ailleurs d'une conjonction des voix antigaullistes qui ne dut pas attrister outre-mesure non plus Georges Pompidou.
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Re: Les élections législatives pour les membres du gouvernement

Messagede jordan » Mar 21 Juin 2022 10:52

lindet a écrit:Pour la petite histoire, si, en 1968, Maurice Couve de Murville se présenta à nouveau aux élections, mais il fut plus prudent. Au lieu de chercher à conquérir une circonscription, il s'entendit avec Raymond Bousquet député gaulliste du 8e arrondissement (donc en face du 7e mais rive droite) pour prendre la première place en le gardant comme suppléant. Il fut élu dès l 1er tour de scrutin, devint Premier ministre et Bousquet à nouveau député jusqu'en 1973. Cela explique pourquoi en 1969 il ne chercha pas à redevenir député en privant l''aimable parlementaire de son siège mais accepta la proposition de Pierre Clostermann de démissionner afin de devenir député des Yvelines. Mais Michel Rocard fut élu, sur la base d'ailleurs d'une conjonction des voix antigaullistes qui ne dut pas attrister outre-mesure non plus Georges Pompidou.

Bien vu ! Merci de cette correction bienvenue (:-D
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