de vudeloin » Dim 18 Déc 2011 18:02
La situation de ce département appelle de faire un tour d'horizon un peu plus approfondi, sans cependant prétendre épuiser le sujet, ne serait ce que parce qu'en Meurthe et Moselle, comme ailleurs, une bonne partie des clés du scrutin résident dans le contexte créé par l'élection présidentielle.
Le « canard « a longtemps été un département un peu ambivalent, produit de sa propre histoire, entre la Lorraine catholique du Sud, vouée au culte de Saint Nicolas, de Jeanne la Pucelle et j'en passe, et celle du Pays Haut, produit d'un événement historique essentiel, à savoir la défaite de 1871 et l'annexion par l'Allemagne de ce qui va constituer l'actuel département de la Moselle, un département dont le Saulnois était issu de l'ancien département de la Meurthe.
Par la volonté de la commission d'armistice et des De Wendel, la partie occidentale de l'ancienne Moselle (le pays Haut donc) est restée française et se retrouva largement peuplée, dans les années 20 et 30, par une forte immigration venue singulièrement d'Italie et de Pologne, dont on retrouve les traces dans le personnel politique actuel du département, notamment au sein des élus du courant communiste (il semble préférable de parler de courant, vu la diversité des approches de cette identité politique dans la Région), présent dans ce secteur comme peu dans la Région.
L'histoire de la Meurthe et Moselle s'est aussi constituée autour des fonctions militaires d'une bonne part des villes de la région, surtout durant la période courant de 1871 à 1918, où le département se trouvait sur la frontière avec l'Empire allemand.
Ainsi, Toul, ville à la fois épiscopale et militaire, illustre cette prégnance de tels enjeux, et fut longtemps une sorte de position de force de la droite puisque Nadine Morano, actuelle députée, y fut précédée par le général Bigeard, élu au premier tour en 1978 !
Depuis, les choses ont quelque peu changé et la gauche n'a cessé de se renforcer, y compris au Sud du département, avec des résultats parfois surprenants d'une élection l'autre, mais une tendance générale à faire du département la tête de pont de la gauche au Nord Est de la France.
Géographiquement, la Meurthe et Moselle est aussi marquée par un découpage administratif particulier : on compte en effet 42 cantons, largement tenus par la gauche et, surtout, près de 600 communes.
Dans la première circonscription, orientée sur Nancy, la droite ne contrôle que le canton de Saint Max (un peu moins de 19 000 habitants), dont le chef lieu est de droite mais la seconde commune, Essey, de municipalité PS.
Le canton de Seichamps, pour sa part, compte entre 16 500 et 17 000 habitants, et neuf communes dont Seichamps (PS depuis 2008), Pulnoy (UMP) et Saulxures les Nancy (DVD).
Le canton de Malzéville, compte plus de 22 000 habitants, son chef lieu étant une ville PS, tandis que Bouxières aux Dames est plutôt à droite, Custines à gauche et Lay Saint Christophe à droite.
Nous avons donc vingt trois communes hors Nancy, les trois cantons nancéiens concernés regroupant plus ou moins 70 000 habitants, avec notamment le quartier populaire du Haut du Lièvre, en surplomb de la ville.
Dans la seconde circonscription, peu de communes aussi sur un siège plutôt urbain, regroupant le dernier canton de Nancy à droite (plus de 32 000 résidents), les deux cantons de Vandoeuvre (population équivalente avec une mairie PS et l'un des deux sièges au centre), le canton de Jarville la Malgrange (25 000 habitants), composé de Jarville (maire centriste), Heillecourt (DVD), Ludres (DVD) et Houdemont.
Le canton de Laxou, peuplé d'environ 30 000 habitants, comprend la ville de Laxou (centre) et celle de Villers les Nancy (PS).
Résultat évidemmment incertain mais à suivre de très près.
La troisième circonscription reprend sept des cantons du Pays Haut, ou de l'arrondissement de Briey.
Avec une étrangeté : Briey, Herserange,Longuyon et Longwy ont des mairies de droite alors que les cantons sont, pour six sur sept, tenus par la gauche.
L'ensemble du siège couvre 84 communes, dont un certain nombre (pour ne pas dire un nombre certain ) de municipalités à direction de gauche.
Par commodité, j'ai mis l'étiquette PCF pour les mairies dont le maire est issu de la famille communiste, mais les choses ne sont pas toujours aussi simples.
On trouve ainsi Audun le Roman (PCF), Tucquegnieux (PCF), Trieux (PS, la ville du député Christian Eckert), Piennes (PCF), Joudreville (PCF), Crusnes (PCF), Joeuf (PCF, ville natale de Michel Platini), Mancieulles (PCF), Haucourt Moulaine (PS), Longlaville (PCF), Hussigny Godbrange (PCF), Saulnes (PCF), Mont Saint Martin (PCF), Thil (PCF) ou encore Villerupt (PCF, ville connue pour son festival annuel du cinéma italien).
Le match à gauche sera à suivre, le siège étant celui des sièges lorrains le plus susceptible d'échapper au PS, nonobstant les qualités du sortant.
Dans la quatrième circonscription, nous sommes dans l'arrondissement de Lunéville, avec l'ensemble des cantons de cette partie Est et Sud Est du département (le corps du canard, si l'on peut dire), avec un total de 164 communes, total majoré des 26 communes des cantons de Tomblaine et Saint Nicolas de Port.
En termes démographiques, les deux cantons issus de l'arrondissement de Nancy comptent 25 000 et 28 000 habitants et leur poids sera déterminant dans le vote final.
Saint Nicolas a un maire centriste, Dombasle un maire PS ; Lunéville, on l'a vu, est passé à droite, Tomblaine est PS, Varangéville PCF, Laneuveville devant Nancy DVD.
Hormis Lunéville et Baccarat (mairie DVD), l'arrondissement de Lunéville comprend peu de villes importantes si ce n'est Blainville sur l'Eau (mairie DVG) et Damelevières (mairie PCF) dont nous avons beaucoup parlé en commentant l'élection partielle de Bayon.
A noter toutefois que les cantons lunévillois sont peu peuplés, le canton d'Arracourt étant le moins peuplé du département avec moins de 1 500 habitants.
Il faut suivre de près ce siège, Jean Philippe, qui ne me semble pas aussi assuré que cela pour la droite.
Dans la cinquième circonscription, on se retrouve avec la totalité de l'arrondissement de Toul, nonobstant les trois communes (environ 1 000 habitants) du canton de Thiaucourt Régniéville enclavées dans le pays de Briey, c'est à dire un ensemble de 109 communes et de plus de 67 000 habitants.
Le siège est complété par trois cantons nancéiens de Haroué ( 8 700 habitants dans 30 communes), Vézelise (9 500 habitants, 33 communes) et Neuves Maisons (9 communes, 20 000 habitants, dont le chef lieu est à direction PS).
Affaire à suivre dans ce secteur, vu que les principales villes de l'arrondissement de Toul (Toul, Ecrouves, Foug ) sont à gauche.
Enfin la sixième circonscription qui regroupe les trois communes du canton de Thiaucourt (environ 1 000 habitants), la partie Sud du pays Haut, avec les cantons de Conflans (environ 20 000 habitants, avec deux mairies PCF pour les communes de Jarny et Conflans), Homécourt (environ 17 000 habitants avec des mairies PCF sur Homécourt, Moutiers ou Auboué), et Chambley Bussières (environ 4 000 habitants), et plusieurs cantons détachés de l'arrondissement de Nancy.
Dieulouard est un canton de près de 20 000 habitants dont le chef lieu est à droite, tandis que Blénod les Pont à Mousson et Pagny sur Moselle sont PS.
Le canton de Nomeny ne compte qu'environ 10 000 habitants, répartis sur vingt cinq localités différentes (le chef lieu est à direction socialiste), celui de Pont à Mousson en compte plus de 20 000.
Avec une intéressante particularité qui veut que la ville chef lieu soit de droite, malgré le poids de ses 14 000 habitants.
Enfin, dans le canton de Pompey (plus de 30 000 habitants), on trouve deux communes de droite importantes, Champigneulles et Maxéville et deux communes de gauche de taille proche, Frouard et Pompey.
Le siège sera sans doute assez disputé et intéressant à suivre.
Bref, nous suivrons ce département avec intérêt, vu qu'il est un peu comme une tête de pont de la gauche dans le Nord Est du pays.
Une situation à voir de haut (depuis les montgolfières de Chambley), de près ou encore de loin, selon l'angle de vision !