de Genaro Flores » Sam 12 Mar 2016 00:58
Les « bébés Vanneste » sur les marches du palais Bourbon !
Etiqueté UDI jusqu’en décembre 2015 avant de rejoindre Les Républicains, Vincent Ledoux, 49 ans, pourrait engranger un très gros score, sans doute supérieur à 40%, à l’occasion de l’élection législative partielle dans la 10ème circonscription du Nord. En revanche, il sera contraint à un tour supplémentaire, la traditionnelle abstention observée lors d’une partielle, raffermie ici par la proximité des législatives de 2017, lui interdisant de franchir la barre fatidique des 25% des inscrits. De plus, la participation sur Roubaix-Tourcoing a toujours été en-dessous de la moyenne nationale comme l’illustrent les législatives de 2012 avec un taux, au 1er tour, de 47,46% sur la 10ème contre 57,22% à l’échelle du pays.
Sinon, Ledoux bénéficiera en tous points d’un contexte favorable :
1 - Sa candidature est placée sous le signe de l’union de la droite et du centre, hormis un marginal, comme il en foisonne à chaque échéance électorale, désireux avant tout de faire parler de lui.
2 - Nichées dans la vallée de la Lys, les communes de Roncq et d’Halluin, respectivement les 3ème et 2ème villes les plus peuplées de la circonscription devraient le plébisciter. La première est celle où il règne quasiment sans partage à compter de 2001, la seconde, celle de son suppléant Gaston Dassonville, 49 ans, qui en tient les rênes depuis deux ans après avoir délogé le PS.
3 – Conquérant aux régionales, le Front national est désormais en veilleuse, planchant, douloureusement il va sans dire, sur un introuvable programme dans l’optique de la présidentielle. N’empêche, il sera le plus farouche adversaire de la droite, capable de lui tenir tête et de la renvoyer dans ses cordes. Y compris au 2ème tour auquel il participera très probablement, et ce pour la troisième fois après les scrutins de 1993 et de 1997 où il était représenté par le gardien du temple Christian Baeckeroot, dorénavant retraité au sein du minuscule Parti de la France que chapeaute Carl Lang.
Enfin, contrairement à de trop nombreux secteurs où le FN n’a qu’une présence théorique en ignorant le terrain et la problématique locale, la postulante Virginie Rosez, 46 ans, bat le pavé. En outre, cette conseillère régionale est enracinée à compter de 2011 dans la très conservatrice commune de Neuville-en-Ferrain (4ème ville la plus peuplée de la circonscription), où elle a rejoint trois ans plus tard le conseil municipal qui n’avait plus d’édile frontiste depuis 2001.
A coup sûr, la formation d’extrême droite y obtiendra son meilleur résultat sur les trois partielles au menu du week-end avec les 2èmes de l’Aisne et des Yvelines.
4 – Enfin, Ledoux n’a pas grand-chose à craindre d’une gauche en lambeaux dans la métropole lilloise, hormis le triangle rosâtre Lille – Villeneuve d’Ascq – Mons-en-Baroeul. L’absence des trois principales figures socialistes tourquennoises, en l’occurrence Michel-François Delannoy (1), 52 ans, Vincent Lanoo (2), 45 ans, et Zina Dahmani (3), 56 ans, en dit long sur leur démobilisation. Une démobilisation qui s’explique par la cruelle défaite, à la fois courte et imprévisible, subie devant le feu follet Gérald Darmanin (Les Républicains), 33 ans, et ce lors des dernières élections municipales à Tourcoing (1ère ville la plus peuplée de la circonscription).
En toute logique, le PS devrait y réaliser ses meilleurs pourcentages, en particulier dans les faubourgs populaires du nord de la ville, où son candidat Alain Mezrag, 51 ans, dispose d’une certaine notoriété dans le quartier de la Bourgogne. Notamment pour y avoir grandi mais aussi pour avoir présidé de 2008 à 2014 son conseil de quartier en tant qu’adjoint de Delannoy, en charge de la prévoyance sociale et de la santé. Auparavant, il avait été conseiller municipal, missionné pour mettre en oeuvre la politique de la ville, durant les trois mandats exercés de 1989 à 2008 par l’emblématique Jean-Pierre Balduyck. Il s’agit donc d’une personnalité reconnue, expérimentée et implantée, même s’il bosse comme travailleur social à Wattrelos, situé dans la circonscription voisine, à savoir la 8ème, aux mains du socialiste Dominique Baert.
Le contexte national ô combien lugubre l’obligera cependant à ravaler ses ambitions, et donc à se contenter de limiter la casse. Avec le secret espoir d’atteindre le 2ème tour, ce qui serait vécu comme une victoire inespérée, et l’assurance pour le tandem qu’il forme avec Eric Zajda, 41 ans, conseiller municipal d’opposition à Roncq, de repartir à l’assaut en 2017.
On relèvera toutefois son étrange volte-face sur la position qu’il adopterait vis-à-vis du gouvernement s’il était élu député. Signataire de la motion B animée par les frondeurs au congrès de Poitiers des 5-7 juin 2015, ce qu’il ne manquait pas de souligner en début de campagne, il annonçait le 4 mars, lors d’une soirée à Roncq, qu’en cas de succès, il ne se rangerait pas à leur côté. Tout en ajoutant qu’il essaierait d’ infléchir la politique mise en place par l’exécutif. De toute évidence, la venue à cette même réunion du Lillois Patrick Kanner, ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, n’est sans doute pas étrangère à son revirement…
Mais le vrai coup de théâtre de cette campagne éclatera au moment où Christian Vanneste, 68 ans, se rappela à son bon souvenir. Discrédité jadis pour ses saillies présumément homophobes, l’ex-patron de la 10ème circonscription de 1993 à 1997 puis de 2002 à 2012 adouba en effet le ticket Ledoux-Dassonville sans que celui-ci… n’y trouve à redire ! Simple échange de bons précédés me diriez-vous, l’actuel président du parti RPF (4) et du think-tank la Droite libre (5) ayant encore en mémoire l’indéfectible soutien apporté à son égard par ses deux poulains. Y compris au 1er tour des législatives de 2012, ce qui n’empêchera pas Vanneste de mordre la poussière en récoltant une humiliante 4ème place avec 13,11%, loin derrière... Darmanin, son ancien protégé, désormais félon, qui finira 2ème avec 24,93%.
Darmanin parti, ses fils spirituels en lice, Vanneste tient cette fois-ci sa revanche, faisant de nouveau de la 10ème sa chasse gardée, et par ricochet, le 20 mars au soir, l’une des circonscriptions les plus à droite de l’Hexagone.
G.F.
(1) Michel-François Delannoy a été : conseiller général du canton de Tourcoing Nord-Est de 1998 à 2011 ; conseiller régional du Nord - Pas-de-Calais de 2010 à 2015 ; premier adjoint au maire de Tourcoing de 2001 à 2008 ; maire de Tourcoing de 2008 à 2014. Depuis 2014, il est conseiller municipal d’opposition à Tourcoing.
(2) Vincent Lanoo a été : conseiller municipal de la majorité à Tourcoing de 1995 à 2008 ; conseiller régional de 2008 à 2010 ; premier adjoint au maire de Tourcoing de 2008 à 2014 ; conseiller général du canton de Tourcoing Nord-Est de 2010 à 2015. Depuis 2014, il est conseiller municipal d’opposition à Tourcoing.
(3) Zina Dahmani a été : adjointe au maire de Tourcoing de 2008 à 2014 ; candidate du PS aux élections législatives de 2012 dans la 10ème circonscription du Nord, battue au 2ème tour par Gérald Darmanin (45,12% contre 54,88%). Depuis 2014, elle est conseillère municipale d’opposition à Tourcoing.
(4) Fondé en 1992, le Rassemblement pour la France (RPF) que manage depuis 2012 Christian Vanneste assure le rôle de passerelle entre Les Républicains et l’extrême droite. Coquille vide, ce parti n’a rien à voir avec le Rassemblement pour la France et l’indépendance de l’Europe (RPFIE), porté sur les fonts baptismaux en 1999 par Charles Pasqua et Philippe de Villiers, qui, lui, a eu une stature nationale en réalisant 13,09% aux élections européennes de 1999 avant d’éclater l’année suivante.
(5) Se voulant l’émanation d’une « droite décomplexée », ultra-minoritaire, la Droite libre qui n’est qu’un think-tank a été créée en 2002 avant que Christian Vanneste n’en prenne les commandes le 10 décembre dernier.
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Genaro Flores le Ven 18 Mar 2016 15:07, édité 2 fois.