de vudeloin » Ven 16 Mar 2012 15:19
Evidemment, je ne peux manquer de te remercier, calentin, d’avoir bien voulu me faire état de déclarations que je connaissais déjà , puisqu’il m’arrive de lire la presse et que le discours de Miss Le Pen sur l’IVG avait déjà fait l’objet d’images télévisées, lors de son passage dans l’émission « Parole de candidat »…
Marine Le Pen persiste donc, dans son discours, à mettre en balance, soi disant pour des raisons budgétaires, le remboursement de l’interruption volontaire de grossesse (dont je rappelle que son compagnon, Louis Aliot, a considéré sur le canal d’une grande radio publique, qu’elle pouvait « être de confort ») et celui des soins accordés aux personnes âgées et à ceux qui « souffrent ».
Je ne vais pas faire de linguistique facile dans cette affaire mais chacun aura de suite remarqué que ceux qui « souffrent « ne seraient, apparemment, pas les jeunes femmes confrontées à une grossesse non désirée.
On voudrait leur dire, en vertu de je ne sais quelle conception morale, que c’est bien de leur faute qu’on ne s’y prendrait sans doute pas autrement !
La vérité, calentin, c’est que, comme je l’ai déjà dit, Marine Le Pen ne peut évidemment, sous peine d’être assimilée à une horrible rétrograde, faire campagne pour l’interdiction de l’avortement.
Ne serait ce que parce que cette intervention, aujourd’hui médicalisée, évite aux femmes qui la subissent quelques unes des complications qui pouvaient découler d’avortements réalisés, dans le temps d’avant 1975, par des personnes qui n’avaient, en général, pas les qualifications médicales pour faire face à la chose.
Alors elle introduit cette étonnante « mise en balance « qui offre, cependant, un autre avantage et démystifie un peu plus, à mon avis, le caractère profondément discriminatoire de sa candidature.
Parce que, voilà , dire que, pour des « raisons budgétaires », on pourrait être amené à dérembourser l’IVG participe d’une méconnaissance particulière des principes même de la Sécurité Sociale.
Pour plusieurs raisons.
D’une part, parce que le coût, pour l’assurance maladie, des IVG pratiqués tant en milieu hospitalier que par voie médicamenteuse peut être estimé comme inférieur à 100 millions d’euros et même plus proche de 60 ou 70 millions, c'est-à -dire une goutte d’eau dans l’océan des dépenses de santé du pays.
D’autre part, parce que le principe de la Sécurité Sociale, ce qui l’a fondé, notamment à la Libération, époque dont je reconnais qu’elle fut assez difficile à vivre pour quelques uns des parrains du Front National, c’est le principe de solidarité.
C'est-à -dire que les bien portants cotisaient autant pour avoir le droit d’être soignés que pour soigner tout de suite ceux qui étaient malades, que les personnes en activité cotisaient pour avoir le droit de toucher une pension ou une retraite tout en permettant tout de suite à ceux qui étaient retraités de vivre, dans le plus parfait esprit de mutualisation de la charge à répartir entre tous les acteurs de la société et pour l’avantage commun de tous.
Moi, assuré social, bien portant, cotisant depuis une trentaine d’années, je ne suis pas comme Marine Le Pen.
Je ne choisis pas, entre les gens qui peuvent en avoir besoin, qui aura droit à l’appui de la Sécurité Sociale.
Et je trouve naturel d’aider de la même manière la personne âgée suivant un traitement longue maladie (c’est là la source principale de dépenses de santé aujourd’hui et c’est, au fond, assez normal qu’il en soit ainsi) et la jeune femme en détresse qui s’est retrouvée enceinte pour des raisons sur lesquelles, au demeurant, je n’ai pas à porter le moindre jugement moral quelconque.
Ne pas intégrer que la Sécurité Sociale n’est pas assimilable à une sorte de droit de tirage, et que la carte Vitale n’est pas une carte Bleue, et qu’elle est l’expression de la solidarité intergénérationnelle et interprofessionnelle, condition nécessaire du « Vivre ensemble » est significatif.
Avec le discours qu’elle tient sur l’IVG, comme avec le reste de son discours sur la Sécurité Sociale, Marine Le Pen vise à discriminer et à rompre la solidarité entre les membres mêmes de notre société.
Cette conception a un nom : elle illustre une pensée d’extrême droite, divisant les classes populaires en prétendant les protéger.
Car la véritable question, pour ceux qui l’auraient oublié, c’est que la Sécurité Sociale et singulièrement l’assurance maladie ne souffre pas d’un excès de consommation médicale de la part des Français et des assurés sociaux en général.
C’est qu’elle est malade du chômage, de la précarité du travail, de la fraude au paiement des cotisations, phénomènes contre lesquels le programme du FN me semble d’ailleurs quelque peu muet…
Quand on choisit d’opposer les soins aux personnes âgées et les IVG, on occulte d’autant mieux le reste et l’on dédouane facilement certains de ne pas jouer parfaitement le jeu de la protection sociale.
Il est vrai que Miss Le Pen préfère, dans le même ordre d’idées, s’opposer aux mariages mixtes (c’est cela, ce que signifie le fait de ramener à 10 000 au lieu de 200 000 le nombre des entrées permanentes d’étrangers sur le territoire français), aux travailleurs clandestins que de s’attaquer à la racine du mal, notamment les filières patronales de l’immigration clandestine qui fait que bien des chantiers (y compris des commandes publiques !) sont exécutés par des salariés clandestins et que bien des fruits et légumes sont ramassés en saison par des travailleurs sans droits ni titre de séjour.
Reconnaissons au moins une qualité à Marine Le Pen : elle ne souhaite pas s’opposer aux avortements spontanés, dont chacun sait qu’ils sont les plus nombreux !