Herimene a écrit:Je trouve ça plutôt logique au contraire, car le Nationalisme belge est historiquement assez artificiel (c'est un pays uni par la force des choses, dont la pluralité est manifeste depuis bien longtemps, et les quelques initiatives plutôt maladroites d'unitarisme au XIXème siècle et au début du XXème siècle ont échoué dans les grandes largeurs, en étant confrontées aux aspirations populaires) et car l'identité européenne est une valeur plutôt partagée par les Belges, quelle que soit leur communauté linguistique ou leur origine (ce qui est plutôt rare dans un pays européen, et encore plus notable dans un pays aussi peu unitaire).
Si on remonte plus loin aussi, la Belgique a connu de longues périodes de domination étrangère (à la fois bourguignonne, espagnole, puis autrichienne, mais également française et néerlandaise de manière plus réduite) et le pays s'est construit aussi autour de ça, non pas seulement en opposition à ces dominations mais aussi en en ressentant les effets bénéfiques.
Par exemple, le développement urbain et commercial de la Flandre et de quelques villes wallonnes a été très important sous la période bourguignonne et au début de la période espagnole. Cela a aussi ouvert des débouchés et des accès aux routes internationales pour les cités du Plat pays, qui auraient été beaucoup plus compliqués à obtenir sous un autre régime.
C'est aussi, et sans doute avant tout un pays conscient de son poids international, et de ses faiblesses. Le pays n'a vraiment pas été épargné par les deux guerres mondiales, notamment en 1914-1918 il a fallu une initiative assez audacieuse d'inondation de la dernière portion du pays restée sous contrôle de l'armée belge pour éviter une totale débâcle militaire.
Les Belges savent dès lors très bien les conséquences néfastes des Nationalismes exacerbés, et ils perçoivent aussi parfaitement que les Néerlandais ou les Français ont pu à une époque lorgner sur le pays ou le regarder de haut, même si ce n'était pas forcément véritablement malveillant.
Alors, bien sûr, il y a eu quelques initiatives "euroréalistes" en Flandre, qui ont pu fonctionner ponctuellement avec l'assez fort ressentiment d'une partie des Flamands vis-à -vis de l'extérieur, mais il s'agissait davantage d'une réaction indirecte adressée à l'Etat belge qu'une vraie opposition à la construction européenne. Je pense que même un Indépendantiste flamand convaincu reconnaîtra que si le pays devient un jour indépendant, il aura besoin de l'Union Européenne pour peser internationalement et économiquement.
Sachant que chez les Wallons ou les Germanophones, l'euroscepticisme a toujours été vraiment marginal, on comprend donc facilement pourquoi c'est l'un des rares sujets qui réunit plutôt les Belges.
Je partage largement cette analyse : j'ai beaucoup d'amis Belges (tous Wallons, je le concède) qui se sentent Européens avant de se sentir Belges. La Belgique est une construction nationale extrêmement récente, qui imprègne peu l'esprit collectif de ses habitants, lesquels se projettent (pour tout un tas de raisons historiques et culturelles admirablement bien résumées par Herimene) nettement plus facilement dans le projet européen.