de vudeloin » Mar 11 Oct 2011 19:29
Ensuite, je pense qu’il faut regarder avec le plus d’attention possible les niveaux réels de participation par référence à la population électorale, notamment, ou par rapport à l’influence que le PS avait lors des européennes 2009.
Je rappelle, pour mémoire, que j’ai retenu cette élection car c’est, dans la dernière période, celle qui me semble le plus correspondre au « noyau dur « de l’électorat socialiste, celui qui, naturellement en quelque sorte, était directement intéressé par la consultation de dimanche dernier.
Après, je conçois fort bien que certains me discutent ce choix dont la part d’arbitraire est assez nette et que j’assume pleinement.
Ceci dit, si vous le souhaitez, je peux aussi mettre en regard le score des listes PS autonomes du scrutin régional et le nombre de votants au premier tour des primaires en sus de celui des européennes…
Je ne traiterai ici que de l’exemple de la région Ile de France, laissant à d’autres le bonheur d’envisager la question ailleurs.
Prenons donc déjà Paris.
Aux régionales 2010 ( dernier scrutin où toute la France a voté ), la capitale comptait 1 204 251 électeurs inscrits.
Le PS, par la voie de la liste Huchon, y a d’ailleurs obtenu 148 324 suffrages au premier tour.
Lors de ces primaires, nous avons eu 164 225 votants, et 163 730 suffrages exprimés.
On est donc sur une mobilisation importante de l’électorat PS comme de l’électorat tout simplement (13,6 % des électeurs 2010) qui traduit un réel intérêt pour la consultation.
Aux européennes 2009, la liste PS avait recueilli 87 344 suffrages sur la capitale.
Ces primaires donnent donc un ratio de 1,87 au regard des voix des européennes, et de 1,10 par rapport aux régionales.
En Seine et Marne, on comptait, en 2010, 812 506 électeurs inscrits et l’on a compté 43 481 votants aux primaires citoyennes, pour 43 371 exprimés.
On se situe donc avec une participation proche des 5 % sur l’électorat 2010 (5,35 % exactement), qui peut traduire notamment la difficulté de mise en place de bureaux de vote dans certaines parties du département ( notamment à l’Est et au Sud ) où il n’y avait souvent qu’un ou deux bureaux dans les grands cantons ruraux.
La liste Huchon des régionales 2010 avait recueilli 82 861 voix.
Et la liste Désir 38 710 voix aux européennes.
Les ratios sont donc de 0,52 entre primaires et régionales mais de 1,12 au regard des européennes.
Dans les Yvelines, on comptait, en 2010, 912 953 électeurs inscrits et l’on observe 59 674 votants aux primaires, soit un ratio de 6,54 %.
Pour un département orienté à droite, ce n’est évidemment pas si mal que cela, même si la liste Huchon avait obtenu 92 637 voix au premier tour.
A noter, par exemple, que les deux bureaux rambolitains ( Rambouillet ) ont attiré 1 137 électeurs alors que la liste Huchon a fait 1 796 voix aux régionales…
Sur Trappes, les quatre bureaux ouverts ont été fréquentés par 665 électeurs ( qui ont donné 240 voix à François Hollande et 230 à Martine Aubry ) là où la liste Huchon avait obtenu 1 458 voix au premier tour.
Aux européennes, la liste Désir avait fait 45 784 voix.
Les ratios sont donc de 1,30 au regard des européennes, mais de 0,49 au regard des régionales.
Un faible ratio qui peut être en lien avec le fait que Jean Paul Huchon était tête de liste régionale.
Dans l’Essonne, département de Manuel Valls, où sa performance a sans doute été en deçà de ce qu’il pouvait escompter, on avait, en 2010, 753 560 électeurs inscrits.
On se retrouve avec 58 973 votants aux primaires, soit un taux de 7,83 %, supérieur à celui observé dans le 77 et le 78.
Plus de bureaux de vote dans plus d’endroits, cela fait tout de suite la différence puisque le ratio bureaux/communes était supérieur à 1, ce qui n’était le cas ni des Yvelines, ni de la Seine et Marne.
On a ainsi compté neuf bureaux à Evry, ville de Manuel Valls, où 2 642 électeurs sont venus, avec 1 043 voix pour le maire de la ville, 603 Hollande, 489 Aubry, 312 Montebourg, 179 Royal et 8 Baylet.
En 2010, 3 372 électeurs avaient voté Huchon au premier tour.
Dans la ville de Viry Châtillon ( maire PG ), on a dénombré par contre 916 votants, dont 347 Hollande, 265 Aubry, 115 Montebourg, 108 Valls, 80 Royal et 1 Baylet.
En 2010, 1 752 voix Huchon au premier tour des régionales.
Lors des européennes 2009, on avait eu 44 950 voix Désir.
Et aux régionales 2010, 85 545 voix Huchon.
Ratios : 1,31 et 0,69.
Dans les Hauts de Seine, on comptait en mars 2010 918 640 électeurs inscrits et l’on a compté, lors de ces primaires, 71 431 votants, soit un ratio de 7,78 %, proche de celui de l’Essonne.
En même temps, le 92, c’est 36 communes seulement et plutôt peuplées…
94 508 voix pour Jean Paul Huchon et sa liste en mars 2010.
49 492 voix Désir en 2009, ce qui nous donne un excellent ratio primaires sur européennes de 1,44 et un ratio primaires/régionales de 0,75.
En Seine Saint Denis, on comptait 718 766 inscrits au premier tour des régionales.
On a relevé 44 843 votants, soit un ratio de 6,24 %, inférieur à celui observé ailleurs en Ile de France dans un département de gauche, à part le cas très particulier de la Seine et Marne.
La liste Huchon, en mars 2010, avait recueilli 71 602 voix.
Et la liste Désir, en juin 2009, 34 900 voix.
Soit des ratios primaires/européennes de 1,28 et primaires/régionales de 0,63.
Dans le Val de Marne, on dénombrait en mars 2010 757 676 électeurs inscrits.
On notera d’ailleurs à ce propos, de suite, que la Seine Saint Denis compte une population résidente autrement plus importante que celle du Val de Marne et que le nombre d’électeurs y est plus faible.
Ce dimanche, 56 297 Val de Marnais ont participé à la primaire du PS, soit un ratio de 7,43 % tout à fait en lien avec l’implantation territoriale du Parti qui gère des villes comme Cachan, Créteil, Alfortville, Fresnes ou l’Hay les Roses.
En mars 2010, 80 685 électeurs avaient voté Huchon.
En juin 2009, la liste Désir avait obtenu 41 779 voix.
A noter que 5 bureaux n’ont pas encore été validés.
Les ratios sont donc de 1,35 (Primaires/européennes) et de 0,70 (Primaires/régionales).
Dans le Val d’Oise, on comptait 685 900 électeurs en 2010.
Ce dimanche, nous avons vu se déplacer 42 218 Val d’Oisiens, soit un ratio de 6,15 %, à prendre en compte avec une minoration liée à l’impact, réel, d’un ratio bureaux/communes inférieur à 1.
Ainsi, les électeurs des 19 communes du canton vexinois de Vigny, devant le refus manifeste de la municipalité UMP du chef lieu de laisser une salle à disposition, étaient invités à se déplacer à la salle de sports de la commune d’Us, qui est gérée par la gauche depuis 2008.
Pour l’anecdote, il y a eu 477 votants dans ce bureau intercommunal, alors même que le candidat PS des cantonales avait fait 1 616 voix en étant candidat unique de la gauche en 2008.
On avait dénombré 73 836 voix pour Jean Paul Huchon lors des régionales de 2010 sur le département.
Et 36 949 voix Désir en 2009.
Ratios : 1,14 et 0,50.
On observe donc, de manière générale, un rapport positif entre nombre de participants aux primaires et vote pour les listes PS au Parlement européen.
Dans les huit départements de la Région, le ratio est plus ou moins nettement supérieur à 1, traduisant, me semble t il, à la fois la participation ( quoique marginale ) d’électeurs de gauche d’autres sensibilités au scrutin des primaires mais surtout, nonobstant les difficultés inhérentes à l’organisation, le fait que des électeurs profondément socialistes ont été tentés épisodiquement, en juin 2009, par le vote écologiste.
En juin 2009, les voix de la liste Désir représentaient 13,38 % des suffrages socialistes (379 908 sur 2 838 160) sur la France entière.
Ce qui constituait une mauvaise performance régionale (13,58 % des suffrages exprimés) au regard de la moyenne socialiste en France (16,48 %), elle-même assez déprimée par rapport aux habitudes.
Pour ces primaires, les votes franciliens constituent un ensemble de 539 458 suffrages exprimés, soit 20,35 % du total des bulletins validés pour l’heure par la Haute Autorité des Primaires (2 650 259).
On est donc avec un corps électoral mobilisé pour ces primaires inférieur à celui des régionales ( je crois que ce n’est pas utile de le souligner plus, les ratios ci-dessus suffisant à le démontrer ), mais supérieur de plus de 40 % sur l’ensemble de la Région Ile de France par rapport aux votes PS des européennes.
Le vote des primaires peut donc s’interpréter comme assez fortement urbain.
Dans un département de forte influence socialiste comme le Puy de Dôme, dont la structure est mixte ( une large part de la population est urbanisée, malgré une présence évidente de la ruralité ), les européennes avaient rassemblé 36 856 votes sur la liste PS, les régionales 58 484 et ces primaires n’en ont, finalement réuni que 30 625, c'est-à -dire un chiffre un peu en deçà du rapport général primaires/européennes (0,93) mais à regarder dans le rapport général hors Ile de France où le scrutin de ce 9 octobre a, manifestement, beaucoup intéressé.
Si on retire l’Ile de France du total des européennes et du total des primaires, on a d’un côté 2 458 252 voix PS et de l’autre, 2 120 801 électeurs des primaires.
Soit un ratio global de 0,86.
Tout laisse donc penser que l’électorat des primaires est assez fortement urbain ( il faudrait évidemment, mais ce n’est pas le lieu de cet article déjà complexe, excusez m’en ), sans doute politisé au sens où il est soumis à un flux d’informations relativement conséquent par des canaux divers et présente donc une relative sous représentation du monde rural comme des quartiers les plus populaires.
Je n’ai pas de ligne globale à ce sujet, mais les différences observées en Région Ile de France montrent aussi les disparités entre quartiers populaires et quartiers plus mixtes et plus « huppés « , comme je l’ai par exemple évoqué avec le cas de Rambouillet, où le maire, Gérard Larcher, ancien Président du Sénat, n’a sans doute rien fait pour faciliter la tenue du scrutin et celui de Trappes, où la municipalité est à direction socialiste aujourd’hui.
Et j’ai vu quelques villes de Seine Saint Denis où l’écart de votation va pratiquement du simple au triple entre grands quartiers d’habitat social et secteurs plus mixtes.
On peut donc se tracer quelques pistes de réflexion.
Un, l’aspiration au changement est forte et nul doute que ce vote de dimanche lui donne une certaine épaisseur, ce que l’inquiétude des porte parole de l’UMP montre d’ailleurs, un peu en creux.
Deux, il serait sans doute un peu rapide, pour le PS lui-même, de penser qu’il a rassemblé, lors de cette consultation originale, un électorat totalement acquis aux valeurs défendues par le programme et le projet socialistes.
Au-delà en effet des militants d’autres forces de gauche ( voir d’ailleurs ) qui ont participé au scrutin, peut être pour quelques subtils calculs dont la logique peut échapper, il semble bien que l’expression du « peuple de gauche « ainsi mobilisé soit plus diverse et variée que ne le laisserait supposer le vote.
Trois, si la mobilisation des couches « structurées « et « intégrées » de la population semble assez nette ( et ceci explique sans doute l’importance relative du vote francilien dans le scrutin ), il semble qu’il reste quelque obstacle et difficulté à faire se déplacer l’électorat du précariat, vivant à peine au dessus du seuil de pauvreté, à l’exception bien sûr des plus âgés, qui ont une autre « culture « politique.
N’oublions jamais qu’un retraité de 60 ans aujourd’hui avait 30 ans en 1981 et 20 ans ou peu s’en faut lors de la signature du Programme commun en juin 72…
L’enjeu de la présidentielle à venir me semble là : oui ou non les couches les plus modestes de la population vont-elles prendre leur place dans le débat politique, rejetant à la fois l’abstention et le vote xénophobe dont on tente d’accréditer la percée ?
Si la gauche parvient à « parler « à cet électorat, les jours de Sarkozy à l’Elysée seront effectivement comptés.