de Marcy » Ven 2 Juil 2021 13:05
Alors qu'il est habituel de comparer les résultats du scrutin avec les sondages x mois avant l'élection pour affirmer que rien n'est joué, je suis revenu sur les sondages menés entre les deux élections présidentielles de 2012 et 2017.
Si l'on exclut les sondages isolés (à savoir que dans mon hypothèse il faut au moins deux sondages de deux instituts différents à un moment donné), il en ressort que Marine Le Pen était presque systématiquement au deuxième tour à partir de la fin avril 2013 (la seule exception concerne une courte période en décembre 2016, où il y a eu une course à trois incertaine pour seulement deux places au second tour, entre elle, François Fillon et Emmanuel Macron).
Son adversaire a été presque systématiquement le candidat de droite, sauf brièvement François Hollande (en janvier 2015 et entre décembre 2015 et février 2016, mais pas systématiquement, dans des périodes post-attentats qui ont vu un regain de popularité du chef de l'Etat), et de manière très ponctuelle en avril 2016 (face à François Hollande et/ou Emmanuel Macron). Puis, à partir de la fin janvier 2017, c'est Emmanuel Macron - et plus François Fillon - qui devient l'adversaire de Marine Le Pen au deuxième tour.
Il ne faut pas exclure cette hypothèse d'un chef de l'Etat renforcé par un événement extérieur (comme des attentats, mais ce peut être aussi une catastrophe naturelle : le SPD avait ainsi remporté des élections législatives en Allemagne à la surprise générale, avant sa phase actuelle de déclin électoral), mais qui devrait intervenir au plus tôt quelques mois avant le scrutin. La surmédiatisation de la figure présidentielle en France favorise un tel effet, qui reste toutefois lié au maintien (forcément temporaire) du climat d'émotion résultant de l'événement : après février 2016, le regain de popularité de François Hollande à la suite des attentats de novembre 2015 avait disparu dans les sondages.
Actuellement, et pour la première fois depuis 2017, on voit émerger la candidature de Xavier Bertrand (autour de 18 %) pour bousculer le duel annoncé. Il est un peu dans la position qu'occupait Emmanuel Macron au deuxième semestre de l'année 2016 : celle du troisième homme. Sauf qu'il a fallu un événement extérieur - les affaires de François Fillon - pour que l'actuel chef de l'Etat devienne le concurrent principal de Marine Le Pen dans les sondages, et ce de manière systématique assez tardivement au regard des dates du scrutin - seulement à partir de fin janvier 2017.
Marine Le Pen n'est pas rassurée par le résultat des régionales, à mon avis pas tant au regard du score du RN au premier tour (près de 20% quand votre électorat s'abstient davantage que les autres n'est pas catastrophique) que des résultats plus que décevants au deuxième tour, et du fait qu'il n'y a pas eu de dynamique dans les dernières semaines avant l'élection en 2017 : finir 1,4 % devant le 3e candidat, quand elle était perçue comme une candidate presque certaine d'accéder au deuxième tour depuis 4 ans, ce n'était pas une performance. Si en plus une partie de son électorat continue de s'abstenir plus que les autres à la présidentielle (jugeant que voter pour des candidats RN qui ne l'emportent jamais est inutile), elle peut passer en troisième position. Toutes proportions gardées, c'est la même déconvenue qu'avait connue Georges Marchais en 1981 (mais dans son cas des électeurs avaient voté socialiste).
Quant à la gauche, toutes chapelles confondues (jusqu'à l'extrême-gauche), elle obtient dans les 27 % à la présidentielle, comme en 2017. Il manque une petite dizaine de points par rapport au premier tour des régionales (36,5 %) : clairement, une partie de l'électorat de (centre-)gauche vote Emmanuel Macron dans les sondages pour l'élection présidentielle, comme en 2017. En 2017, Jean-Luc Mélenchon avait fini par écraser la concurrence (avec Benoît Hamon) et capter la plus grosse partie du vote de gauche : il fait le même pari pour 2022, d'autant plus que contrairement au casting final en 2017 il y a actuellement un candidat EELV et un candidat (ou plutôt une candidate) PS sur la ligne de départ.
Finalement, les 5 sensibilités politiques formant l'offre politique en 2017 restent les mêmes : LREM, RN, LR, France insoumise, et un pôle écolo-socialiste. Même les autres candidats ne changent guère : mêmes candidatures DLF, LO, NPA, UPR et de Jean Lassalle... Seul Jacques Cheminade a dit qu'il ne se représenterait pas en 2022. Outre le divorce à ce jour entre le PS et EELV, le principal changement vient finalement des candidatures annoncées du PCF, de l'UDI et du Parti animaliste - qui restent au mieux dans les mêmes eaux qu'aux élections européennes (2 % à 2,5 % chacune), ce qui ne bouleverse pas le tableau d'ensemble.
Reste cependant l'incertitude Zemmour : testé dans un unique sondage à un peu plus de 5%, il handicape le RN, DLF et LR (2% à 3%, 1% à 2% et 1% pour chacun de ces partis ?).