Impact des frappes américaines en Syrie sur la campagne

[Corondar]

Les frappes américaines en Syrie vont certainement mettre les questions régaliennes et diplomatiques en lumière dans cette campagne. Ces thématiques devraient désormais être plus abordées par les candidats (au bénéfice de qui ?).
Depuis ce matin chaque candidat commente l"actualité, mais cela sera certainement plus développé dans les heures et les jours à venir.
http://www.lci.fr/elections/hamon-fillo ... 44248.html
A priori, l'attaque du régime syrien ne rebute pas forcément les candidats, mais ils appellent plutôt à une coalition internationale sous l'égide de l'ONU qu'à une intervention américaine unilatérale (pour l'heure je n'ai entendu que Dupont Aignan mettre sur le tapis qu'il aurait peut-être fallu mener une enquête pour prouver la responsabilité d'Assad dans l'attaque chimique avant d'attaquer ?). Macron semble un peu plus va t en guerre que la moyenne. La plus embêtée c'est surement Le Pen : après avoir tressé des couronnes de lauriers à Trump, ce contre pied diplomatique intégral est incompatible avec l'agenda diplomatique du FN.
Fillon et Hamon parlent de mettre l'ONU dans la boucle. Mélenchon est pour l'heure un peu plus équilibriste, dénonçant à la fois l'attaque chimique (parlant de combattre les responsables sans les nommer...), l'attaque américaine unilatérale et l'absence de leadership de Merkel et Hollande.

[Fabien]

On notera le réalignement "mainstream" de Fillon, qui a dit comprendre les frappes et demande le départ du président Syrien, soit exactement la position d'Hollande, reprise par Hamon, le candidat PS étant le plus ferme sur les positions néo-conservatrices (ce n'est pas pour rien que Glucksmann fils écrit ses discours, qui se ressemble s'assemble...). En politique extérieure au moins, LR n'incarne pas, ou plus, l'alternance...
Macron est sur une ligne assez proche, en plus prudent.

Mélenchon et Dupont-Aignan évitent prudemment d'accuser le gouvernement syrien des attaques chimiques et critiquent les frappes de Trump. Convergence du candidat de l'aile droite du néo-gaullisme et de celui qui flirte de plus en plus avec le gaullisme de gauche. Equilibré, et non pas équilibriste, cher Corondar, ce second terme me parait plus adapté à l'embarras de Marine Le Pen tiraillée entre sa ligne habituelle en politique extérieure et la solidarité avec son cher Trump (bien qu'elle relativise officiellement ce soutien)...

Globalement, les frappes des Etats-Unis n'auront guère fait bouger les lignes, à la notable et nette exception du retour de LR dans le camp néo-conservateur, comme aux plus belles heures de la fine équipe Sarkozy-Kouchner-BHL...

[SgtJohn74]

Je suis d'accord avec ces analyses.

Potentiel impact négatif pour Marine Le Pen dont je continue de penser que son association avec Trump et le "Brexit" (de son propre fait ainsi que de celui des médias francais ou étrangers) la dessert beaucoup.

Impact neutre pour les autres qui sont sur des positions très proches. F. Fillon a mis suffisamment d'eau dans son vin par rapport à ses commentaires sur la Russie pour finalement se retrouver sur la même ligne que Macron ou Hamon (intervention de la France dans un contexte onusien, autrement action diplomatique avant tout), tout à fait dans la ligne de ce que l'on a connu ces 30 dernières années.

[Natalya]

Personnellement, je m'attend à un impact minime voire nul sur la campagne car je n'imagine pas l'électeur se décider en fonction des frappes américains en Syrie (la situation dans ce pays est de toute façon extrêmement complexe en plus de ne pas être nouvelle) et le vote est dans 15 jours (ce qui est long).

[Eco92]

[quote="Corondar"La plus embêtée c'est surement Le Pen : après avoir tressé des couronnes de lauriers à Trump, ce contre pied diplomatique intégral est incompatible avec l'agenda diplomatique du FN.
Fillon et Hamon parlent de mettre l'ONU dans la boucle. Mélenchon est pour l'heure un peu plus équilibriste, dénonçant à la fois l'attaque chimique (parlant de combattre les responsables sans les nommer...), l'attaque américaine unilatérale et l'absence de leadership de Merkel et Hollande.[/quote]
Non seulement MLP a défendu Trump mais a aussi serré la louche de Poutine, du coup en effet ce n'est guère cohérent (je doute que ça change grand chose pour ses fans, largement habitué aux grands écarts).

Merkel et Hollande ont publié un communiqué conjoint, ils n'approuvent pas formellement l'attaque mais indiquent en avoir été informé et qu'Assad en porte "l'entière responsabilité". De son côté JLM a twitté "Hollande et Merkel portent l'entière responsabilité de donner à Trump le pouvoir solitaire de frapper qui il veut quand il veut." http://www.bfmtv.com/international/frappes-americaines-en-syrie-hollande-et-merkel-pointent-l-entiere-responsabilite-d-assad-1137684.html

Juppé a twitté contre tous politiques défendant une main tendue à Assad, ce que beaucoup ont vu comme une pique à Fillon.

[Fabien]

Je doute moi aussi que la dernière foucade de Trump et les réactions qu'elle a entrainé chez nos politiques fassent bouger les lignes.

Mais quand plusieurs contributeurs soulignent un supposé "accord" des candidats, permettez-moi de ne pas être d'accord. Si on laisse de côté le cas particulier de Marine Le Pen, il me semble que l'un des candidats les mieux placés se démarque nettement de la ligne "avec Trump, bombardons gaiement Bachar pour conduire la Syrie sur le chemin fleuri de la démocratie" que défendent avec des variations mineures (version hard pour Hamon, plus soft pour Fillon et Macron) les candidats issus des partis jusque là dominants et leur dissident le plus notable...

[Corondar]

Je ne pense pas non plus que l'attaque américaine en Syrie changera le rapport de force électoral. Par contre cela va mettre en avant les questions diplomatiques.
Pour les réactions des candidats, je crois surtout qu'il est encore un peu tôt pour se prononcer. Tout ça est récent et on ne sait pas comment tout cela va évoluer (on ne sait pas quelles sont les réelles intentions de Trump sur le long terme par exemple). Les candidats vont affiner leurs positions dans les heures et jours à venir. Pour l'heure, je note surtout que Macron est le seul qui semble considérer une intervention militaire (avec envoi de troupes) sur le terrain comme une option valable (mais il conçoit cela dans le cadre de l'ONU). Mélenchon et Dupont-Aignan sont sur une ligne nettement moins interventionniste, et relativement moins hostile à Assad. Pour Hamon et Fillon, ça m'a l'air nettement plus flou, à part un prudent "laissons l'ONU faire son travail, mais Assad est vraiment pas sympa" (ce qui en effet pour Fillon est un début d'inflexion).
Le Pen est par contre en plein grand écart, mais je doute que cela lui coute des voix.

[VincentLP92]

Sans porter de jugement sur le bien-fondé de ces frappes (les opinions sur le forum sont très divergentes en la matière), je rejoint Corondar pour considérer que cet évènement fait revenir les questions diplomatiques sur le devants de la scène.
Il n'y a pas de bouleversement à attendre, mais peut-être de quoi infléchir certaines tendances.
A droite, MLP est très embêtée. D'autant qu'elle risque d'apparaître moins crédible sur les questions diplomatiques. Une petite partie des ses électeurs vont peut-être hésiter à voter pour elle, notamment au 2e tour. Déjà que les sondages montrent une stagnation électorale pour elle (au 1er tour). Bref, entre ça et les débat, pas de quoi alimenter une dynamique favorable au FN (dont nous sommes tous d'accord pour dire qu'il est déjà très haut).
Fillon est dans une situation difficile aussi car il commence de fait à manger son chapeau : il apparaissait pro-Poutine et soutient les frappes de Trump. En même temps, difficile de soutenir Assad et ses frappes chimiques. Peu de chances que ses soutiens le laissent tomber sur ce sujet, mais ça rend toute reconquête électorale plus difficile. Sauf s'il se montre critique de Trump et récupère une partie des électeurs partis chez Le Pen (mais peu probable).
Macron et Hamon semblent converger vers un interventionnisme qui n'est pas forcément néoconservateur. De quoi alimenter la porosité entre ces deux électorats. Sans doute au profit de Macron qui trouve la une occasion de séduire l'électorat de gauche qui appréciait la politique étrangère de Hollande. A moins que la posture très claire de Hamon lui permette de renforcer sa stature présidentielle (mais je n'y crois plus).
C'est plus délicat pour Mélenchon. Sa position de ni-ni marche bien dans l'électorat très à gauche, mais risque de le fragiliser dans sa conquête (qu'on voit dans les sondages) de l'électorat ex-socialiste. Le soutien à Bachar (et Poutine) n'y passe pas du tout, et l'interventionnisme humanitaire peut ramener un peu vers Hamon.
Certes, on n'est pas sur des grandes masses (beaucoup de choix sont déjà fait), mais il y a quand même de quoi perturber les dynamique actuelle.

Ma conclusion est qu'on peut avoir deux situations :
1- les frappes restent un one-shot (possible avec Trump) et n'auront pas d'impact sur la campagnes
2- un engrenage se met en place, et le retour des questions diplomatiques va favoriser (légèrement) les candidats installés avec des positions claires : Hamon/Macron et Fillon (s'il arrive à imposer un nouveau message).

[Fabien]

Le généticien Axel Kahn, adversaire de Fillon aux législatives de 2012 dans la 2eme circonscription de Paris (5eme arrondissement, partie des 6eme et 7eme) annonce sur sa page Facebook qu'il cesse de faire campagne en faveur de Benoît Hamon, dont il condamne l'alignement sur "la ligne ultra-atlantiste de Hollande".
On comprend à demi-mot que la position dont il est le plus proche sur le dossier syrien est celle de Jean-Luc Mélenchon.

[ploumploum]

C'est effectivement Le Pen qui joue un sacré numéro d'équilibriste alors que Mélenchon semble plus équilibré ou modéré. Encore que dans sa revue de la semaine sur Youtube, le candidat de la France Insoumise évoque clairement un châtiment pour le responsable quel qu'il soit. Il donne même une liste des concernés :
- Al Assad
- USA
- Russie
- Daech
- Turcs
- Al Nosra
- Qatar
- Arabie Saoudite
- Iran
https://www.youtube.com/watch?v=dLxbhHEIlrA

En fait, je pense qu'à défaut d'avoir un énorme impact sur la campagne, la décision brutale de Trump a déjà eu le mérite de clarifier certaines positions. Exemple le petit tweet de Ayrault (vous savez le ministre des Affaires Etrangères). Si c'est ça la seule réaction de la diplomatie française franchement... (Back to the 2003...)

Ou de voir des retournements de veste magistraux dans la presse : dans le Monde, Trump vient de changer de statut. Il passe "d'affreux jojo ou clown" à "Président Trump"